Intervention de Antoine Karam

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 20 février 2019 à 9h15
Proposition de loi en faveur de l'engagement associatif — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Antoine KaramAntoine Karam, rapporteur :

Déposée le 4 avril 2018 par M. Waserman et ses collègues du groupe MODEM, cette proposition de loi a été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale le 17 mai 2018. Le groupe La République en marche, auquel je suis apparenté, a demandé son inscription à l'ordre du jour du Sénat le 6 mars 2019, au sein de son espace réservé.

Elle a pour objet « d'encourager la prise de responsabilité associative et de tenir compte de la réalité du monde associatif et de ses fortes contraintes » et d'« inciter la jeunesse à entrer dans le mouvement associatif ». Elle comportait à l'origine deux articles, auxquels les députés ont ajouté deux articles.

Il s'agit d'un texte modeste - plus encore que son intitulé ne le laisserait penser - qui contient quelques mesures bienvenues en faveur des associations et de l'engagement bénévole ; mais il n'a pas vocation à résoudre toutes les difficultés du monde associatif. Nous connaissons tous les défis auxquels celui-ci est confronté et sommes tous convaincus de son importance. Beaucoup d'entre nous ont été responsables bénévoles d'associations. Les 1,3 million d'associations, leurs 13 millions de bénévoles et leurs 1,8 million de salariés jouent un rôle indéniable dans le tissu social de notre pays.

Les associations connaissent une conjoncture difficile sur le plan financier, plusieurs mesures récentes leur ayant été défavorables, tels que la réduction brutale du nombre de contrats aidés, dont le rapport d'information de nos collègues Jacques-Bernard Magner et Alain Dufaut avait bien montré les enjeux et les implications ; la suppression de la réserve parlementaire ; ainsi que plusieurs mesures fiscales qui ont pu contribuer à une réduction des dons : transformation de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI), hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) pour les retraités et mise en oeuvre du prélèvement à la source.

Toutefois, les allégements de cotisations sociales sur les salaires qui entrent en vigueur en 2019 devraient desserrer l'étau qui pèse sur les associations et redonner des perspectives d'embauche.

La question financière ne doit pas masquer le fait que la principale préoccupation du secteur associatif est et demeure la ressource bénévole, notamment le renouvellement des dirigeants bénévoles.

Exercer à titre bénévole des responsabilités dans une association s'accompagne souvent de sacrifices professionnels et familiaux considérables. Cela exige des compétences de tous ordres, notamment de droit et de gestion. En outre, les actes faits au nom de l'association engagent la responsabilité du dirigeant.

Par ses quatre mesures, cette proposition de loi entend favoriser l'engagement dans les associations, y compris l'exercice de responsabilités. L'article 1er entend atténuer la responsabilité des dirigeants d'association en cas de faute de gestion ayant conduit à la liquidation de l'association. L'article L. 651-2 du code de commerce prévoit la possibilité de sanctionner financièrement le dirigeant d'une personne morale de droit privé en liquidation judiciaire si celui-ci a commis une ou plusieurs fautes de gestion ayant entraîné une insuffisance de l'actif. Afin de réduire le caractère infamant des procédures collectives et de ne pas décourager l'entrepreneuriat, la loi du 9 décembre 2016, dite Sapin II, prévoit que la simple négligence ne peut aboutir à engager la responsabilité du dirigeant, en précisant qu'il s'agissait d'une faute dans la gestion de la société. Cette approximation de la rédaction exclut les dirigeants d'association du bénéfice de cette « exception de négligence », ce qui est très surprenant. Le I de l'article 1er répare cette erreur en étendant à l'ensemble des personnes morales de droit privé l'exclusion de la responsabilité en cas de simple négligence.

Le II de l'article 1er complète l'article L. 651-2 du code du commerce pour préciser que, pour la mise en oeuvre de cette procédure, il est tenu compte de la qualité de bénévole du dirigeant. Précisons toutefois que la jurisprudence prend déjà en compte la situation du dirigeant et ses conditions d'exercice pour caractériser l'existence d'une faute de gestion, de sorte que la précision proposée ne revêt pas une portée majeure.

Introduit par nos collègues de l'Assemblée nationale en commission, l'article 1er bis prévoit la remise d'un rapport au Parlement sur l'opportunité d'affecter les dépôts et avoirs des comptes inactifs des associations sur un compte d'affectation spéciale au bénéfice du fonds pour le développement de la vie associative. Il reprend le dispositif de l'article 48 de la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté, qui avait été censuré pour des raisons de forme par le Conseil constitutionnel.

Je connais la pratique constante de notre commission et de notre assemblée s'agissant des demandes de rapport au Gouvernement. Toutefois, je vous proposerai de conserver cet article, le sujet revêtant une technicité particulière car nécessitant d'identifier très précisément les comptes des associations parmi les comptes inactifs.

L'article 2 de la proposition de loi modifie l'article L. 312-15 du code de l'éducation relatif à l'enseignement moral et civique. Il étend la sensibilisation au service civique auprès des élèves de collège et de lycée à la vie associative. Il a été complété par les députés pour prévoir une sensibilisation à la vie associative dès la classe de CM2 ainsi que l'édition et la diffusion, par le ministère, d'un livret destiné à la communauté éducative, pour faire mieux connaître le milieu associatif et les liens qui peuvent être créés entre associations et établissements scolaires.

Enfin, l'article 3 répare un oubli du législateur s'agissant des conditions d'accès au service civique. Celui-ci a été progressivement étendu aux étrangers de 16 ans et plus en situation régulière ainsi qu'aux réfugiés reconnus comme tels. Mais l'article L. 120-4 du code du service national ne vise que les titres de séjour délivrés en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda). Or le séjour des ressortissants algériens en France est régi quasi-intégralement par un accord bilatéral, l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. L'article 3 corrige cette erreur en ouvrant le service civique aux Algériens séjournant de manière régulière sur le territoire français.

Ce texte modeste porte des modifications bienvenues en faveur des associations. J'ai confiance en la capacité de notre assemblée à l'enrichir ; mes amendements ont d'abord pour but d'en améliorer la rédaction.

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