Cela a été dit : deux Français sur dix demeurent éloignés de l’outil numérique, soit parce qu’ils n’y ont pas accès, soit parce qu’ils n’en maîtrisent pas les usages. En parallèle, la dématérialisation des services publics, si elle répond à un besoin d’efficacité et d’efficience que nul ne conteste, ne doit pas entraîner une déresponsabilisation des pouvoirs publics renvoyant à la sphère associative l’accompagnement des usagers.
Le rapport récent sur le sujet du Défenseur des droits sonne l’alerte et relève très justement le risque de privation de droits liée à la déconnexion ou à l’illectronisme des usagers.
Il faut donc conserver une présence physique du service public, car elle est conforme au principe constitutionnel d’égalité devant le service public.
L’association Emmaüs Connect, très impliquée dans l’inclusion des plus fragiles, estime qu’il faudrait un milliard d’euros, sur sept ans, pour financer l’inclusion numérique, tandis que le Gouvernement prévoit de mobiliser à peine 100 millions d’euros. Est-ce bien suffisant, au regard du risque de décrochement numérique, aussi bien en ville qu’en zone rurale ?
Par ailleurs, le développement de ce qu’il est convenu d’appeler les smart safe cities, ou villes sûres et intelligentes, comme Angers, va transformer profondément nos services publics par la numérisation généralisée. Il faudra bien sûr veiller à l’inclusion sociale et technologique des habitants.
Aussi la numérisation pose-t-elle également la question de la souveraineté, ce qui avait bien été mis en exergue par le rapport parlementaire de M. Luc Belot, paru en avril 2017.
En effet, la mise à disposition de data – données stratégiques utilisées par des applications en tous genres – pourrait, à terme, déposséder les collectivités de leurs services publics locaux.
Devant cette nouvelle menace de fracture numérique, l’État prévoit-il d’attribuer des aides financières spécifiques aux collectivités, afin de les accompagner dans la création de logiciels interopérables, de leur permettre ainsi de conserver la maîtrise de leurs données, et d’éviter une privatisation rampante de nos villes ?