ou chercher quelque chose de plus progressif, qui permette aux industriels de baisser les coûts au fur et à mesure des progrès réalisés ? Nous avons choisi cette seconde voie.
Je préférerais que l'on soit capable de séparer ce qui relève du développement d'une filière industrielle de ce qui relève des coûts de production. Je ne suis pas le ministre de l'industrie, mais j'ai parfois l'impression de l'être sur ce type de dossiers. Si l'on intègre les coûts de développement aux coûts de l'énergie, il faut accepter de payer son électricité plus chère. Or, c'est justement ce que les gens ne veulent pas !
Certains membres du Gouvernement ne souhaitaient pas aller plus loin sur l'éolien flottant tant que les prix n'ont pas baissé. Nous avons trouvé ce compromis qui nous permet d'avancer.
Monsieur Chevrollier, il est certain que le débat public sur la PPE n'a pas eu la visibilité qu'il méritait. Pour autant, et contrairement à ce que vous dites, ses conclusions ont été suivies. Les participants au débat ont validé la stratégie de rééquilibrage et de diversification. Il ne s'agit pas de sortir du nucléaire ni de s'enfoncer dans le tout nucléaire. Les conclusions du débat ont souligné l'importance du coût de l'électricité et de la mise en place d'une transition écologique et solidaire.
On ne peut, d'un côté, vouloir développer des technologies qui coûtent très cher et, de l'autre, disposer d'une énergie bon marché. À un moment donné, il faut trouver le bon équilibre. Nous avons évoqué le nucléaire, l'éolien et le solaire, mais il en va de même du biogaz : le coût de production du biogaz est aujourd'hui quatre fois supérieur à celui du gaz fossile importé. Dès lors, soit on interdit d'importer du gaz, soit on met en place une taxe carbone qui compense cette différence, aux alentours - je ne dois pas être loin de la vérité - de 200 euros la tonne - nous sommes aujourd'hui à 45 euros la tonne... Si l'on veut un gaz renouvelable compétitif sans augmenter les prix, le seul moyen est donc de baisser les coûts de production. Nous avons fixé des objectifs très ambitieux pour cette filière. Nous devrons faire un premier point d'ici à cinq ans pour savoir si nous nous inscrivons bien dans une trajectoire de baisse des coûts de production.
Se loger, se déplacer, se chauffer sont des enjeux qui seront au coeur du grand débat à venir. Si certaines personnes sont opposées à la transition écologique que nous mettons en place, ce sera le moment de le dire. Il ne s'agit pas de refaire le débat sur la PPE, mais de trouver des solutions au plus près du terrain sur ces trois grands enjeux.
Madame Morhet-Richaud, nous voulons que les collectivités locales jouent un rôle plus important. Mais les décisions nationales permettent de mettre en place une stratégie commune et d'éviter que chacun fasse sa politique énergétique dans son coin. Elles permettent aussi l'existence de tarifs d'achat garantis.
Si certaines collectivités veulent développer des projets autofinancés, je n'y vois aucun inconvénient. Si l'administration peut être parfois tatillonne sur certains sujets environnementaux - j'en suis bien conscient -, je veux bien travailler à lever ces difficultés avec les élus locaux et les filières concernées. Mais sachez qu'il y aura des mécontents. Sébastien Lecornu avait mené un travail sur l'éolien terrestre. Une des premières choses que j'ai faite en arrivant a été de signer un décret de simplification des procédures sur l'éolien : sur les réseaux sociaux ou dans les journaux, on m'a immédiatement cloué au pilori. On m'a accusé de vouloir construire des éoliennes dans le dos des gens en empêchant les recours... À chaque fois, on fait des heureux d'un côté et des mécontents de l'autre. J'assume mes décisions : si je peux permettre de lever des interdictions trop tatillonnes, je le ferai, mais sachez bien qu'il y aura des conséquences.
J'en reparlerai avec M. Laurent, mais le projet éolien offshore de l'île d'Oléron se situe en plein coeur d'un parc naturel. Il n'a pas semblé qu'il s'agissait de l'endroit idéal pour installer des éoliennes, qui plus est pour un coût assez élevé. Sachez que je suis tout à fait favorable au développement de l'éolien offshore, mais encore faut-il que les projets soient acceptables en termes environnementaux et en termes de coût.
Pour l'hydrogène, nous avons fixé les priorités, aussi bien pour l'hydrogène industriel que pour celui utilisé dans les transports lourds. L'hydrogène industriel est de l'hydrogène sale, émetteur de CO2 puisqu'il provient du craquage du méthane. L'objectif fixé à la filière hydrogène est de développer l'hydrogène par électrolyse de l'eau, qui pour l'instant coûte deux fois plus cher. Pour pénaliser les émissions de CO2, il n'y a pas trente-six solutions : on le fait soit par la taxe carbone, soit en instaurant des quotas carbone ou des droits d'émission, soit en fixant des normes, ce qui est une autre façon d'augmenter le coût. Concernant le train à hydrogène, le démonstrateur en Allemagne que vous évoquez est produit par un constructeur français. Nous travaillons à un appel d'offres commun à plusieurs régions pour commander de tels trains, qui pourraient être une alternative à l'électrification des lignes.
Le taux de recours au chèque énergie est de 85 %, ce qui est très élevé pour une prestation sociale. Nous allons encore augmenter le nombre de bénéficiaires et nous travaillons sur les effets pervers dont vous avez parlé : un décret que j'ai signé doit encore être cosigné par un autre ministre.
Nous nous efforçons d'équilibrer investissements privés et subventions publiques, sachant que, souvent, il est difficile de prévoir le niveau nécessaire puisqu'il est lié au prix de marché de l'électricité. Plus ce prix baisse, plus cela coûte à l'État, qui comble la différence.
Soutenir la diversification du mix électrique ne veut pas dire qu'on ne défend pas la filière nucléaire. On entend même souvent que cette PPE poursuit le nucléaire au lieu d'en amorcer la sortie. C'est le propre, sans doute, des politiques équilibrées : certains trouvent qu'on n'en fait pas assez pour le nucléaire, d'autres trouvent qu'on en fait trop.
Je suis allé à la COP 24 de Katowice. Un stand très important y vantait les mérites du charbon, ce qui se comprend au coeur de la Silésie... Ne croyez pas, cela dit, que la Pologne ne fait pas d'efforts pour réduire sa consommation de charbon. Elle a présenté un plan pour développer le nucléaire. Mais, comme en Inde, comme dans d'autres pays du monde qui ont du charbon, la Pologne continue à l'exploiter. Ils ne vont pas jusqu'à parler, comme le président Trump, de charbon propre, qui n'existe pas. En tous les cas, ces pays devront décider si, pour sortir du charbon, ils voudront faire du nucléaire ou plus d'énergie renouvelable.