La Commission européenne a présenté, le 1er juin 2018, ses propositions pour la future PAC 2021-2027, qui reposent sur cinq grandes orientations. Le premier axe concerne le nouveau mode de mise en oeuvre imaginée pour la PAC. Concrètement, l'approche uniforme serait remplacée par davantage de subsidiarité : des plans stratégiques seraient élaborés par les États membres, puis validés par la Commission. Ce modus operandi est supposé simplifier le coeur de la Politique agricole commune, en retenant une approche par les résultats, plutôt que par les moyens. Il y a là, néanmoins, un double risque de « renationalisation » et de distorsions de concurrence. Pascale Gruny y reviendra.
La seconde orientation de la nouvelle PAC vise à établir des conditions plus équitables, grâce à un meilleur ciblage des aides. En résumé, les paiements directs aux agriculteurs seraient réduits jusqu'à 60 000 € et plafonnés à 100 000 € par exploitation, en déduisant les coûts de main-d'oeuvre.
Le troisième axe consiste à encourager l'innovation et la recherche : 10 milliards d'euros issus du programme Horizon y seraient affectés.
La quatrième orientation a pour objet de relever les ambitions environnementales et climatiques de la PAC. Les paiements directs seraient ainsi subordonnés à des exigences accrues. Au-delà du « verdissement » actuel, considéré comme acquis, il y aurait, à l'avenir, treize exigences règlementaires - à commencer par les directives nitrates, bien-être animal, habitat, oiseaux - auxquelles s'ajouteraient douze conditions agro-environnementales définies au niveau européen, dont cinq nouvelles. Les États membres, ou les régions, auraient ensuite à préciser aux agriculteurs les règles à suivre, pour mettre en oeuvre ces grands principes. Chaque État membre devrait disposer de programmes écologiques incitant les agriculteurs à aller au-delà des exigences obligatoires : c'est ce que la Commission a baptisé, en langue anglaise, les « eco-schemes ».
Enfin, la cinquième orientation de la Commission porte sur la diminution du budget, estimée par le Parlement européen, à 15 % en termes réels, entre la période 2021-2027, comparée à 2014-2020. Cette réduction de format drastique conditionne tout.
Mes trois collègues rapporteurs insisteront sur les points clés avec lesquels nous avons des divergences plus ou moins importantes. Permettez-moi, cependant, de conclure sur une note positive, car plusieurs propositions de la Commission méritent aussi d'être saluées. J'en citerai quatre. Tout d'abord, le choix d'une simple clarification des paiements directs. Sur les plans technique et opérationnel, après vingt-cinq années de bouleversements, il est heureux que, cette fois, l'architecture des paiements ne soit modifiée qu'à la marge.
Nous nous félicitons également de l'augmentation prévue des aides aux jeunes agriculteurs. La Commission européenne prévoit, en effet, d'allouer un minimum de 2 % de la dotation en paiements directs, pour soutenir leur installation. Sur ce point capital, nos préoccupations ont été entendues.
Il en va de même pour la recherche et l'innovation, que la Commission européenne souhaite encourager en y affectant 10 milliards d'euros, issus du programme Horizon Europe. Il s'agirait, par là-même, de soutenir des réalisations dans les domaines de l'alimentation, de l'agriculture, du développement rural et de la bioéconomie.
Enfin, la Commission européenne propose une remise à plat particulièrement bienvenue du système, aujourd'hui totalement inopérant, de réserve pour la gestion des crises agricoles. Cette réserve dotée, « d'au moins 400 millions d'euros », serait destinée à financer les mesures d'intervention sur les marchés telles que prévues dans l'Organisation Commune des Marchés, ainsi que les mesures de crise à proprement parler. Elle serait initialement alimentée, en 2021, par les crédits inutilisés de l'actuelle réserve de crise.