Intervention de Max Brisson

Réunion du 3 décembre 2018 à 21h30
Loi de finances pour 2019 — Recherche et enseignement supérieur

Photo de Max BrissonMax Brisson :

Je veux d’abord saluer, madame la ministre, le choix que vous avez fait de rompre avec la philosophie du précédent quinquennat. Qu’on se le rappelle : baisse des crédits affectés à la recherche, mise en place d’une sélection par tirage au sort, création d’allocations sans contreparties, à l’image de l’aide à la recherche du premier emploi ; c’étaient de mauvaises mesures, qui ternissaient l’image et l’efficacité de nos politiques en matière de recherche et d’enseignement supérieur. Assurément, ces choix questionnables et polémiques sont derrière nous.

L’augmentation des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » va donc dans le bon sens, avec, au total, plus de 500 millions d’euros supplémentaires, essentiellement au bénéfice de la recherche, comme l’a dit le rapporteur spécial Jean-François Rapin. L’enseignement supérieur continuera en effet de connaître, lui, une évolution inférieure à celle du budget général de l’État, et surtout à celle des effectifs d’étudiants.

L’ambition de montée en puissance de l’enseignement supérieur ne se retrouve donc pas suffisamment dans ce budget ; le plafonnement de la CVEC à 95 millions d’euros en est l’illustration. Pour l’instant, vous n’avez répondu que très partiellement, madame la ministre, à la demande pourtant insistante du rapporteur pour avis de notre commission de la culture, Stéphane Piednoir.

Je suis donc au regret de constater que, en matière d’enseignement supérieur, la hausse des crédits vient plutôt donner de l’air à des programmes asphyxiés, colmater des brèches déjà béantes et renforcer certains axes, sans que se dégage une politique globale.

Deux chantiers me semblent pourtant essentiels.

Le premier est de savoir comment rendre la recherche plus attractive. Comme l’a souligné la rapporteur pour avis de notre commission, Laure Darcos, la rémunération nette d’un jeune chercheur correspond à peine à 1, 8 fois le SMIC, et elle atteint péniblement 2 800 euros au bout de dix ans de carrière. Nous serons donc tous d’accord, je pense, pour dire que cela porte préjudice à l’attrait et au dynamisme de la recherche dans notre pays.

Vous nous proposez, certes, d’inscrire 130 millions d’euros de crédits supplémentaires : ils permettront essentiellement d’améliorer le déroulement des carrières, de déployer le protocole PPCR, de financer le glissement vieillesse-technicité, mais ils ne s’attaqueront pas à la mise à plat du régime indemnitaire des enseignants-chercheurs.

Le second chantier est, bien entendu, la lutte contre l’échec massif des étudiants dans les premières années de leur parcours universitaire. C’est le cancer de l’enseignement supérieur et de notre société ; il prouve que l’université peine à répondre à la massification continue et à préserver cette belle spécificité française du faible coût de l’enseignement supérieur.

Notre collègue Stéphane Piednoir a rappelé que le taux de réussite en licence n’était que de 28 % et que le Gouvernement envisageait d’atteindre péniblement 30 % en 2020. Je me demande si ces maigres objectifs n’avouent pas un manque de volonté politique. Il en est de même avec le plan Étudiants : 206 millions d’euros ont été annoncés, mais moins de la moitié seront effectivement affectés au plan, puisqu’une partie servira à payer le GVT et à compenser la hausse de la CSG.

Madame la ministre, votre budget devrait porter l’ambition de renvoyer aux limbes de l’histoire ces taux d’échecs massifs qui caractérisent de nombreuses filières de l’université française et de l’enseignement supérieur. Pour cela, il faut allouer des moyens importants à la réussite des étudiants, diversifier les modes de financement de l’université, affiner le dispositif Parcoursup, donner toute sa place aux établissements privés d’enseignement supérieur, mais surtout travailler – et je crois que c’est la clé – à l’articulation entre le lycée et la licence, entre le lycée et l’enseignement supérieur.

Or, depuis deux ans, nous constatons au contraire que les deux ministères travaillent en parallèle plutôt qu’en partenariat. Ainsi, la loi ORE a été lancée avant la réforme du baccalauréat, dans un calendrier où l’aval se désintéresse de l’amont et où l’amont ne cherche pas à comprendre l’aval. Le défi est bien, et vous ne l’abordez pas de manière frontale : c’est celui du « bac-3/bac+3 ».

Certes, comme les membres du groupe Les Républicains, je voterai les crédits de cette mission, enrichis des amendements de nos commissions. Toutefois, je crois qu’il est urgent de se retrousser les manches et de s’attaquer aux problèmes structurels de l’échec et du décrochage qui marquent l’enseignement supérieur, et de travailler pleinement aux liens entre le lycée et la licence, entre le secondaire et l’enseignement supérieur.

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