Intervention de Jocelyne Guidez

Réunion du 23 janvier 2019 à 14h30
Santé visuelle des personnes âgées en perte d'autonomie — Vote sur l'ensemble

Photo de Jocelyne GuidezJocelyne Guidez :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les familles françaises font de plus en plus le choix du maintien de leurs aînés le plus longtemps possible au domicile. Nos aïeux entrent de plus en plus tardivement en EHPAD et la durée de leur séjour diminue.

Ainsi, c’est souvent dans une situation de santé dégradée que le placement est décidé. Au regard de ce défi toujours plus grand pour les EHPAD, il convient d’assouplir notre droit. Les améliorations que nous pouvons apporter permettront d’améliorer la qualité de vie de nos parents. Une attention toute particulière doit être portée aux fonctions cognitives, car leur détérioration favorise l’exclusion et entraîne d’importantes conséquences psychologiques.

Si l’on œuvre dans ce sens, la personne est gagnante et la qualité de vie dans l’EHPAD s’en ressent. C’est pourquoi je tiens à saluer le travail de notre collègue députée Mme Firmin Le Bodo, auteur de cette proposition de loi. Je remercie également Mme Élisabeth Doineau de son excellent rapport. Ce dernier témoigne d’une certaine frustration, partagée par les membres du groupe Union Centriste.

Cette proposition de loi vise à permettre aux opticiens-lunetiers d’intervenir dans les EHPAD pour procéder à des tests de réfraction. Un tel assouplissement de nos règles juridiques va dans le bon sens. Toutefois, cette amélioration ne vide pas le sujet de la santé en EHPAD : nous pourrions également parler de la prévention de la dégradation de l’ensemble des fonctions cognitives, de la santé bucco-dentaire ou du manque de moyens dont souffrent ces structures.

De plus, la majorité La République En Marche de l’Assemblée nationale a souhaité transformer ce texte pour en faire une simple expérimentation ; je le regrette.

Mes chers collègues, permettez-moi de mettre des mots sur les conséquences humaines et sanitaires de cette expérimentation, dont nous connaissons tous les enjeux.

Le dispositif de la proposition de loi initiale aurait permis, dès l’adoption du texte, que toutes les personnes placées en EHPAD puissent bénéficier de tests de la réfraction sans devoir se déplacer chez un opticien-lunetier.

J’ai déjà rappelé dans quel état de santé se trouvent en général les pensionnaires des EHPAD : leurs capacités de déplacement sont fortement réduites, voire annulées purement et simplement. La décision des députés de ramener ce dispositif à une simple expérimentation empêchera mécaniquement la majorité de nos anciens de bénéficier de cette avancée. La nécessité d’une autorisation de l’ARS complexifie davantage encore la démarche.

Si nous soutenons habituellement le recours aux expérimentations, nous ne pouvons, en l’espèce, que nous en alarmer. En effet, faute de présentation d’un texte de loi portant sur le sujet dans un avenir proche, l’expérimentation a pour objet d’évaluer ce dispositif, dans une certaine mesure, et de l’adapter avant sa généralisation. Or le Gouvernement n’a de cesse de nous rappeler qu’il travaille aujourd’hui à un grand texte sur la dépendance : la rédaction de ce projet de loi, la remise de l’avis du Conseil d’État, puis la navette parlementaire auraient constitué autant de moments opportuns pour adapter le dispositif que nous aurions pu adopter dès aujourd’hui.

La modification de la proposition de loi initiale prive donc de nombreuses personnes d’une amélioration importante de leur qualité de vie. Je regrette que l’exécutif n’ait pas opté pour une démarche d’amélioration continue, rendue possible par l’agenda du Gouvernement, plutôt que pour le recours à une expérimentation nécessairement inégalitaire entre les territoires. Pour tous les sujets relevant de la dépendance, il pourrait être opportun d’envisager l’adoption des mesures figurant à l’agenda du Parlement, afin que les retours d’expérience viennent abonder la rédaction du futur projet de loi pour améliorer, in fine, sa portée et sa justesse.

Parler de la santé de nos anciens, de leur qualité de vie en EHPAD, de l’accompagnement que nous pouvons leur offrir, c’est parler de notre propre avenir ; c’est parler en fait de notre société et de la solidarité intergénérationnelle que nous souhaitons.

Au sein du groupe Union Centriste, nous sommes convaincus qu’il y a urgence et que nous devons dès à présent mettre en place toutes les mesures nécessaires en la matière. C’est pourquoi, en dépit des observations de notre collègue rapporteur que nous partageons, nous voterons ce texte au dispositif limité par les amendements adoptés par l’Assemblée nationale.

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