Intervention de Béatrice Brugère

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 30 janvier 2019 à 10h30
Projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice et projet de loi organique relatif au renforcement de l'organisation des juridictions nouvelle lecture — Table ronde de représentants des avocats des magistrats et des fonctionnaires de greffe

Béatrice Brugère, secrétaire générale du syndicat Unité Magistrats :

Je vous remercie de nous donner la parole puisque nous n'avons pas participé à l'intersyndicale et à la déclaration liminaire, même si nous partageons une partie de ce qui a été dit. Nous vous transmettrons une note portant sur toutes les dispositions que nous avons critiquées, mais également en mentionnant tous les ajouts du Sénat que nous approuvons.

Ce qui nous inquiète, c'est la non-prise en compte de l'intelligence collective. On met souvent en avant la coproduction, mais en réalité, celui qui a le pouvoir le garde et n'entend pas le partager !

Il n'est pas anodin que le Sénat ait émis le désir de nous entendre. Nous vivons de façon assez nouvelle un blocage important avec de fortes manifestations dans les rues - je veux parler des gilets jaunes. La déconnexion est totale entre ce que les citoyens attendent et ce que le Gouvernement propose. La justice est absolument centrale dans la cohésion et la paix sociales. Dans cet environnement si particulier, légiférer prend une autre importance. Tremblez avant de changer la loi ! Il est essentiel de réfléchir à la production et à la qualité de la loi, car nous avons perdu trop de temps à faire de mauvaises lois, notamment en défaisant et refaisant, au gré des alternances, les réformes précédentes. Nous arrivons au bout d'un processus d'incohérence totale au civil comme au pénal.

Tout cela manque d'une vision cohérente. Les éléments de langage sont toujours les mêmes : une justice plus efficace, plus rapide, plus proche des citoyens, etc. Or cela ne fonctionne plus symboliquement dans ce pays. Ce projet, qui sera peut-être malheureusement voté, au moins en partie, sous sa forme actuelle, aura des conséquences extrêmement importantes. Comme le disaient très justement mes collègues, de toutes petites choses auront des effets énormes.

J'ajoute que notre syndicat a voulu participer jusqu'au bout à la négociation avec la Chancellerie. On peut se satisfaire de quelques avancées, mais elles sont minimes. Nous demandions depuis très longtemps l'organisation de chantiers de la justice et de la sécurité. Il faut faire toujours plus avec moins. Je vous renvoie à l'intéressant rapport de la Cour des comptes sur l'approche méthodologique des coûts de la justice, rendu cette semaine : on ne s'attaque pas dit la Cour au vrai problème de la justice, qui est le mode de fonctionnement interne de ce ministère.

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