Intervention de Bruno Sido

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 13 décembre 2018 à 9h40
Examen de la note scientifique sur les lanceurs spatiaux réutilisables jean-luc fugit député rapporteur

Photo de Bruno SidoBruno Sido, sénateur :

Au fond, Yannick d'Escatha, président du CNES jusqu'en 2013, avait raison Pour Ariane 6, il voulait, je l'ai compris par la suite, éluder le problème de la récupération, en disant que le 1er étage d'Ariane 6 devait être construit avec un moteur à poudre. Et il ajoutait que jamais un lancement n'avait raté à cause de la poudre, que c'était beaucoup moins cher, qu'il n'y avait rien à récupérer et qu'il fallait bien entendu développer un moteur réallumable. Il a été développé, sous le nom de Vinci. Mais on n'a pas imaginé qu'il soit à poussée modulable ! Donc on s'est complètement trompé sur Ariane 6.

La gouvernance est une autre vraie difficulté. On l'a écrit, il n'est pas possible que ça continue comme ça, avec une règle du retour géographique aussi précise. D'autant qu'in fine, cerise sur le gâteau, les Américains, qui sont loin d'être aussi libéraux qu'ils le disent, ont décidé que leurs lancements devaient respecter la préférence nationale, pour des motifs de secret défense. Et nous, les Européens, nous retenons en premier critère le coût, ce qui est ridicule. Il y a du souci à se faire, de mon point de vue, pour le programme européen. D'autant plus que, pour ce qui concerne la souveraineté, au fond, les Britanniques ont raison, on trouvera toujours un lanceur fiable pour lancer un satellite, sauf en cas de guerre. En revanche, en cas de guerre, nous ne pourrons rien lancer non plus de Kourou, parce qu'il faudra transporter nos fusées en Guyane en traversant l'océan, avec le risque d'une attaque par un sous-marin. Il faudrait développer notre centre spatial à Solenzara en Corse, mais on sait très bien que si on s'installe là, à la même latitude que les Russes dans le Kazakhstan, on perd 30 à 40 % de masse utile, pour la même puissance initiale de la fusée. On a eu une belle période avec Ariane 5, mais c'est maintenant devenu trop cher. Même si nous mobilisons à cet effet des cerveaux remarquables en France et en Europe, je crains que le président de Thales n'ait raison, et qu'il faille envisager de cesser ce programme, si l'on veut éviter un gâchis considérable.

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