Nous devons recruter des contractuels dans des délais courts. Nous avons 760 médecins généralistes ; il nous en faudrait une centaine de plus. Nous en avons besoin immédiatement. Le volant de renforcement du nombre de places mises au concours d'entrée dans les écoles de santé militaires de Lyon prévu par la LPM, avec une augmentation à 115 postes initiaux au lieu de 100, ne produira ses effets que dans neuf ans pour les médecins généralistes et douze ans pour les spécialistes. D'où la nécessité de recruter des contractuels. Je précise que nous n'avons aucun problème d'attractivité au niveau de nos écoles initiales, puisque de 13 à 19 candidats concourent pour une seule place. De mon point de vue, la réforme des études médicales n'interférera en rien avec l'attractivité de ces écoles. Elle les recentrera au contraire sur leur singularité d'écoles militaires.
Nous disposons d'une quarantaine de chirurgiens orthopédistes, dont 33 étaient en OPEX en 2018. Tous ne sont pas forcément aptes à partir - je pense par exemple aux jeunes femmes enceintes. Nous manquons de chirurgiens viscéraux, d'anesthésistes réanimateurs, de neurochirurgiens, d'urgentistes et de psychiatres. Sur les 35 psychiatres dont nous disposons, 7 sont partis en OPEX. Nous partageons les mêmes besoins que la santé publique dans certaines disciplines, mais avec un objectif spécifiquement opérationnel.
Le recrutement de réservistes constitue une opportunité intéressante, car en les formant, nous leur donnons envie de rejoindre nos rangs. Pour renforcer notre attractivité, j'ai monté une campagne de recrutement avec l'aide de la Délégation à l'information et à la communication de la défense (Dicod). J'espère qu'elle portera ses fruits dès 2019. Il faudra pouvoir lui allouer un budget, qui est en cours d'élaboration.
Des aides financières participent aussi à l'attractivité du métier, en plus des valeurs que nous défendons. J'ai demandé à ce qu'elles soient comparables à ce qui est proposé dans la santé publique lorsqu'il s'agit de recruter des médecins dans les déserts médicaux.
Les volontaires qui exercent dans la Marine sont des réservistes. Ces missions sont très prisées. D'un point de vue général, nous souhaitons fidéliser nos réservistes en les formant puis en leur confiant des missions intéressantes. Je les considère comme des militaires à part entière et comme d'authentiques partenaires.
Les coopérations internationales sont souhaitables pour nous inscrire dans le cadre de l'Initiative européenne d'intervention (IEI) voulue par le Président de la République. Nous sommes en train d'organiser un forum des chefs opérationnels des services de santé des armées des pays européens qui le souhaitent. Dans ce cadre, nous aurons l'occasion d'échanger sur une capacité d'interopérabilité en opération extérieure. Nous travaillons aussi avec certains pays de l'OTAN sur la médicalisation des nouveaux vecteurs de l'armée de terre. Les véhicules de l'avant-blindé sanitaires (VAB SAN) devraient être renforcés et des kits de médicalisation devraient être bientôt installés dans les véhicules blindés de combat d'infanterie (VBCI) et dans les véhicules Scorpion, projet sur lequel nous travaillons en collaboration avec les Belges.
Sur les théâtres d'opérations extérieures, nous prenons en charge l'aide médicale à la population, en fonction de la demande que le commandement nous en fait. C'est un moyen d'appuyer le rayonnement de la France. Nous travaillons aussi à rendre interopérables nos méthodes et nos techniques.
À l'instant t, une cinquantaine d'équipes médicales sont à l'oeuvre sur les théâtres d'opérations extérieures. Il y en avait précisément 52, vendredi dernier. Elles sont chacune composées au moins d'un médecin, de 2 infirmiers et de 5 à 7 auxiliaires sanitaires. Nous disposons aussi de 5 à 7 équipes chirurgicales en permanence sur les théâtres d'opérations, composées de 2 chirurgiens, un anesthésiste réanimateur, un manipulateur radio et des infirmiers. Un psychiatre est également présent en permanence dans l'opération Barkhane. Au total, entre 60 et 70 médecins sont présents chaque jour en OPEX.
La durée des missions est en moyenne de 92 jours pour les médecins des forces et de 62 jours pour les hospitaliers. Les armées souhaitent en général partir avec leurs médecins. Dans la mesure où les médecins des forces sont intégrés dans les unités combattantes, il est important que la durée de leur mission soit calquée sur celle des unités avec lesquelles ils partent. Il privilégie l'accompagnement de l'unité déployée par son médecin, mais il veille également à ce que ce médecin ait effectué la préparation opérationnelle idoine. Quant aux hospitaliers, il est logique que la durée de leur mission soit moindre, dans la mesure où ils ont également une patientèle sur le territoire national qu'ils risqueraient de perdre.
