Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi, adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale, est d’effet limité. Toutefois, elle est porteuse d’améliorations concrètes pour certains de nos concitoyens âgés.
Dans le prolongement du décret d’octobre 2016, ce texte relève d’un objectif simple : apporter une réponse aux difficultés d’accès aux soins visuels de nos aînés, en prévoyant d’autoriser les opticiens à pratiquer des tests de réfraction et des adaptations de verres correcteurs ou de lentilles de contact dans les EHPAD, et non plus seulement en magasin. La mise en œuvre des dispositions de cette proposition de loi permettrait donc de limiter – un peu – les effets du nombre insuffisant d’ophtalmologistes et d’améliorer la santé visuelle des personnes dépendantes.
L’accès aux soins visuels représente un défi démographique en France. Selon une étude publiée par des chercheurs de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM, et des universités de Bordeaux et de la Sorbonne, 40 % des personnes âgées de plus de soixante-dix-huit ans portent des lunettes non adaptées à leur vue. Cette proportion élevée s’explique tant par des difficultés financières que par une forme de fatalisme des personnes en perte d’autonomie à l’égard des troubles de la vision, lesquels s’aggravent naturellement avec l’âge.
Une autre explication réside dans le développement des zones à faible présence médicale et dans la réduction du nombre d’ophtalmologistes au cours de ces dernières années : selon les estimations de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, la DREES, celui-ci a diminué de 5, 7 % entre 2007 et 2017. Le délai d’attente pour une consultation chez un ophtalmologiste est en moyenne de quatre-vingts jours : c’est un record, toutes spécialités médicales confondues. De plus, la Cour des comptes prévoit une chute de 20 % de la densité des ophtalmologistes d’ici à 2030.
Or, comme les troubles de l’audition, une vue déficiente produit des effets néfastes sur la santé d’une personne âgée. Elle se répercute sur sa qualité de vie et sur son autonomie, induisant une marche hésitante, des risques de chute, une dégradation des échanges sociaux.
La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui remédie en partie à cette situation. La réalisation d’examens visuels dans les EHPAD épargnerait aux aidants ou au personnel soignant de devoir déplacer les personnes en perte d’autonomie vers des lieux éloignés en vue d’une consultation ou de soins.
Pour les opticiens, ce nouveau droit complète l’autorisation octroyée par le décret du 12 octobre 2016, qui leur permet d’adapter les prescriptions médicales des verres correcteurs et des lentilles de contact correctrices dans le cadre d’un renouvellement de délivrance et après réalisation d’un examen de la réfraction. Mais, dans le cadre réglementaire actuel, ces examens doivent être réalisés dans un espace adapté, afin de garantir de bonnes conditions d’isolement phonique et visuel, c’est-à-dire, dans la plupart des cas, dans un magasin d’optique-lunetterie.
Certes, la portée de cette proposition de loi est restreinte : elle ne s’inscrit pas dans une vision globale de réorganisation de la filière visuelle ; elle n’apporte pas non plus de solutions aux problèmes structurels d’accès aux soins visuels sur l’ensemble du territoire. Néanmoins, les membres du groupe socialiste et républicain partagent le diagnostic établi et les propositions formulées, malgré les restrictions apportées par nos collègues députés. Nous soutenons donc l’adoption conforme du présent texte.