Intervention de Pierre-Yves Collombat

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 14 février 2019 à 8h30
Actualisation du rapport sur la crise financière de m. pierre-yves collombat — Audition de M. Jean Michel naulot

Photo de Pierre-Yves CollombatPierre-Yves Collombat :

Le sous-titre de votre dernier ouvrage « La prochaine crise financière sera pire qu'en 2008 » est très clair. Il semble que certains banquiers centraux n'aient pas compris cela. On entend en effet dire que « tout est sous contrôle » depuis la mise en oeuvre de la réglementation de 2008 : obligation de fonds propres, ratio de levier, etc. Mais quand on y regarde de près, ces « filets » de sécurité ont des trous bien larges et les marges de manoeuvres restent dans les mains des banques, sans compter les établissements cachés qui fleurissent hors de la réglementation (plateformes d'échanges, produits dérivés), si bien que le risque systémique semble plutôt se déplacer que se réduire.

Deuxièmement, en matière financière, on peut se demander s'il y a un pilote dans l'avion. Dans votre livre, vous dites justement que, lors de la prochaine crise, ce ne sont pas les banquiers, mais les hommes politiques qui seront montrés du doigt. Tout se passe comme si les régulateurs pilotaient à vue : le marché s'autorégule gentiment. Vous dites d'ailleurs également qu'on pense « qu'en régulant les banques, on régulera la finance », sauf que ce n'est pas comme cela que cela marche.

Troisièmement, on a l'impression que deux sphères coexistent désormais ; la sphère financière d'un côté, l'économie de l'autre. Cela me fait penser à cette image de la charrette tirée par des boeufs, qui transporte des missiles transcontinentaux -c'était à l'époque de l'ex-URSS - mais elle convient aussi aujourd'hui pour symboliser ce qui se passe dans la sphère financière : la grande lessiveuse de la finance plombe l'économie réelle.

La part des crédits aux entreprises dans le bilan des banques est réduite à la peau de chagrin, et c'est sans parler de la spéculation immobilière !

Prenez BNP- Paribas en 2007 : 107 milliards de fonds propres et 40 milliards de valorisation boursière, ce qui veut dire qu'elle vaut moins que ses fonds propres ! Que peut-on en déduire ?

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