Les professionnels de la justice ont manifesté un accord exceptionnel sur la question du budget de votre ministère : son augmentation servira pour l'essentiel l'administration pénitentiaire, et la réforme qui se profile permettra de réduire les effectifs dans les tribunaux, qui n'ont pas besoin de cela. Nous partageons cette analyse, comme en témoigne le rapport de notre mission d'information sur le redressement de la justice, ayant débouché sur les propositions de loi du président Bas adoptées par le Sénat en octobre 2017. Il faut faire le parallèle avec les fermetures de services publics. Lorsqu'il y a deux tribunaux de grande instance dans un département, l'un dans la ville-centre et l'autre dans une zone moins dynamique, la spécialisation ne peut aboutir qu'à un glissement vers la fusion. Si vous tenez votre promesse de ne pas le faire, c'est votre successeur qui s'en chargera.
Les fonctionnaires des greffes nous le disent : la spécialisation permettra de limiter les recrutements et, à la fin, il n'y aura plus qu'une personne pour donner des renseignements au public.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement qui prévoit la mutualisation des greffes dans les villes où existent à la fois un tribunal d'instance et un conseil de prud'hommes. Là aussi, c'est une façon de réduire le personnel et de faire des économies.
Au moment où nous espérions que le Président de la République ait compris que la verticalité ne fonctionnait pas, cela étonne. Nous cherchons à faire en sorte - par une saisine du conseil de juridiction ou des conseils départementaux - que des garanties soient données pour que l'organisation territoriale n'échappe pas aux territoires. Un retour à la verticalité de Mme Dati inquiète tout le monde.
Le Président de la République a cité le Sénat dans les sujets soumis au grand débat. Il est certain que si on passe de la procédure accélérée aux ordonnances avec une vague discussion de quelques mois avec quelques sénateurs, on n'a plus besoin du Sénat !
Vous nous demandez d'adopter une habilitation à réformer la justice des mineurs par ordonnance et le Gouvernement nomme un secrétaire d'État à la protection de l'enfance. Attention ! Comme le dit Michel Amiel, qui siège dans un groupe proche du Gouvernement : « un mineur dangereux est un mineur en danger ». Il faudra concilier protection et justice pénale des mineurs. Plutôt que faire un code pénal de l'enfance, faudrait-il écrire un code global qui inclue les deux problématiques.