Intervention de Claude Kern

Commission des affaires européennes — Réunion du 7 février 2019 à 8h35
Énergie — Paquet d'hiver « énergie propre pour tous les européens » : communication de mm. claude kern et michel raison

Photo de Claude KernClaude Kern, rapporteur :

Il aura fallu un petit peu plus deux ans pour que l'exceptionnel paquet d'hiver « Énergie propre pour tous les Européens », publié le 30 novembre 2016, passe du stade de propositions à celui de textes disponibles. Trois directives et un règlement ont été publiés au Journal officiel de l'Union européenne. Trois règlements et une directive sont disponibles uniquement dans la version temporaire de compromis accepté en trilogue, en décembre 2018. Pour ces derniers textes, aujourd'hui publiés en anglais, l'examen ultime par le Parlement européen doit intervenir en plénière pendant la session des 25 au 28 mars prochains, à Strasbourg.

Les 750 pages des propositions normatives initiales ayant été complétées, nous avons un ensemble de 840 pages, qu'il est matériellement impossible de présenter aujourd'hui de façon exhaustive. C'est pourquoi nous avons choisi de mettre l'accent sur certains points ayant une importance particulière, soit parce qu'ils avaient retenu l'attention de notre commission en 2017, soit en raison de substantielles différences entre le texte initial et le dispositif adopté.

Michel Raison a évoqué les conséquences du paquet d'hiver pour la politique énergétique des États membres. Je vais focaliser mon intervention sur la dimension institutionnelle.

Trois modifications institutionnelles sont introduites par le paquet d'hiver : la création de centres de coordinations régionaux ; le rôle dévolu à l'Agence européenne pour la coopération des régulateurs de l'énergie (ACER) et son fonctionnement interne ; enfin la création d'une entité européenne pour la gestion des réseaux de distribution, dont l'organisation interne a substantiellement évolué pendant les débats.

La création des centres de coordinations régionaux est la principale innovation institutionnelle du paquet d'hiver. Notre commission s'est opposée à l'introduction d'une instance intermédiaire entre les États membres et l'Union, chargée de superviser le travail des autorités nationales de régulation, mais aussi de calculer directement le niveau des capacités de production pertinentes. Sur ce plan, la rédaction définitive oppose une fin de non-recevoir pure et simple aux objections nous avions formulées.

J'en viens à l'ACER.

Notre commission s'était élevée contre la définition excessivement floue de son nouveau domaine d'attribution. Sur ce point, la résolution européenne du Sénat du 6 juillet 2017, adoptée à notre initiative, est satisfaite puisque l'expression « d'autres questions de règlement de portée transfrontalière » a disparu de la mouture définitive. Nous avons également été satisfaits par le maintien de la majorité qualifiée des deux tiers lorsque le conseil des gouverneurs se prononce.

En revanche, le principe attribuant une voix à chaque État membre est maintenu, alors que nous avions demandé qu'il y soit mis fin. Nous n'avons pas été plus entendus quant au pouvoir d'amendement, puisque le directeur de l'agence peut retirer un texte dont la rédaction par le conseil des gouverneurs ne lui conviendrait pas. Dans le même esprit, le directeur peut soumettre au conseil des gouverneurs une proposition ne comportant que ses propres amendements ou ceux qu'il approuve.

La nouvelle « entité européenne pour les gestionnaires de réseaux de distribution » (EU-DSO) ne devrait pas exercer de rôle substantiel dans l'immédiat. Il me semble toutefois intéressant de souligner que les dispositions organisant cette instance ont été considérablement étoffées en deux ans, principalement sur le plan de la gouvernance interne. Ainsi, l'assemblée générale devra se prononcer à la majorité qualifiée de 55 % des droits de vote, ces derniers étant proportionnels au nombre de consommateurs desservis, ce qui rompt avec le principe habituel attribuant une voix par État. Faute d'avoir été écoutés pour l'ACER, nous avons peut-être inspiré l'organisation de l'EU-DSO, dont je souligne que son assemblée générale élit les membres du directoire, désigne le secrétaire général et choisit le groupe d'experts chargé d'assister le directoire.

Je voudrais enfin dire un mot de la préparation aux risques dans le secteur de l'électricité, thème qui a fait l'objet d'un compromis en trilogue le 29 novembre. Ce dispositif a considérablement évolué en deux ans. Conformément au compromis, les États membres élaboreront des scénarios de crise comportant des actions coordonnées, si possible bilatérales. Ils formaliseront les scénarios en collaboration avec le réseau européen des gestionnaires de transport d'électricité. Les centres régionaux de coordination et la Commission européenne devront examiner les scénarios, mais les États membres ne seront pas tenus par leurs observations. Enfin, les États membres sollicités percevront une indemnité dont le montant aura été déterminé d'un commun accord avant la mise en oeuvre du soutien.

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