Le texte que vous nous présentez, madame la ministre, a pour objet de traduire dans les faits l’accord pour le développement de la Polynésie française, qui a été signé le 17 mars 2017 par François Hollande, alors Président de la République, et Édouard Fritch, président de la Polynésie française.
François Hollande avait alors déclaré : « C’est un accord d’abord politique, qui met la Polynésie pleinement dans la République. Cette place ne doit jamais être remise en cause. »
Madame la ministre, vous qui êtes un symbole de la continuité, je pense que vous êtes satisfaite de voir que le président Emmanuel Macron a pris l’engagement de respecter scrupuleusement cet accord, vous confiant le soin, avec M. le Premier ministre, de porter ces projets de loi.
Tout cela s’est donc passé dans de bonnes conditions, ce dont nous nous réjouissons. Aussi, le groupe socialiste et républicain apportera son soutien à ces textes.
Cet accord est important pour la Polynésie française, non seulement pour des questions institutionnelles et en raison des révisions qui s’y attachent, mais aussi pour des raisons de fond qui tiennent au nécessaire développement économique de ce territoire.
La Polynésie dispose de nombreux atouts. Je pense en particulier aux ressources minérales marines profondes, qu’il faut exploiter naturellement dans le respect de l’environnement – chacun en conviendra –, mais aussi avec le souci de faire vivre dans de meilleures conditions l’ensemble des Polynésiens grâce à un développement économique maîtrisé.
Se pose la question de la continuité territoriale. Chère madame Tetuanui, la Polynésie, dont vous êtes la sénatrice, est certes la France, mais elle est tout de même située à une certaine distance de la métropole ! Il faut tirer les conséquences de cette réalité que vous et vos compatriotes vivez.
Se posent aussi la question si importante du désenclavement à la fois aérien et numérique, celle du développement touristique, un tourisme, selon l’idée qu’on s’en fait, qui permette de faire connaître en profondeur la richesse de la Polynésie et tout ce qu’elle peut apporter sur le plan de l’humanisme, de la philosophie, de la rencontre entre les êtres humains et les cultures.
Se pose enfin la question de la place de la Polynésie au regard des autres entités du Pacifique avec lesquelles elle est amenée à être en lien, bien entendu dans le cadre de la République.
Ma chère collègue, je me souviens que vous aviez déposé voilà quelques mois une proposition de loi visant à prendre considération la situation de certains maires de la Polynésie, qui doivent parfois parcourir plusieurs centaines de kilomètres, voire plusieurs milliers de kilomètres, pour aller d’un bout à l’autre de leur commune, répartie sur plusieurs îles. Ce sont là des conditions particulières.
Les présents textes n’appellent pas d’autres remarques de ma part. Il n’en reste pas moins que je souhaite revenir sur ce que j’appellerai « la dette nucléaire ». En effet, et vous l’avez dit, madame la ministre, la loi Morin de 2010 a été considérée comme un progrès. Ayant moi-même participé à des réunions organisées par les associations de victimes, je dois bien dire que celles-ci ont connu quelques déconvenues. Certes, vingt et une maladies induites ont été définies, mais si l’on s’en tient à la proportion de dossiers, qui, sur les 1245 qui ont été déposés entre 2010 et 2017, a abouti à un dédommagement financier, on en arrive à 11 %. Vous ne me démentirez pas, madame la ministre. Et encore, je ne suis pas sûr que ce pourcentage ne soit pas un peu surestimé !
Vous nous avez annoncé à l’instant que, en 2018, soixante-quinze dossiers avaient été pris en compte. Il faudra que ce rythme s’accélère. Comme cela avait été convenu avec le président Hollande et comme cela a été confirmé par le président Macron, la dette nucléaire doit devenir en quelque sorte une dotation globale d’autonomie, facteur important pour le développement du territoire, mais aussi pour dédommager tous les habitants qui doivent l’être.
Nous appelons de nos vœux une traduction très concrète dans les faits, parce que c’est un point très important pour la Polynésie. Je sais que vous serez vigilante à cet égard, madame la ministre.
La question des autorités administratives indépendantes a beaucoup retenu l’attention du Sénat. Je vais vous parler franchement. Le projet de loi organique reprend les dispositions excellentes issues du travail considérable réalisé en commun par René Dosière et Catherine Tasca au sujet de la Nouvelle-Calédonie. Mon groupe a pensé que c’était sans doute la voie de la sagesse : quand vous présentez un projet de loi, vous vous efforcez, madame la ministre, je le sais bien, de l’écrire avec sagesse. Certes, il existe des conditions particulières, que nos amis polynésiens connaissent. Mais faisons quand même attention à conserver la rigueur nécessaire, quelles que soient ces conditions particulières. C’est pourquoi nous avons déposé un amendement tendant à revenir au texte du Gouvernement. Et je ne doute pas, madame la ministre, que cet amendement suscitera votre intérêt.
Par ailleurs, nous sommes sensibles à la question des sociétés publiques locales. Il nous a été exposé – nous sommes là pour écouter nos compatriotes de Polynésie – qu’il était nécessaire que ces sociétés publiques locales n’aient qu’un seul actionnaire, de manière à offrir utilement de la souplesse dans la gestion. Simplement, très soucieux de rigueur, nous sommes très attachés en particulier à ce que ces sociétés ne puissent œuvrer que dans le domaine public, puisqu’elles n’auraient qu’un seul actionnaire, à savoir la Polynésie française.
Enfin, nous serons également attentifs aux règles concernant les agents publics, de telle manière que le principe d’égalité soit strictement respecté.
Nous reviendrons au cours du débat sur ces quelques remarques. Pour l’essentiel, madame la ministre, je vous assure de notre soutien, et nous sommes totalement solidaires de nos compatriotes polynésiens pour que ce nouveau pas en avant soit un pas positif pour le développement de la Polynésie française.