C’est pourquoi de nombreux juristes, et pas des moindres, s’élèvent aujourd’hui aussi contre cette privatisation.
Le Conseil d’État soutient que le préambule de la Constitution de 1946 ne peut être invoqué contre un projet de loi, car tout en reconnaissant le caractère de service public d’ADP, il énonce que sa situation géographique exclurait qu’il puisse s’agir d’un service public national, puisque la mission de service public confiée à ADP ne s’exercerait que sur la seule région d’Île-de-France. Il ne serait pas non plus un monopole de fait.
Cependant, le préambule ne parle pas de circonscriptions géographiques, mais bien de l’importance du service public national pour la Nation. À ce titre, caractériser ce service uniquement à l’aune de l’implantation géographique n’a aucun sens et exclut la quasi-totalité des services publics existants. Or ADP, c’est treize aéroports, des participations dans de nombreux aéroports à l’étranger, des filiales avec des activités d’ingénierie, de gestion et de développement aéroportuaire. Le seul aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle devrait avoir à gérer un flux de 120 millions de passagers par an d’ici à 2023, date de mise en service du terminal 4, qui en ferait le premier aéroport européen.
ADP joue un rôle considérable dans l’aménagement du territoire national, à la fois par son poids économique pour la région capitale, mais aussi par son utilité pour le transport interne à la France, aussi bien en métropole que dans le lien entre celle-ci et les départements et territoires d’outre-mer, comme le Sénat le rappelait déjà en 2005.
ADP, c’est aussi un monopole de fait, puisque les secteurs d’activité sur lesquels la société détient une position exclusive ou prépondérante, occupent une place importante et non substituable dans l’économie nationale. De plus, ces secteurs d’activité représentent la majeure partie de son activité globale.
Je vais vous le dire, monsieur le ministre, comme d’autres l’ont dit ici, même si j’aborde un aspect plus juridique, on est en train de faire un choix idéologique et politique, c’est d’avoir des lectures différentes de notre Constitution.