Intervention de Catherine Procaccia

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 14 février 2019 à 9h40
Audition du professeur gérard mourou prix nobel de physique 2018

Photo de Catherine ProcacciaCatherine Procaccia, sénateur :

En 2012, Bruno Sido et moi-même avons produit un rapport sur la politique spatiale européenne. Nous avons, à cette occasion, évoqué le sujet des débris spatiaux, qui ne semblait pas du tout passionner la communauté spatiale à l'époque. Nous avions proposé un mode de financement pour la recherche, en soulignant qu'un organisme mondial percevant des fonds sur les orbites, pourrait permettre de faire avancer la recherche sur ce thème. Depuis lors, un certain nombre de pays ont développé des projets, mais nous n'en connaissons pas le stade d'avancement. Votre technique, si elle voyait le jour, permettrait d'obtenir un système de laser embarqué de très petite taille quel que soit le système porteur. Dans ce cas, les débris seraient-ils entièrement détruits ?

Professeur Gérard Mourou. - Effectivement, le sujet des débris est important même si le danger n'est pas immédiat. Néanmoins, au rythme auquel sont lancés les satellites, nous nous attendons à une accélération du problème. En 2017, les Russes ont fêté à Moscou les soixante ans de Spoutnik, anniversaire auquel j'étais invité. À cette occasion, j'ai rappelé que nous avions envoyé dans l'espace l'équivalent de trois Tour Eiffel depuis soixante ans, ce que d'ailleurs personne ne conteste. Nous avons ainsi produit des déchets de toutes tailles, allant de celle d'une machine à laver au centimètre. Pour notre part, nous pourrions traiter les débris de l'ordre du centimètre. Les débris se déplacent à dix fois la vitesse des balles les plus rapides. Le concept que nous proposons vise, après détection d'un débris, à créer une ablation de ce débris avec le laser. Cette ablation s'accompagnerait d'un « effet fusée », pour changer l'orbite du débris. Après un certain temps, le débris entrerait dans l'atmosphère pour s'autodétruire.

Une autre approche consisterait à localiser précisément les débris de l'ordre du centimètre, alors que seuls les gros débris sont identifiés actuellement. Aujourd'hui, la localisation des débris est effectuée avec une précision médiocre, de l'ordre de quelques centaines de mètres. En raison de cette imprécision et pour ne prendre aucun risque, il est constamment nécessaire de changer les satellites d'orbite. Pour autant, les fausses alertes sont extrêmement nombreuses, de l'ordre du million. Après analyse, ces alertes sont ramenées à une dizaine par an. Il s'agit d'un gros problème, car le changement d'orbite consomme beaucoup de temps et d'énergie. A l'inverse, une meilleure identification des débris constituerait une avancée certaine.

Serait-il envisageable d'équiper tous les satellites d'un détecteur ?

Professeur Gérard Mourou. - Nous n'en sommes pas encore là car le système est encore quelque peu encombrant. Néanmoins, il pourrait s'agir d'une avancée importante pour la France. Si j'avais su que nous allions évoquer le sujet des débris, je vous aurais exposé la présentation qui leur est dédiée. Je suis tout à fait disposé à revenir parmi vous pour une nouvelle réunion sur ce sujet, qui me tient particulièrement à coeur. Finalement, la problématique est toujours la même : il faut mettre au point un laser efficace et de petite taille.

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