Pour les habitants de notre pays, la question du logement est capitale. Elle l'est d'autant plus qu'elle avait motivé, en 1999-2000, la promulgation de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dont l'une des dispositions, l'article 55, posait le principe de l'existence, dans l'ensemble des localités urbaines de France, d'un parc locatif social constituant 20 % des résidences principales.
Or il est permis de se demander ce qu'il advient de cette obligation puisque l'article 2 du présent projet de loi l'intègre dans un cadre supposé plus large, celui des plans locaux d'urbanisme.
Il tend ainsi à placer l'objectif socialement impérieux de construction de logements locatifs sociaux en objectif secondaire au regard des politiques d'urbanisme menées par les collectivités territoriales.
Il risque même de créer les conditions d'une forme d'inversion des priorités, qualifiant de fait la réalisation de logements sociaux de « supplément d'âme » des politiques urbaines.
L'amendement n° 7 rectifié pose concrètement la question essentielle qui devrait animer toute réflexion sur le logement.
En effet, la loi doit-elle faire place aux seules préoccupations urbanistiques des élus, à leur capacité d'élaborer des plans locaux d'urbanisme, ou doit-elle les mettre en situation de respecter le cadre législatif fixé depuis cinq ans, afin de répondre aux besoins de la population ?
Comment peut-on aujourd'hui concevoir une politique d'aménagement urbain sans prendre en compte le fait que les revenus de la majorité des demandeurs de logement sont largement inférieurs aux plafonds de ressources - le plus souvent, même, en dessous de 60 % - que près d'un ménage français sur deux n'est pas imposable au titre de l'impôt sur le revenu et que le salaire moyen dans notre pays avoisinent 1 600 euros mensuels ?
La situation présente, d'ailleurs, des caractères de plus en plus insoutenables. C'est ainsi que dans une région comme l'Île-de-France, qui compte 20 % de la population nationale, et où l'on ne construit aujourd'hui que 10 % des logements de l'ensemble du pays, chaque jour qui passe voit s'aggraver les discriminations dont souffrent les demandeurs de logement.
C'est aussi dans la région d'Île-de-France que se concentrent la plupart des communes qui se refusent encore à respecter les règles fixées il y a déjà cinq ans.
Ces villes, certes, sont parfois confrontées à la difficulté de trouver des espaces disponibles pour construire des logements sociaux, mais, le plus souvent, elles s'inscrivent dans des démarches d'aménagement au sein desquelles la réalisation de logements sociaux n'est pas l'une des priorités de leur politique urbaine.
Pourtant, chacun sait qu'au travers d'une politique judicieuse de préemption, de préservation du parc social privé de fait ou de droit, d'acquisition-amélioration, il existe de nombreuses et multiples possibilités pour répondre aux prétendues contraintes établies par le code de la construction et de l'habitation.
Il est donc essentiel, à notre avis, que la problématique de la réalisation du logement social soit résolue dans les meilleures conditions.
Notre amendement vise, en fait, à revenir à la rédaction de l'article 55 de la loi SRU, moyennant quelques aménagements, le principal d'entre eux consistant à accroître sensiblement la pénalité exigée des communes qui ne respectent pas les principes édictés dans cet article.
On se souviendra que le produit du prélèvement institué aux termes de l'article 55 vient renforcer les moyens des établissements publics fonciers locaux. Cela signifie que l'augmentation du prélèvement que l'on pourra constater répond aux exigences de financement des politiques foncières des collectivités locales.
Nous sommes donc là au coeur du débat, puisqu'il s'agit bel et bien de dégager les moyens d'une véritable politique foncière permettant de faire face à l'application de la loi.
Sous le bénéfice de ces observations, nous ne pouvons que vous inviter, mes chers collègues, à adopter cet amendement.