S'agissant des tarifs réglementés, ceux de l'électricité sont maintenus ; ils ne sont pas remis en cause au niveau européen.
Pour autant, l'existence de tarifs réglementés ne signifie pas que les tarifs n'augmentent pas ou n'augmentent pas plus que l'inflation. Quand on parle de tarifs réglementés, beaucoup de nos concitoyens comprennent qu'il s'agit de tarifs fixés par l'autorité politique dans sa grande sagesse, un peu comme les tarifs de l'eau décidés par la collectivité territoriale qui assure l'alimentation en eau potable ou ceux des transports établis par l'autorité organisatrice compétente. En l'espèce, c'est la CRE qui fixe la formule de calcul et le prix de l'électricité, que le ministre approuve in fine. Si l'on décide autre chose - et l'une de mes prédécesseurs a essayé de le faire -, les recours sont immédiats et ledit ministre est assuré de perdre, avec un rattrapage de la hausse non appliquée. Je suis, pour ma part, convaincu qu'il convient de s'interroger sur le maintien d'un dispositif aberrant qui place le ministre compétent entre le marteau et l'enclume et qui revient à faire une fausse promesse aux Français, celle que les tarifs n'augmenteront jamais. Leur évolution, selon la formule appliquée par la CRE, dépend des coûts de production qui, hélas, ont tendance à croître. C'est d'ailleurs tout l'objet de la formule : s'assurer que les tarifs reflètent l'évolution des coûts, à la hausse comme à la baisse. Si on ne le fait, à un moment donné, ça se paie. Nous avons un devoir de transparence vis-à-vis de nos concitoyens et d'action en faveur d'une diminution des coûts de production de l'électricité. Car c'est la seule façon pour faire en sorte que les prix payés par les consommateurs n'augmentent pas trop.
Quant aux tarifs réglementés du gaz, c'est encore pire puisque le tarif évolue chaque mois, en fonction de l'évolution des marchés sur lesquels la France se fournit pour 99 % de sa consommation. Les offres de marché sont par ailleurs inférieures aux tarifs réglementés. Ceci nous a conduit à proposer la suppression des tarifs réglementés car ne faisons pas la fausse promesse d'un tarif qui serait à l'abri de l'évolution des marchés, même s'il existe des systèmes compliqués de couverture des risques sur les marchés mondiaux pour stabiliser les prix sur plusieurs mois - c'est d'ailleurs ce que nous avons demandé à Engie.
Pour ce qui concerne le service public de la performance énergétique évoqué par Joël Bigot, la difficulté réside dans le souhait exprimé par les régions, à l'occasion de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, de disposer de la compétence. Or, dès lors qu'il s'agit de l'exercer, on s'aperçoit que ça a un coûté et qu'il faut trouver des financements. J'ai rencontré l'Assemblée des régions de France, nous y travaillons avec l'Ademe, notamment au travers des CEE. Je suis, pour ma part, favorable à la mobilisation des collectivités territoriales, qui déjà prennent de nombreuses initiatives.
Monsieur Montaugé a évoqué la mesure et le suivi des objectifs. Je crains à cet égard la dictature de l'immédiateté, alors que les sujets ressortent davantage de trajectoires à moyen et long terme. Les parlementaires pourraient jouer un rôle en matière de suivi avec plus de recul que les habituelles polémiques médiatiques.
S'agissant de la restructuration d'EDF, plutôt que de décider seuls, nous avons demandé à l'entreprise de nous transmettre des propositions. À titre personnel, plusieurs options paraissent envisageables : le statu quo, malgré le taux d'endettement élevé et le questionnement sur le fait de placer le nucléaire dans une société cotée ; la création, massivement rejetée par les syndicats et sans doute par le management, de sociétés spécialisées, des sociétés soeurs en quelque sorte avec une holding de tête ; et une sorte de solution intermédiaire, avec une société mère et une société fille. Mais il n'y a pas de solution miracle : aucune, en particulier, n'effacerait l'endettement de l'entreprise ni ne coûterait rien, d'autant que la Commission européenne veillera évidemment à ce que nous ne lui versions pas d'aides d'État déguisées. En tous les cas, rien n'est décidé à ce stade.
Monsieur Gontard, sur l'enjeu climatique, qui sous-tend la PPE, il existe en France un consensus pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Mais dès qu'il est question des solutions à apporter, les avis divergent et c'est plutôt la levée de bouclier contre toute mesure proposée. On nous a expliqué ces dernières semaines que la taxe carbone n'était pas la bonne solution, une de mes prédécesseurs a même fait toute une campagne médiatique pour dire qu'il s'agissait d'écologie punitive, l'expression s'est désormais bien imposée mais je rappelle quelques chiffres, car derrière les symboles - même si ça compte - il y a la réalité : la hausse de la taxe carbone, en 2019, c'était trois centimes d'euros sur le litre d'essence, presque sept centimes sur le diesel en 2019 si l'on ajoutait le rattrapage et un prix stable pour le gaz contre une baisse de 2 % sans cette hausse, pour une recette de deux milliards d'euros que nous peinerons à remplacer... Je ne serai pas de ceux qui prôneraient de le récupérer sur l'impôt sur le revenu ou sur un autre impôt. J'entends ceux qui évoquent le rétablissement de l'ISF, soit 3,5 milliards, mais ces 3,5 milliards ne serviront pas dix fois !