Intervention de Pascale Gruny

Commission des affaires européennes — Réunion du 14 février 2019 à 9h00
Agriculture et pêche — Réforme de la politique agricole commune pac : rapport d'information proposition de résolution européenne et avis politique du groupe de suivi

Photo de Pascale GrunyPascale Gruny, rapporteur :

Le troisième axe de la résolution porte sur ce qui constitue le coeur de la prochaine réforme pour la Commission européenne : le nouveau mécanisme de mise en oeuvre de la PAC. Nous voudrions ici conjurer le risque d'une « vraie fausse » simplification, qui ne profiterait paradoxalement qu'à la Direction générale AGRI, sans atteindre les premiers intéressés : à savoir les agriculteurs. Sur le papier, on ne peut que souscrire aux objectifs annoncés, visant à concilier simplification et meilleure efficacité, grâce à une plus grande subsidiarité. Toutefois, en pratique, on peut en douter.

Notre proposition de résolution y consacre neuf points, afin de fournir une argumentation détaillée sur cette question méconnue et pourtant essentielle. Le premier fait valoir le risque de déconstruction de la PAC, qui résulterait d'une dérive progressive vers 27 politiques agricoles nationales, de moins en moins compatibles entre elles, d'ici 2027.

Le second s'oppose à la perspective de renationalisation de la PAC.

Les quatre alinéas suivants s'inquiètent des risques de distorsion de concurrence, de course au « moins-disant » social et environnemental entre les États membres, ainsi que de la pénalisation des producteurs les plus vertueux.

Le septième point fait valoir que ce nouveau mode de mise en oeuvre de la PAC pourrait n'être qu'un transfert de bureaucratie sans bénéfice, ni pour les agriculteurs européens, ni pour les consommateurs et citoyens européens.

Enfin, la proposition de résolution s'inquiète d'un probable alourdissement des contrôles et des systèmes de supervision et de surveillance, contrepartie inévitable d'une plus grande subsidiarité.

D'une façon générale, la Commission européenne tend, à tort, à présenter son projet de nouveau mode de mise en oeuvre de la PAC comme un impératif non négociable. Pourtant, le dispositif n'apparaît aucunement nécessaire à la prochaine réforme de la Politique agricole commune. Ce nouveau mode de mise en oeuvre n'est que l'un des multiples aspects du schéma de réforme de la PAC et non la « clé de voûte » de l'ensemble.

En résumé, il serait tout à fait possible de faire l'économie de ce dispositif, sans renoncer à modifier la Politique agricole commune pour la période 2021-2027. Le sujet ne s'est probablement pas vu accorder toute l'attention qu'il mérite. Son enjeu ne s'inscrit d'ailleurs pas dans le champ des mesures techniques, mais, à l'inverse, dans un domaine politique essentiel : sous couvert de subsidiarité, la Commission européenne propose, en effet, un changement radical de logique et d'approche pour la Politique agricole commune. Le transfert au niveau national de l'élaboration des plans stratégiques couvrant désormais le « premier pilier » conduirait inévitablement et mécaniquement à une renationalisation de la PAC, des distorsions de concurrence et au passage, à terme, à 27 PAC nationales. In fine, quelles que soient les assurances données par la Commission européenne, le dilemme posé aux États membres consisterait à savoir s'il faut, ou non, prendre le risque d'un tel « saut dans l'inconnu ».

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