Intervention de Mgr Olivier Ribadeau Dumas

Mission commune d'information Répression infractions sexuelles sur mineurs — Réunion du 12 février 2019 à 16h30
Audition des représentants de la conférence des évêques de france : mgr olivier ribadeau dumas secrétaire général et porte-parole mgr luc crépy évêque du puy-en-velay président de la cellule permanente de lutte contre la pédophilie et Mme Ségolaine Moog déléguée pour la lutte contre la pédophilie

Mgr Olivier Ribadeau Dumas, secrétaire général et porte-parole de la Conférence des Évêques de France :

Un crime sexuel est d'abord un crime et c'est avant tout devant la justice que l'auteur doit répondre de ses actes. Le lien avec Dieu est une question intime. De plus en plus nettement, nous parlons de pédocriminalité ; la dimension pénale est très forte.

J'en conviens, la prise de conscience est tardive et elle ne sera jamais achevée puisque les évêques se renouvellent : ceux qui rejoignent l'épiscopat doivent entrer dans une juste attitude. Mais tout le travail accompli par l'Église comme par la société bénéficiera à toute l'Église et toute la société. Lorsque je dis que les évêques n'ont pas regardé dans le rétroviseur, cela signifie qu'ils n'ont pas fait tout ce qu'ils devaient faire. Ils ne le faisaient pas dans le passé. J'ai en revanche la conviction profonde que quelque chose d'inexorable s'est produit. Un effet de cliquet nous empêchera de retourner en arrière.

En mars 2016, à la conférence de presse qui avait suivi l'assemblée plénière, des journalistes ont souligné que des mesures de lutte avaient été présentées en 2001, dans le même cadre. « Nous vous avions cru en 2001, disaient-ils, et nous en sommes là en 2016 : comment vous croire aujourd'hui ? »

Aujourd'hui, les victimes ont parlé, et je les en remercie, comme je remercie les journalistes, les enquêteurs, qui nous poussent à aller plus loin. L'Église est sur un chemin fort, déterminé : libération de la parole, rencontre avec les victimes, mesures déjà prises, impulsion donnée par le pape François depuis six ans - ses orientations sont fermes. Nous allons de l'avant et souhaitons que la société entière aille de l'avant.

Oui, Mme la rapporteure Vérien, l'Église paie d'avoir voulu s'immiscer dans la vie des fidèles et régenter leur activité sexuelle. Puisqu'elle s'est exprimée sur ces questions, on peut à bon droit lui reprocher des incohérences. Et tant mieux si l'ensemble de la société en bénéficie. Le pape François au demeurant invite les prêtres, les évêques, à ne pas trop s'attacher à ces questions, il est plus enclin à parler de justice sociale que de morale sexuelle et familiale...

Je comprends l'indignation de voir rester en fonctions des prêtres qui ont commis des actes graves. L'abus sexuel est également un abus spirituel grave. Pour l'opinion publique, voir un prêtre continuer à tenir le corps du Christ alors qu'il a eu des gestes incroyables et irresponsables à l'égard d'un enfant, cela est inacceptable. Des sanctions existent, le droit canon en donne l'échelle. Faut-il renvoyer de l'état clérical tout prêtre convaincu de violence sexuelle sur des enfants ? Je ne sais pas si je détiens la réponse exacte, tant les situations sont diverses. Le renvoi est l'ultime sanction ; or dans le droit civil, on ne condamne pas à la réclusion criminelle à perpétuité toute personne jugée pour crime. Il est possible aussi d'interdire à l'auteur tout contact avec des mineurs, ou tout ministère public ; on peut lui demander également de se retirer dans une vie de prière et de pénitence. Il y a toute une gamme de sanctions. Tout évêque doit communiquer les dossiers des prêtres concernés à la Congrégation pour la doctrine de la foi, qui prend en lien avec l'évêque les sanctions canoniques à l'encontre de ceux qui ont déjà reçu une sanction pénale.

J'ai été formé au séminaire français à Rome pendant six ans : tous les deux ans, une session de deux ou trois jours était consacrée aux relations affectives et sexuelles, mais je n'ai pas souvenir qu'aient été abordées les questions de pédophilie. Nous n'étions alors qu'au début des années quatre-vingt.

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