Depuis mon arrivée, la durée moyenne d'intervention sur les OPEX a un peu diminué. L'une de mes priorités est que le personnel puisse concilier vie professionnelle et vie familiale. Le SSA s'est féminisé, surtout en ce qui concerne la médecine des forces. Pas moins de 39 % de nos médecins et 70 % de nos infirmiers sont des femmes. La proportion est de 50 % pour les tranches d'âge inférieures à 40 ans. Donc, vous voyez que les jeunes générations, celles qui partent en OPEX, sont très féminisées. Je considère qu'il est de mon devoir de faciliter la conciliation entre leurs vies familiale et opérationnelle. C'est pourquoi j'ai introduit la possibilité de mandats réduits à destination des parents, et pas seulement des femmes. C'est important pour préserver le moral du personnel du SSA qui est plutôt bas actuellement.
Je souhaite aussi mettre en place des mandats réduits pour que les réservistes puissent davantage partir en opération extérieure. Nos réservistes effectuent en moyenne 22 jours de service par an, ce qui n'est pas suffisant, car il faudrait atteindre un objectif de 30 jours par an. Cela reste néanmoins complexe pour les médecins.
Le partenariat entre l'hôpital d'instruction des armées Desgenettes et les hospices civils de Lyon, deuxième trauma center de France, a du sens. En insérant des équipes chirurgicales dans un centre de ce niveau, on ne peut que favoriser le développement des compétences de nos chirurgiens. C'est en tout cas l'objectif que nous poursuivons. L'insertion se déroule très bien pour les chirurgiens orthopédistes et pour les anesthésistes réanimateurs. Les chirurgiens viscéraux ont un peu plus de mal à trouver leur place dans les équipes. Le maintien d'un pôle de réhabilitation physique et psychique militaire sur le site de l'hôpital Desgenettes s'enrichira de l'arrivée en 2023 de l'hôpital Henry Gabrielle, établissement reconnu en matière de soins de réadaptation. Nous préparons activement le projet d'infrastructures qui rendra possible l'insertion de cet hôpital sur le site Desgenettes. Il s'agit d'un magnifique projet.
La question du service d'accueil d'urgence reste posée pour l'hôpital Desgenettes. Il faut l'étudier avec le partenaire des hospices civils de Lyon et avec l'ARS responsable de l'organisation des activités sur le territoire. L'implantation récente du Médipôle proche de Desgenettes avec un service d'accueil d'urgence de très grande capacité conduira certainement à revoir le projet territorial d'accueil des urgences.
En ce qui concerne la pharmacie centrale des armées, elle prépare les crises en coordination avec la santé publique. Les stocks stratégiques sont calibrés pour faire face à des crises de quelque nature qu'elles soient. Le renouvellement régulier de ces stocks est prévu et sa planification a été établie par la santé publique de manière à se faire au fil de l'eau. Nous préparons bien entendu les grands rendez-vous comme les jeux Olympiques. Il n'y a aucune inquiétude à avoir sur ce point.
L'articulation avec les ARS est essentielle. Nous mettons en place des comités de pilotage régionaux réguliers avec chacune des 17 agences. Le SSA est inclus dans les projets régionaux de santé. Nous allons signer avec les ARS des contrats spécifiques de partenariats, afin que nos relations soient précisément calibrées, notamment en ce qui concerne les flux financiers.
La vétusté des locaux nous préoccupe d'autant plus que nous souhaitons moderniser et améliorer les conditions d'exercice de nos praticiens. Un ambitieux programme de rénovation des infrastructures a été mis en place dès le début de la transformation du SSA, doté d'un budget de 99 millions d'euros pour la médecine des forces alloué sur la durée de la LPM. Pas moins de 200 millions d'euros ont également été dégagés pour les hôpitaux. Il est vrai qu'à la fin de la LPM, 50 % des locaux seront encore vétustes, de sorte qu'il faudra poursuivre notre effort. D'où mon souhait d'aller au plus vite pour rénover les locaux, mettre en place des systèmes d'information modernes, développer la télémédecine et utiliser l'intelligence artificielle afin de développer l'observatoire de la santé des militaires. Tout cela nécessite des moyens ambitieux et je me bats pour les obtenir. La LPM me donne les moyens de répondre aux attentes les plus prioritaires. Nous travaillons avec le ministère pour accélérer la modernisation de notre service. Je ne suis pas pessimiste, mais combative.