Messieurs Bourquin et Dominati, madame Chain-Larché, nous aurons en séance publique un débat sur la privatisation d'ADP, que vous avez qualifié d'actif stratégique. Mais en quoi l'État valorise-t-il l'entreprise ? Quel est son intérêt d'en posséder la majorité et de la conserver ? Je vous accorde que, d'un point de vue stratégique, ADP représente la clé d'entrée aérienne sur le territoire national. Néanmoins, rien ne changera en matière de contrôle aux frontières, de sécurité ou de rotations, dont les modalités seront inscrites dans le cahier des charges et mises en oeuvre sous le contrôle de l'État.
Depuis 2005, l'État possède 56,6 % de l'entreprise, le solde appartenant à des agents privés - flottants ou grands investisseurs à l'instar de Vinci - qui disposent d'un droit de jouissance illimité sur les infrastructures. Si nous avions opté pour une privatisation sèche, un article de loi aurait suffi. J'ai refusé cette solution, que ne n'ai pas même présentée au Président de la République, car je ne souhaite pas qu'un acteur privé possède un droit de jouissance illimité. Nous prévoyons, en conséquence, une concession d'une durée de soixante-dix ans, à l'issue de laquelle les actifs seront rétrocédés à l'État. Vous pourriez vous interroger sur les garanties offertes par un tel mécanisme, au regard du constat qui peut être objectivement dressé sur les sociétés d'autoroute. J'étais, à l'époque, directeur de cabinet du ministre concerné et je reconnais que cela fut une erreur de ne pas imposer de garanties. S'agissant d'ADP, une révision des tarifs aéroportuaires est prévue selon un rythme quinquennal, sous le contrôle de l'État. Nous imposerons également des obligations d'investissement sur les actifs - le projet du terminal 4 devra notamment être mené à son terme - afin qu'ils ne soient pas dépréciés à l'issue de la concession. Sur la demande des parlementaires, nous avons prévu que certaines collectivités territoriales pourront entrer au capital d'ADP et, ainsi, participer aux décisions. Je conçois que d'aucuns estiment trop élevés les tarifs autoroutiers, mais n'oublions pas que l'unique portion d'autoroute encore sous le contrôle de l'État se trouve en piteux état. L'État n'a plus les moyens d'entretenir de telles infrastructures aussi bien que les entreprises privées. Les activités relevant de la souveraineté nationale - police aux frontières, contrôle des personnes et des bagages - resteront sous la responsabilité de l'État.
Je ne crois pas pouvoir être qualifié de néo-libéral après avoir nationalisé STX et oeuvré pour sauver l'aciérie Ascoval. La logique du marché de l'acier ne plaidait pas pour une telle solution, mais les 285 salariés de l'entreprise, dont la compétence n'a pas de prix, méritaient que nous nous battions. J'ai agi à rebours de nombreuses recommandations et j'en suis fier. L'économie doit avoir un sens au-delà du compte de résultat, notamment dans les circonstances actuelles. Nous mettrons donc 25 millions d'euros d'argent public dans Ascoval ; je trouve cela légitime, ce qui me semble éloigné d'une posture néo-libérale.
Nous aurons, monsieur Gay, une discussion sur l'intéressement et la participation. À mon sens, la justice sociale réside d'abord dans le fait de disposer d'un emploi. Veillons, en agissant trop brutalement sur les rémunérations, à ne pas favoriser le chômage. L'intéressement et la participation permettent d'éviter un tel écueil, même si, il est vrai, ces rémunérations sont exemptes de cotisations. Le débat sur la justice des rémunérations, passionnant, ressort presque de la philosophie.
Monsieur Yung, les apprentis et les salariés en formation sont inclus dans le calcul des seuils à proportion du temps passé dans l'entreprise. J'estime, par ailleurs, que l'INPI sera en mesure de mettre en oeuvre l'examen que vous mentionnez d'ici deux ans. Enfin, madame Chain-Larché, le projet de loi ne modifie rien s'agissant des cessions d'entreprise et des obligations d'information.