Intervention de Audrey Farrugia

Mission commune d'information Répression infractions sexuelles sur mineurs — Réunion du 20 février 2019 à 16h35
Audition de représentants de la direction de l'administration pénitentiaire du ministère de la justice

Audrey Farrugia, adjointe au sous-directeur des missions :

Merci de nous recevoir. Je vais commencer par vous donner quelques éléments de cadrage sur le parcours pénitentiaire des auteurs d'infractions à caractère sexuel (AICS), puis sur leur prise en charge médicale.

À titre liminaire, je précise qu'il n'y a pas à proprement parler de prise en charge spécifique au profit des AICS sur mineurs, mais une prise en charge des AICS au sens large.

En ce qui concerne leur parcours pénitentiaire, les AICS peuvent être orientés vers des établissements spécialisés. C'est un enjeu important et cette affectation est présentée comme prioritaire parce qu'ils sont alors pris en charge par des professionnels rompus à cet exercice. Pour autant, l'affectation des AICS dans ce type de prison peut entrer en concurrence avec d'autres principes de la détention, et notamment la nécessité de maintenir les liens familiaux. En effet, on ne compte que vingt-deux établissements de ce type sur tout le territoire national (dont un en Corse et un en outre-mer), et ils ne couvrent donc pas tous les départements.

Pour l'affectation initiale d'un AICS, on privilégiera naturellement ce type d'établissement. En revanche, en cas de changement d'affectation d'un détenu, on prendra davantage en compte les critères plus habituels de la détention, ce qui peut conduire la personne incarcérée à poursuivre son parcours pénitentiaire dans un établissement classique.

D'après les statistiques disponibles en janvier 2019, on compte 37 % d'AICS parmi les détenus dans les établissements spécialisés, contre 10 % dans le reste de la population carcérale. Il faut avoir conscience que le regroupement de ces profils dans des établissements spécialisés présente l'avantage de les préserver des stigmatisations, voire des agressions dont ils peuvent être victimes dans les prisons ordinaires.

Des programmes de prévention de la récidive sont régulièrement organisés en direction des AICS, à travers des ateliers comme des groupes de parole. L'idée est de permettre aux AICS de parler de leurs actes et de les aider à déterminer le sens de leur passage à l'acte.

Ces programmes conduits par les services d'insertion et de probation (SPIP) s'appuient souvent sur l'expertise des centres ressources pour les intervenants auprès des auteurs de violences sexuelles (CRIAVS), qui existent dans chaque région. Ces structures bénéficient d'intervenants spécialisés et du matériel pédagogique nécessaire. Elles présentent des déclinaisons diverses au niveau local. Les SPIP travaillent également sur la sortie de la détention et sur la continuité des soins, de façon à garantir un lien entre la prise en charge à l'intérieur de l'établissement et celle qui se fera ensuite à l'extérieur. C'est essentiel pour les profils « AICS ».

La loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs a mis en place le médecin coordonnateur des soins qui joue un rôle de suivi. Le suivi socio-judiciaire qui peut être imposé aux auteurs de ces infractions permet d'assurer la continuité des soins.

La prise en charge médicale relève avant tout de la compétence et de la responsabilité du ministère de la santé et des solidarités, avec lequel nous travaillons étroitement. Un protocole élaboré en 2011 rappelle le caractère prioritaire de cette prise en charge. Plusieurs circulaires ont décliné les grands axes de travail. Les établissements spécialisés dans l'accueil des AICS disposent de moyens dédiés du ministère de la santé pour les mettre en oeuvre. Pour autant, la direction de l'administration pénitentiaire n'a qu'une vision limitée de l'aspect médical et de son application concrète.

Une enquête a été réalisée en 2015 dans la perspective de l'élaboration d'une première stratégie « santé-justice », qui a abouti en 2017. Cette même enquête de 2015 a servi pour la préparation de la stratégie « santé-justice » déclinée pour la période 2019-2022 : on constate une affectation inégale des moyens selon les territoires, notamment s'agissant de la disponibilité des professionnels de santé.

Hormis ces bilans limités, nous avons peu de visibilité sur les actions menées au sens strictement sanitaire pour la prise en charge des AICS.

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