Intervention de Philippe Adnot

Réunion du 5 février 2019 à 14h30
Croissance et transformation des entreprises — Article 42 bis

Photo de Philippe AdnotPhilippe Adnot :

L’article 42 bis permet à l’Institut national de la propriété intellectuelle de vérifier les conditions de brevetabilité d’une invention.

Actuellement, une invention doit obéir à trois critères pour être brevetable : elle doit être nouvelle, elle doit impliquer une activité inventive et elle doit être susceptible d’application industrielle.

Or, contrairement à la plupart des offices nationaux de propriété industrielle, l’INPI ne peut pas considérer l’absence d’activité inventive comme un motif de rejet dans le cadre de la brevetabilité d’une invention.

Cette spécificité française date des années soixante. À une époque où l’innovation ne constituait pas la clé de voûte de l’économie française, on a privilégié un dispositif qui permettait aux entreprises de disposer assez rapidement d’un titre de propriété pas cher, même s’il ne valait pas grand-chose.

Cinquante ans après, les choses ont évolué et cette exception française est devenue pénalisante pour nos entreprises. Dans une économie dominée par l’immatériel, la compétitivité des entreprises françaises repose de plus en plus sur leur capacité à innover. Mais l’innovation coûte cher et n’est considérée par les entreprises que si elle peut être protégée et valorisée. Cela passe donc par un environnement juridique et institutionnel favorable à la création et à la protection de l’innovation.

C’est la raison pour laquelle je ne comprends pas le choix de nombre d’entre vous, mes chers collègues, de défendre la suppression de cet article et, par là même, de maintenir la France dans un système de protection des titres de propriété médiocre, qui nuit à l’essor de nos PME et à leur notoriété.

Alors, oui, c’est un véritable changement de mentalité que nous demandons à nos entreprises et à leurs conseils : arrêtons la solution de facilité d’un brevet faible, qui incite les PME à faire l’économie d’une stratégie sérieuse de brevet et aboutit à la délivrance de titres qui ne sont pas opposables !

On nous dit que le renforcement de la qualité des brevets sera contreproductif pour les entreprises françaises et on nous vante le système actuel. Soyons sérieux : si le système de brevets français était si performant que cela, nous aurions certainement plus d’entreprises innovantes !

On nous dit que nos entreprises renonceront au brevet français au profit du brevet européen parce que les coûts seront identiques. C’est faux ! Le brevet français restera avantageux financièrement – les chiffres ont été précédemment donnés. En revanche, le renforcement de sa qualité permettra à l’entreprise qui souhaiterait s’étendre à l’étranger d’accéder plus facilement et à moindre coût au brevet européen dans la mesure où elle aura déjà pu prouver le caractère inventif de son invention devant l’INPI.

Pour ma part, ce que je constate, c’est que le taux de dépôt de brevets auprès de l’INPI stagne depuis cinq ans. Il apparaît que, dans leurs relations commerciales avec les grandes entreprises, les PME subissent un rapport de force qui leur est défavorable non seulement parce qu’elles ne peuvent pas faire valoir leurs droits en raison de l’insécurité juridique qui pèse sur la valeur de leur titre, mais également parce que le faible coût de dépôt des brevets incite les grandes entreprises à en déposer beaucoup, même s’ils sont contestables, …

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