Intervention de Alain Fouché

Réunion du 15 janvier 2019 à 14h30
Gouvernance des grands groupes coopératifs agricoles — Débat organisé à la demande du groupe union centriste

Photo de Alain FouchéAlain Fouché :

Les coopératives agricoles sont, en effet, un pilier de l’agriculture française : trois agriculteurs sur quatre appartiennent à au moins une coopérative agricole.

Ces structures placent l’homme au centre de leur gouvernance ; elles agissent au cœur des filières agricoles, mais aussi alimentaires, et contribuent à leur structuration et à leurs mutations profondes. Comme l’a montré le congrès de Coop de France qui s’est tenu le 19 décembre dernier, les agriculteurs y sont très attachés et le considèrent comme un modèle pertinent. Ainsi, quelque 77 % des adhérents considèrent que le modèle coopératif répond aux défis de demain.

Sur les territoires, ce sont des acteurs incontournables de l’emploi et de la formation. Elles participent à l’innovation agricole, à la valorisation des produits, à l’économie rurale et au rayonnement de la France à l’international. Quelque 2 600 coopératives génèrent un chiffre d’affaires de plus de 85 milliards d’euros par an, soit 40 % de l’agroalimentaire français.

En Europe, on compte plus de 51 000 coopératives agricoles, soit 9, 5 millions de producteurs et 675 000 salariés, dans toutes les filières alimentaires. Elles sont donc aussi un pilier de l’économie française et européenne.

Le particularisme des coopératives fait qu’elles sont gouvernées d’une manière démocratique. Principes démocratiques, proximité et dépendance réciproque ont pendant longtemps été les piliers de la gouvernance des coopératives. Ils ont permis de maintenir un engagement fort des agriculteurs.

Cependant, au-delà de ce tableau idyllique se cachent des évolutions qui peuvent entraîner certains problèmes de gouvernance. Deux transformations mettent aujourd’hui en tension les piliers de cette gouvernance : l’agrandissement de leur base territoriale et la complexification des enjeux, avec une diversification et une internationalisation des activités industrielles et commerciales portées par les coopératives.

Elles se sont, pour la plupart, développées dans un environnement marqué par les quotas et les prix garantis. Avec la fin de ces derniers, les coopératives agricoles ont dû s’adapter pour entrer de plain-pied dans la compétitivité. Elles ont souvent fait le choix de la diversification au travers de la création de filiales et l’internationalisation des activités, une adaptation nécessaire pour affronter la concurrence sur des marchés mondialisés, mais qui pose de nouveaux défis.

En effet, le lien entre les coopérateurs et leur coopérative s’est distendu et, avec lui, les capacités d’orientation et de contrôle des agriculteurs et de leurs représentants se sont affaiblies. Ces derniers mois, des tensions sont apparues dans certaines grandes coopératives, où des membres demandent un renouvellement de leur gouvernance.

Les mesures prévues dans la loi ÉGALIM pour réformer les pratiques de gouvernance des coopératives agricoles arrivent donc au moment opportun pour que celles-ci continuent de jouer un rôle central dans l’agriculture et l’alimentation françaises. Nous serons bien sûr attentifs à ce que les spécificités de ce modèle soient préservées, tout en assurant une plus grande transparence et une plus grande responsabilité des instances dirigeantes, en fournissant plus d’informations aux agriculteurs et en promouvant davantage les bonnes pratiques. Les mesures doivent être réalistes pour être efficaces et applicables.

Des changements sont nécessaires pour que les coopératives françaises continuent à grandir et à se développer. Les ordonnances prévues d’ici au mois de mars 2019 peuvent apporter une partie des réponses pour que les coopératives fassent un saut qualitatif en matière de pratiques de gouvernance, mais c’est aujourd’hui surtout au mouvement coopératif de revisiter ses fondamentaux et de faire des propositions ambitieuses au Gouvernement pour projeter les agriculteurs et l’agriculture française dans les défis du XXIe siècle.

Monsieur le ministre, la modernisation de l’agriculture française, et plus largement européenne, ne pourra se faire sans les coopératives.

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