Concernant le fonctionnement du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, je vais être très rapide. Les informations précises sont largement disponibles et nous vous les fournirons par écrit suite à cette audition.
Le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles provient d'un partenariat public-privé, établi en 1982, qui a pris appui sur l'assurance des dommages aux biens - immobiliers, professionnels, industriels - et aux véhicules. Toutes ces assurances avaient un fort taux de pénétration en métropole, à la différence des DOM. En s'appuyant sur ce fort taux de pénétration, le législateur a ajouté une extension de garantie obligatoire pour les dommages causés par les catastrophes naturelles. Il a eu raison de s'appuyer sur l'industrie de l'assurance pour la gestion des sinistres, car il s'agit d'un véritable métier que d'évaluer un sinistre et de l'indemniser.
En cas de catastrophe naturelle, les coûts cumulés peuvent être extrêmement importants. La réassurance permet de garantir la solvabilité du marché de l'assurance et donc l'indemnisation complète et rapide des assurés.
L'exposition et la vulnérabilité ne sont pas les mêmes pour tous. Elles varient selon le lieu du domicile. Si vous habitez à Montmartre, vous n'avez pas intérêt à vous assurer contre les catastrophes naturelles. Si vous habitiez une maison en Martinique, en revanche, le coût d'une assurance serait prohibitif.
Avec ce partenariat public-privé, nous sommes partis des contrats d'assurance dommages aux biens dont la tarification était établie en fonction de la sinistralité hors risques naturels et nous avons assorti l'extension de garantie d'un taux de surprime unique de 12 %. En France, tous les citoyens et toutes les entreprises peuvent ainsi assurer leurs biens contre les risques naturels.
Dans notre pays, plus de 98 % des ménages sont couverts contre les effets des catastrophes naturelles. En cas de sinistre, ils sont donc indemnisés, ce qui contribue à la résilience des territoires. Ainsi, Lourdes a été ravagée par la crue du Gave de Pau en 2013 : 100 millions d'euros de dégâts pour les habitants et 150 millions d'euros pour les hôteliers et les restaurateurs, pour une ville qui vit essentiellement du tourisme et des pèlerinages. En moins de six mois, la vie économique a repris. Cette assurance offre donc une garantie très forte. En outre, le système permet une péréquation entre les territoires exposés et ceux qui le sont moins.
En Italie, moins de 5 % des ménages sont couverts par une assurance ; ce taux varie pour les PME, et les grandes entreprises en ont toutes.
En Allemagne, moins de 30 % des ménages sont couverts contre le risque d'inondation, ce qui pose un véritable problème eu égard au changement climatique en cours. Des événements récents ont d'ailleurs coûté cher aux sinistrés et aux pouvoirs publics ; en raison d'une crue en Allemagne de l'Est, l'État a dû débourser huit milliards d'euros.
Le régime français protège les finances publiques. S'il y a bien eu des catastrophes de très grande ampleur en France ultramarine ou continentale, non seulement elles n'ont rien coûté aux pouvoirs publics français, mais en outre la Caisse centrale de réassurance paie un tribut annuel à l'État en rémunération des garanties dont elle bénéficie, s'acquitte de l'impôt sur les sociétés pour ses bénéfices - les primes que nous percevons sont placées sur le marché et génèrent des produits financiers - et verse des dividendes à son actionnaire, l'État. C'est donc un système très intéressant pour l'État.
Lorsque surviendra la crue centennale de la Seine, l'État devra exercer sa garantie au bénéfice de la CCR mais, dans une telle situation, avec ou sans système, il interviendrait de toute façon. Une crue centennale de la Seine représente entre 1 à 1,5 point de PIB, entre 20 et 30 milliards d'euros ; il est impossible que l'État n'intervienne pas et laisse les citoyens se débrouiller.
Ce dispositif fonctionne donc bien, il permet aux assurés de s'assurer contre les tempêtes, les inondations ou autres à un tarif raisonnable, vingt ou vingt-cinq euros, éventuellement trente euros pour un logement de grande valeur.
Il y a sans doute, dans la pratique, des frustrations liées aux délais d'indemnisation. Pourtant, le délai d'examen des dossiers est en moyenne de douze jours, c'est très efficace. Le délai de vingt-neuf jours entre l'avis de catastrophe naturelle de la commission interministérielle et sa publication au Journal officiel est en revanche un peu long. C'est la somme de ces deux délais qui est importante.
Les assureurs indemnisent rapidement, il n'y a pas de difficulté à cet égard - je me permets de le dire, la CCR étant indépendante. Quand il y a des difficultés sur les délais d'indemnisation, cela concerne rarement les avances de frais et les indemnisations préalables ; simplement, il faut que les travaux soient achevés et facturés pour être remboursés ; on ne rembourse pas sur une estimation du coût des travaux. Aussi, il peut effectivement y avoir, au cas par cas, des difficultés tenant à l'engorgement des artisans faisant les travaux de réparation. Cela a été le cas à Saint-Martin et, dans une moindre mesure, à Saint-Barthélemy, mais la situation insulaire de ces territoires a renforcé les difficultés.
Une deuxième difficulté fréquente concerne les franchises. Il y a des franchises individuelles d'un montant assez faible, mais qui peuvent être modulées par un coefficient multiplicateur si l'on est dans un territoire plusieurs fois sinistré et qu'il n'y a pas eu de mesure préventive d'une fois sur l'autre. Cela dit, cette clause est très rarement appliquée.