Intervention de Jean Bizet

Commission des affaires européennes — Réunion du 24 janvier 2019 à 8h35
Économie finances et fiscalité — Fusion alstom et siemens mobility : communication et avis politique de m. jean bizet

Photo de Jean BizetJean Bizet, président :

Je note la convergence de vos avis et propositions. Cet avis s'adresse à la Commission européenne. On ne peut y faire figurer les recommandations concernant les stratégies de l'entreprise.

Je suis d'accord avec les modifications proposées par nos collègues sur les articles 12 et 13. Tant que les traités ne seront pas modifiés, il faudra imaginer des approches différentes. Le concept du GIE et celui du pacte d'actionnaires peuvent être creusés. Il ne faudrait pas que la fusion se transforme en absorption. M. Danesi le disait avec humour : « on aurait bien voulu, mais on n'a pas pu ».

S'agissant du point 14, on nous dit à juste titre que l'Union européenne est ouverte. Elle n'est pas protectionniste. Pour autant, elle n'est pas non plus offerte. Le député européen Franck Proust s'est spécialisé sur les investissements directs étrangers, qu'il aime à nommer « investissements directs étrangers », à juste titre quand il s'agit de la Chine... L'Europe doit se réveiller. Le président du Sénat a demandé une date précise pour délibérer sur le Comprehensive economic and trade agreement (CETA) entre l'Union européenne et le Canada. Une proposition sera faite avant la fin de la session de juin. Les crispations sur les accords de libre-échange, quelle qu'en soit la nature, sont déjà d'actualité. Le projet d'un mini-traité TTIP excluant totalement les questions agricoles donne lieu à réflexion entre Washington et Bruxelles. Les États-Unis veulent qu'elles y soient intégrées, ce qui accentue les tensions. À la veille d'une nouvelle réforme de la PAC, prenons garde à ne pas nous laisser faire une deuxième fois par les Américains. Ils avaient très bien su tirer parti de la réforme précédente en nous obligeant à revoter dans le cadre de l'OMC, une fois que nous avions découvert nos cartes. Quant à la politique industrielle de l'Union européenne, elle est essentielle. Encore faut-il cependant que nous ayons une politique nationale digne de ce nom.

Les modifications de nos collègues sur les articles 12 et 13 sont tout à fait pertinentes. Cet avis politique ne manquera pas d'intéresser Bruno Le Maire. Ce sera notre petite pierre à l'édifice.

À l'issue de ce débat, la commission a adopté, à l'unanimité, l'avis politique suivant, qui sera adressé à la Commission européenne :

(1) Vu l'article 103 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,

(2) Vu le règlement n° 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 sur les concentrations,

(3) Vu la décision d'engagement de procédure - Affaire M.8677 - Siemens/Alstom du 13 juillet 2018 ((2018/C 270/01),

(4) La commission des affaires européennes du Sénat :

(5) Relevant la nécessité pour l'économie européenne de se doter d'entreprises capables de faire face à la concurrence des conglomérats issus des pays tiers,

(6) Estimant que la fusion entre Alstom et Siemens mobility doit permettre aux deux entreprises de rivaliser avec leurs concurrents, tant sur le marché européen qu'au niveau mondial, sous certaines conditions, notamment sociales, qu'il appartient aux gouvernements et aux parlements allemands et français de mettre en oeuvre,

(7) Considérant que la politique de la concurrence ne saurait être orientée vers la seule préservation des droits des consommateurs mais également être au service d'une véritable politique industrielle menée au niveau de l'Union européenne afin de conforter sa puissance,

(8) Rappelant que la politique de la concurrence doit également aller de pair avec la préservation des intérêts stratégiques européens,

(9) Souhaite que la Commission européenne autorise la fusion d'Alstom et de Siemens mobility afin de faire de la nouvelle entité un champion industriel européen au niveau mondial ;

(10) Considère que dans le cadre de cette fusion, le marché pertinent retenu pour l'évaluation de son impact sur la concurrence ne saurait être apprécié au regard du seul marché européen mais bien du marché mondial, compte-tenu de la puissance de son principal rival ;

(11) Estime qu'au-delà de la fusion envisagée, la Commission européenne devrait oeuvrer au rapprochement de la plupart des entités de ce secteur d'activité, pour donner du sens au concept d'« Airbus du rail » et rendre concrète l'ambition industrielle européenne ;

(12) Demande que cette fusion soit accompagnée de la mise en oeuvre d'appels d'offres préférentiels pour les entreprises européennes (Buy European act), en particulier dans les domaines couverts par le Mécanisme d'interconnexion pour l'Europe (MIE), à l'image de ce que des pays tiers, très présents dans ces secteurs, ont su instituer ;

(13) Demande que la fusion ne soit pas conditionnée à la cession par Alstom et Siemens mobility d'un certain nombre d'activités connexes, au risque de fragiliser certains sites industriels européens et de favoriser leur délocalisation ;

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