Vous avez parfaitement raison de distinguer entre la taxe foncière et l'impôt sur les sociétés. D'abord, ce ne sont pas les mêmes bénéficiaires : l'un va dans les caisses de l'État, l'autre dans celles des collectivités territoriales. Autre différence : dans la plupart des cas, la taxe foncière peut être refacturée aux entreprises privées qui occupent le domaine - ce qui peut avoir un impact direct sur leur compétitivité, voire leur viabilité. L'impôt sur les sociétés dépend en effet du résultat, et donc de la stratégie d'investissement. D'ailleurs, la principale disposition envisagée pour faciliter l'adaptation est d'autoriser l'adoption d'un nouveau bilan d'ouverture qui permet de réévaluer certains actifs et donc d'augmenter les amortissements, ce qui réduit la base de calcul de l'impôt sur les sociétés.
En matière de ferroviaire, l'infrastructure est une chose, mais elle ne résume pas à elle seule nos difficultés. Il y aussi le problème de l'accès au réseau et de l'attribution des sillons pour les activités de fret ferroviaire, pour lesquelles le besoin s'exprime plus tardivement que pour les transports de passagers - les marchandises ne votent pas ! Et, tant que le train est plus cher que le camion, c'est le camion qui sera utilisé. Cela renvoie à la question des aides publiques et de la tarification du réseau ferroviaire en France. Si nous ne sommes pas compétitifs, il faut investir de l'argent public pour prendre en compte les externalités : les trains polluent moins.
Oui, la compétitivité d'une place portuaire dépend de la bonne entente entre l'ensemble des acteurs privés et publics. Il y faut une alchimie, dans ce partenariat à la fois horizontal et vertical. L'autorité portuaire publique fournit des infrastructures. Le navire a besoin de quais bien construits, il a besoin d'un pilote et d'un remorqueur, de manutentionnaires... C'est le partenariat horizontal entre autorités portuaires et acteurs privés. Évidemment, chacun de ces acteurs cherche à capter un maximum de la valeur créée par le passage portuaire. Il y a aussi un partenariat de nature verticale : une autorité portuaire, dépense de l'argent public, est chargée de défendre l'intérêt général, qui n'est pas la somme des intérêts particuliers. Une application très concrète de ces réflexions se trouve à l'article 35, avec la question du pouvoir de régulation de l'autorité portuaire sur les activités qui se tiennent sur le port : trop de régulation, c'est moins de compétitivité ; pas assez de régulation, c'est un défaut de portage des politiques publiques et un manque d'efficience.
La Cour des comptes comme l'Inspection des finances ont clairement dit que la loi était allée trop loin. Les ports n'étaient plus impliqués dans les opérations. Il fallait revenir vers plus de régulation, au bénéfice de l'intérêt général, tout en veillant à ne pas casser la compétitivité. C'est un peu la quadrature du cercle ! Nos règles de gestion du domaine public ne sont pas très souples. Il y a deux cas possibles : une simple occupation temporaire du domaine, avec un bail semblable au secteur privé, et un occupant qui fait ce qu'il veut ; ou un régime de concession, qui répond à la nécessité de réguler une activité qui s'exerce dans un espace contraint.
Avant que la directive « Concessions » ne soit transposée en droit français, le code des transports prévoyait des conventions d'exploitation de terminal. Depuis 2008, elles s'intitulent : conventions de terminal. Ces conventions traitent de l'occupation du domaine mais aussi du contrôle sur la façon de faire. La France a transposé la directive dans la seule dimension concession de service public, alors que le droit européen estimait que la concession pouvait viser le service public, mais aussi les travaux. C'est ce que nous avions voulu faire avec les conventions d'exploitation de terminal, à savoir de la régulation modérée.
L'article 35 fait consensus entre l'Union des ports de France et l'Union des industries de la manutention et il a été rédigé - avec difficulté - par le ministère des transports. Il en est résulté que la convention de terminal pourra être une simple occupation du domaine ou une concession de services. Si la première solution est retenue, il sera possible d'inclure des réductions de redevance domaniale en fonction du trafic et d'envisager la répartition des biens en fin de convention, comme cela se passe pour les concessions. Si la voie de la concession de services est retenue, les contraintes pourront être allégées, notamment en ce qui concerne le contrôle des tarifs et la transparence des données financières des entreprises.
Il existe une sorte de continuité entre les conventions d'occupation renforcées et les concessions allégées. Chaque cas précis pourra donc trouver la meilleure solution possible.