Je me réjouis que les problématiques agricoles suscitent toujours autant de réflexions et d'intérêt parmi nous.
Le prochain cadre financier pluriannuel ne sera effectivement pas adopté avant les élections de mai 2019. On parle même d'une réunion du Conseil européen à cet effet en octobre 2019.
En réponse à M. Gattolin, il est vrai que les politiques agricoles et de cohésion n'occultent pas la défense, l'innovation, l'immigration.
Nos amis britanniques quittant l'Union européenne - peut-être pas tout de suite, mais d'ici à quatre ans - nous devrons faire l'impasse sur 14 milliards d'euros de ressources, et devrons trouver, d'autre part, une quinzaine de milliards pour les nouvelles politiques, soit un delta de 30 à 35 milliards d'euros.
Lorsqu'on parle d'innovation, on peut imaginer qu'une agriculture de précision, grâce à l'intelligence artificielle, y aurait toute sa place. Le « sens de l'histoire » implique manifestement qu'il y ait de moins en moins de produits phytosanitaires et de moins en moins d'intrants. La France ne doit pas tourner le dos à cette évolution.
Dépassons le cadre uniquement budgétaire. À quoi a finalement servi la politique agricole commune pendant une quarantaine d'années ? Je comparerai la PAC plutôt à la politique des États continents, qui conçoivent l'activité agricole comme une activité stratégique - ce qui n'est pas le cas de l'Europe. J'ajouterai qu'en France, l'Autorité de la concurrence apparaît bien plus sévère que dans d'autres États membres. En Allemagne et aux Pays-Bas, l'autorité nationale se positionne aux cotés des entreprises, alors que, dans notre pays, elle semble plutôt leur faire face. C'est quelque peu gênant, car cela a des conséquences en termes de perte des parts de marché de l'agriculture française.
Monsieur Haut, vous regrettez que la réponse de M. Moscovici n'ait pas été de meilleure qualité. Nous ne pouvons effectivement que le déplorer.
Jean-Yves Leconte a raison, il faut faire attention à ce que la PAC ne devienne pas un outil de désagrégation de l'Union européenne. La PAC a été la première politique intégrée de l'Europe, qui comptait alors six États membres. Depuis lors, la France n'est pas totalement étrangère à cette renationalisation rampante. On demande de plus en plus de subsidiarité, mais, en l'espèce, il s'agit de subsidiarité à l'extrême, sous couvert d'une diminution de la bureaucratie. C'est extrêmement dangereux !
Quel que soit l'avenir de nos relations avec nos amis britanniques, il va falloir « réenchanter » l'Europe. La politique agricole commune devra être abordée différemment pour convaincre les Européens de sa pertinence, mais il ne faudra pas l'abandonner.
Monsieur Ouzoulias, vous avez mis en avant le risque de désagrégation de l'Union européenne sous l'effet du processus de désertification territoriale, qui est tout à fait réel. Le « réenchantement » de l'Europe devra se faire avec ou sans nos amis britanniques. Je souhaiterais au demeurant un deuxième référendum pour qu'ils puissent rester à bord ! Depuis 1973, voire même depuis 1960 avec l'accord de libre-échange, les relations avec nos voisins ont été marquées, s'agissant de la problématique européenne, par un long cortège d'incompréhensions et d'incohérences.
Je suis d'accord avec vous, Monsieur Cuypers : au-delà des grandes entreprises alimentaires françaises, derrière tout agriculteur il y a un chef d'entreprise qui a besoin de lisibilité, de durabilité et de constance ; sinon il ne lui est pas possible d'adapter son outil de travail.
Mes chers collègues, je vous propose donc de changer le terme « dumping » par celui de « nivellement » et d'ajouter le point suivant, pour répondre à M. Cuypers : « Demande que les règles de la future PAC ne soient pas modifiées durant la période du prochain cadre financier pluriannuel 2021-2027 afin d'assurer aux agriculteurs un minimum de stabilité et de lisibilité ».
Enfin, à l'initiative du président Larcher, nous sommes en train de réfléchir à la manière de fédérer les chambres hautes de plusieurs États membres pour adresser à la Commission européenne un papier commun sur les desiderata des « pays amis » de l'agriculture. Parmi ces pays pourraient figurer la Pologne, la République tchèque et la Slovaquie. En revanche, nos amis allemands divergent de nos analyses. Nous devrons discuter avec eux, comme j'ai commencé à le faire, pour essayer de contourner la problématique purement financière, car la PAC ne se résume pas à une ligne budgétaire. Tel sera l'objet des travaux menés par le groupe de suivi sur la PAC, conjoint à la commission des affaires européennes et à la commission des affaires économiques.