Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je salue mon cher collègue du Morbihan Jimmy Pahun, le député auteur de cette proposition de loi, ainsi que Philippe Le Gal, qui préside à la fois le comité régional conchylicole de Bretagne sud et le Comité national de la conchyliculture, le CNC.
Je commencerai par la conclusion : quel impact nous aurions si nous étions capables de voter conforme ce texte après les débats que nous allons nécessairement mener ici.
Les activités littorales agricoles et de cultures marines sont une richesse – tout le monde en convient – qu’il nous faut absolument préserver. Elles contribuent à animer les territoires. Elles valorisent nos terroirs et sont un facteur clé du tourisme et du rayonnement de nos régions. Il s’agit d’un à la fois d’un patrimoine et d’un enjeu crucial pour l’économie et l’alimentation locales.
Or ces activités sont menacées. La pression foncière sur le littoral est un facteur important de ce déclin. À titre d’exemple, depuis 2001, le comité régional conchylicole de Bretagne sud a perdu 20 % de ses concessions. De même, sur toute la France, dans le domaine agricole, seuls 200 agriculteurs parviennent chaque année à s’installer sur une commune littorale. Il y a donc urgence face à ces phénomènes. Les bâtiments conchylicoles construits sur le littoral, notamment dans la bande des 100 mètres, sont très convoités et se transforment trop souvent en habitat résidentiel secondaire. Un prix de vente qui est parfois jusqu’à dix fois supérieur pousse malheureusement nombre de propriétaires à vendre à un non-professionnel. Et je voudrais, moi aussi, faire le lien avec le niveau des retraites.
Ce sont donc des exploitations qui sont perdues, des porteurs de projet qui ne peuvent pas s’installer, alors que la moyenne d’âge des conchyliculteurs est de quarante-huit ans. On voit tout l’enjeu de la préservation par la transmission des outils existants.
Le foncier agricole, comme celui qui est dédié aux cultures marines, n’est pas un bien comme les autres. Il a un rôle crucial et stratégique pour l’intérêt général qui justifie une intervention publique et une régulation légitime du droit de propriété. À ce titre, le droit de préemption des Safer est essentiel et nécessaire. Il a à la fois un effet dissuasif sur certaines ventes et permet de casser des transactions pour maintenir la destination agricole ou conchylicole du foncier.
Cependant, on a pu l’observer sur les territoires, il peut être contourné par les propriétaires. En effet, il faut qu’une activité agricole ait été exercée dans les cinq ans précédant la vente pour que la Safer puisse agir. Cela ouvre la porte à une spéculation qui consiste à attendre cinq ans après la cessation d’activité pour réaliser la vente. À Saint-Philibert, très jolie commune du Morbihan, cela a permis à un ostréiculteur de vendre son chantier 1, 5 million d’euros à un particulier, plutôt que 100 000 euros à un autre professionnel. Et les exemples de ce type sont nombreux, sur tous les territoires littoraux.
Je remercie donc vivement et officiellement mon collègue morbihannais Jimmy Pahun de son initiative, qui vient renforcer le rôle de la Safer pour éviter de tels contournements. Son travail de fond a permis de produire un texte consensuel, qui – M. le ministre l’a souligné – a été voté à l’unanimité à l’Assemblée nationale. L’extension à vingt ans du délai pris en compte pour la préemption qui est proposée sera très certainement dissuasive pour éviter la spéculation. Cet outil pourra également préserver les activités agricoles sur les communes littorales.
Aussi, encore une fois, je regrette vivement que nous ne puissions pas voter un texte conforme à celui de l’Assemblée nationale. Mais, en bon utopiste que je suis, et cela définitivement, je ne désespère pas encore !