Les richesses produites dans notre pays sont gigantesques. Pourtant, elles ne profitent qu’à une extrême minorité : les actionnaires du CAC 40.
Le Gouvernement a refusé de s’y attaquer. Il a préféré les pseudo-solutions que sont la défiscalisation des heures supplémentaires, la fausse hausse du SMIC, financée par les contribuables, la prime exceptionnelle sans impôt ni contribution jusqu’à 1 000 euros et le rétablissement du taux de CSG antérieur en 2019.
La majorité des groupes du Sénat était opposée à la hausse de la CSG infligée aux retraités modestes. Mais il aura fallu attendre le 10 décembre dernier pour que le Président de la République reconnaisse lui-même que la mesure était injuste ; et la prise de conscience de M. Macron est restée bien relative, puisque la hausse de la CSG est simplement annulée pour une partie des retraités, et uniquement pour 2019 !
La droite sénatoriale avait fait voter le recul de l’âge de départ à la retraite pour compenser cette hausse. Notre groupe, lui, s’y était opposé. Il avait fait d’autres propositions de financement, notamment en mettant à contribution les revenus financiers des grandes entreprises.
Pour ce qui concerne le SMIC, les annonces qui ont été faites sont une véritable escroquerie. Le Gouvernement a finalement décidé d’augmenter la prime d’activité de 90 euros. Cette mesure a été présentée comme une hausse de salaire par le Président de la République. Mais, alors qu’une hausse du SMIC bénéficierait à tous les salariés, la prime d’activité concerne seulement les salariés gagnant moins de 1 500 euros nets par mois, pour une personne seule, et 2 200 euros nets, pour un couple.
En outre, afin d’en bénéficier, il faudra se rendre dans les agences de la CAF pour accomplir diverses démarches et réactualiser sa situation tous les trois mois !
Enfin, cette prime est limitée, puisqu’elle ne concernera pas les fonctionnaires. Or 40 % d’agents publics sont au niveau du SMIC ; dans la fonction publique territoriale, ce taux approche même les 75 %.
La défiscalisation et la désocialisation des heures supplémentaires, présentées comme un gain annuel de 155 euros, constituent, elles aussi, un leurre. En réalité, en incitant les salariées et les salariés à effectuer plus d’heures supplémentaires, l’on provoquera une augmentation de la durée du temps de travail au détriment de l’emploi. L’Observatoire français des conjonctures économiques, l’OFCE, estime ainsi que 19 000 emplois seront supprimés d’ici à 2020, et que le taux de chômage s’en trouvera augmenté de 0, 1 point.
En outre, madame la ministre des solidarités et de la santé, comment cette mesure va-t-elle bénéficier aux personnels soignants et non soignants des hôpitaux et des EHPAD, alors qu’ils voient leurs heures supplémentaires exploser sans contrepartie financière et sans possibilité de récupération ?
J’ajoute que vous taisez un point essentiel : les heures supplémentaires désocialisées et défiscalisées en vertu de la dernière loi de financement de la sécurité sociale et de ces mesures d’urgence vont mettre en péril les recettes de la sécurité sociale et de notre système de retraites.
Je le disais déjà lors du débat consacré au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, et je persiste : « En utilisant le budget de la sécurité sociale pour réduire le déficit de l’État, votre gouvernement se livre au plus grand hold-up du siècle. » Vous pourrez utiliser à loisir les ressources de la sécurité sociale, payées par les assurés sociaux, pour renflouer les caisses de l’État.
Enfin, il est regrettable que la prime exceptionnelle ne soit pas une obligation pour les grandes entreprises qui réalisent des profits colossaux.
Mesdames, monsieur les ministres, ces mesures ne font pas le compte. Les femmes en sont particulièrement exclues ; or elles sont souvent parmi les plus précaires.
Les Françaises et les Français ne sont pas dupes. Malgré l’écran de fumée que vous répandez afin de masquer vos choix profondément inégalitaires, ils voient bien que les plus fortunés ont droit à toutes vos largesses.
Vos largesses, ce sont 40 milliards d’euros pour les grandes entreprises et les actionnaires, sans aucune contrepartie, via le remboursement du CICE pour l’année 2018 et la baisse des cotisations patronales, voire leur suppression, décidée pour 2019 ; il s’agit là d’une mesure inique adoptée, ici même, avec la droite sénatoriale.
Vos largesses, c’est aussi le maintien de la suppression de l’ISF, soit 4, 2 milliards d’euros offerts au détriment d’une politique de justice sociale pour toutes et tous.
D’un côté, de somptueux cadeaux de Noël ; de l’autre, des miettes : mais la brèche est ouverte, car vous venez de démontrer que la sacro-sainte loi des 3 % de déficit du pacte de stabilité et de croissance de l’Union européenne n’est pas indépassable. La prise de conscience gagne du terrain : c’est une bonne nouvelle, et vos premiers reculs en appellent d’autres. L’argent existe pour répondre aux besoins des populations, non pour être détourné vers la finance, au détriment de l’humain et de notre planète !