Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comment améliorer les déplacements dans les zones rurales et périurbaines ? Comment garantir à chacun la possibilité de se déplacer pour accéder à l’emploi, à la formation, à la santé, à la culture ? En somme, comment désenclaver nos territoires ? Ces questions fondamentales ont fait l’objet, vous l’avez dit, madame la ministre, de débats riches et intenses à l’occasion des Assises nationales de la mobilité.
En effet, nous le savons, nos concitoyens ne sont pas égaux face aux transports. Parmi les formes d’inégalité qui limitent la mobilité, le facteur géographique d’éloignement dans les territoires de faible densité est une réalité qui touche tous nos concitoyens. Ainsi, les territoires moins denses, ruraux, périurbains, les petites villes et villes moyennes, les quartiers périphériques peuvent être fragilisés au regard d’une mobilité qui est loin d’être aisée.
Cette fragilité, cette fracture, cet enclavement sont vécus au quotidien par des millions de nos concitoyens. Or l’accès quotidien à l’emploi, à l’éducation, à la santé, aux commerces, aux relations sociales, aux loisirs est une condition essentielle d’exercice des droits fondamentaux de liberté, d’égalité et de citoyenneté, et c’est à ce titre que le désenclavement des territoires doit être une priorité.
Dans son rapport, notre collègue Jean-Pierre Corbisez nous rappelle que la France compte de nombreux territoires enclavés. Cette situation pose des problèmes quotidiens à nos concitoyens, qui rencontrent des difficultés à accéder à un emploi, à des services publics ou à des biens de consommation courants. La persistance de cet enclavement se double d’une montée des inégalités économiques et sociales entre les territoires et alimente un sentiment d’éloignement d’une partie de la population. Ce sentiment d’abandon d’une certaine frange de la population s’est cristallisé, ces derniers mois, autour du mouvement des gilets jaunes.
En réponse, le Président de la République a engagé un grand débat national permettant à tout un chacun de faire valoir son opinion. Ce grand débat est en cours et il serait opportun d’en attendre l’issue pour proposer les solutions les plus adéquates, en matière de désenclavement comme pour d’autres questions essentielles.
L’enclavement des territoires résulte avant tout d’une offre de mobilité, notamment en transports collectifs, insuffisante, ainsi que d’un manque d’infrastructures de transport adaptées, et chacun peut constater aujourd’hui à quel point cette absence de solution de mobilité alimente un sentiment d’abandon d’une partie de notre population.
Concernant l’aérien, point saillant du texte, bien que les élus locaux perçoivent le plus souvent la force symbolique de la présence d’un aéroport sur leur territoire, le rapport du Commissariat général à l’égalité des territoires, le CGET, de janvier 2017 insiste sur la nécessité d’études approfondies sur les recouvrements de zones d’attraction des aéroports, avant d’examiner localement une offre aéroportuaire.
Le transport aérien contribue-t-il pertinemment au désenclavement des territoires les moins desservis en France métropolitaine ?
Le prix moyen du billet pour les petites lignes aériennes pose la question d’une véritable perspective de désenclavement de ces territoires. En effet, le coût du transport qui permettra le désenclavement de ces territoires aura une influence sur le nombre de citoyens touchés par la mesure. Or on peut facilement douter que le coût du transport aérien permette un désenclavement le plus large possible pour ces territoires. Le montant de subventions que nécessiterait un tel programme est à comparer au bénéfice qu’en retirerait l’ensemble des populations de ces territoires.
Aussi, il me semble que certaines mesures de cette proposition de loi, notamment celles relatives à l’aérien, mériteraient d’être creusées et nécessiteraient une étude d’impact approfondie, en particulier sur le plan financier. Avant de légiférer, il conviendrait d’anticiper le montant des subventions qui seraient nécessaires au développement d’aéroports de désenclavement.
Oui, nous voulons tous contribuer au désenclavement des territoires. Le métropolitain que je suis peut vous dire que le désenclavement est également nécessaire sur certaines parties géographiques des métropoles.
Pour autant, cette proposition de loi arrive un peu tôt, puisqu’il serait opportun que nous attendions les conclusions du grand débat national et elle intègre bien des points que nous examinerons à partir du 19 mars prochain dans le cadre de la loi d’orientation des mobilités. Si l’on ne peut qu’être favorable au désenclavement des territoires, je le disais, la question du financement reste posée.
À L’heure où les trois quarts de nos concitoyens utilisent leur voiture pour leurs trajets domicile-travail, la loi d’orientation des mobilités propose d’apporter des solutions de substitution à l’usage individuel de la voiture, ce qui semble un tantinet dissonant avec l’objet de cette proposition de loi. Dans le cadre de la loi d’orientation des mobilités, l’accent est mis sur le travail avec les collectivités locales, qui permettra de bâtir des réponses au désenclavement à partir des réalités du terrain.
Avec une méthode claire, vous l’avez rappelé, madame la ministre, le Gouvernement doit s’engager sur des projets qu’il sait pouvoir réaliser et qui répondent aux besoins des habitants, en s’assurant de l’effectivité des ressources par rapport aux engagements pris. J’ai déjà pu constater l’efficacité de la méthode lors de la signature du contrat de transition écologique du territoire de la Sambre-Avesnois, dans le cadre duquel la mise à 2x2 voies de la RN 2 a été annoncée, avec les financements afférents, après plus de quarante ans d’attente.
De la même manière, je voudrais ici rappeler le pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs, lancé sur l’initiative du ministre Mézard, doté d’une enveloppe de 5 milliards d’euros, qui reconnaît et consolide les villes moyennes dans leurs fonctions de centralité, car elles irriguent les communes petites et rurales environnantes, qu’il s’agisse de l’offre de santé, d’éducation, d’accès au ferroviaire, au commerce, à l’emploi ou aux services administratifs.
En définitive, le désenclavement des territoires doit être une préoccupation majeure, particulièrement dans notre assemblée. Néanmoins, nous sommes à l’aube du démarrage de la discussion sur la loi d’orientation des mobilités.
Même si ce texte soulève de vraies questions, qui convergent avec l’ambition du Gouvernement, je pense que celles-ci pourront largement être débattues et traitées dans le cadre de l’examen et de l’enrichissement de la loi d’orientation des mobilités. C’est pourquoi le groupe La République En Marche s’abstiendra.