Intervention de Muriel Pénicaud

Réunion du 21 décembre 2018 à 16h00
Mesures d'urgence économiques et sociales — Article additionnel après l'article 3

Muriel Pénicaud :

Je partage l’avis de M. le rapporteur sur la forme.

Sur le fond, le décret de revalorisation du SMIC a été adopté en conseil des ministres le 19 décembre dernier. Au 1er janvier 2019, le SMIC sera bien augmenté de 1, 5 %, conformément aux règles de calcul automatiques prévues par le code du travail. Le SMIC horaire s’établira à 10, 03 euros bruts, soit 1 521, 22 euros par mois ; quant au SMIC mensuel net, il sera de 1 204 euros – c’est le chiffre qui intéresse le plus les gens, puisque c’est leur pouvoir d’achat.

Une fois établi le nouveau barème du SMIC, qui concerne directement 1, 6 million de salariés du secteur privé, il se produit un effet de diffusion sur 11 millions de salariés, sur les 19 millions de personnes qui travaillent dans le secteur privé. Cette diffusion s’effectue par le biais des conventions collectives.

J’ai interpellé les branches professionnelles pour leur demander d’accélérer au début de 2019 les négociations annuelles de branche. Le patronat s’est engagé à mener en 2019 des négociations dans toutes les branches où le minimum professionnel est aujourd’hui inférieur au SMIC, ce qui crée un tassement pour de nombreuses rémunérations autour du SMIC. Celui-ci n’est donc que l’un des aspects du sujet de la rémunération dans le secteur privé ; les négociations annuelles obligatoires et les conventions de branche en sont l’aspect principal.

Cela dit, je veux revenir sur le fond de votre question, monsieur le sénateur. Si l’on veut lutter contre le chômage, ce qui me semble être notre objectif à tous, il faut de la croissance pour créer des emplois ; or il faut pour ce faire que les entreprises soient compétitives. Vous proposez que l’on augmente extrêmement fortement et rapidement le SMIC, qui est déjà le plus élevé d’Europe et qui a l’évolution la plus dynamique. Si l’on agissait ainsi, même pour les emplois non délocalisables, très clairement, le prix d’un certain nombre de produits et de services augmenterait très rapidement et bien des employeurs, notamment parmi les artisans et les commerçants – les petites et moyennes entreprises, plus largement –, ne seraient pas en mesure de suivre et devraient licencier des employés. Tout cela est très bien documenté par l’expérience pratique et du point de vue économique.

Nos propositions contenues dans ce texte découlent du fait que nous reconnaissons tous qu’un sujet s’impose : la capacité, pour les travailleurs les plus modestes, de vivre décemment de leur travail dans notre pays. Il faut donc, d’une part, faire progresser le SMIC dans sa dynamique habituelle, avec toutes les conséquences que cela entraîne dans les diverses branches, et, d’autre part, par le biais de la prime d’activité, dispositif français original et important, augmenter les revenus des personnes qui, alors même qu’elles travaillent, rencontrent des difficultés financières. Cette articulation du salaire versé par l’entreprise et d’une forme de solidarité permet l’augmentation des revenus des travailleurs modestes, ce qui est essentiel.

La prime d’activité, dont nous augmentons le barème et élargissons la portée, pourra être versée jusqu’à 2 000 euros de salaire dans le cas d’une personne vivant seule avec un enfant et n’ayant pour vivre que son salaire. Pour une personne vivant seule sans enfant, elle sera versée jusqu’à 1 550 euros de salaire. Nous sommes donc bien en train de prendre, ensemble, une mesure allant dans le sens que vous souhaitez. J’espère donc que vous la voterez.

L’avis du Gouvernement sur cet amendement est défavorable.

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