Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’agriculture, qui est fondamentale pour notre souveraineté alimentaire, pèse économiquement : elle représente 4 % du PIB français, avec l’agroalimentaire. Elle est aussi primordiale dans l’aménagement des territoires, s’étendant sur plus de la moitié du territoire français.
C’est également un secteur qui évolue vite. Ainsi, quelque 79 % des agriculteurs sont aujourd’hui connectés à internet et les notions de biodiversité, de préservation des écosystèmes, de stockage de carbone ou d’énergies renouvelables ne leur sont plus étrangères.
Nous le savons, les défis auxquels doivent faire face les agriculteurs sont nombreux. Parmi eux, la question foncière est essentielle. Le départ en retraite de nombreux agriculteurs, la concentration des terres, l’urbanisation à marche forcée, le difficile renouvellement des générations sont autant de constats auxquels nous devons prêter la plus grande attention. Si rien n’est fait, plus d’un tiers des exploitations agricoles aura disparu dans cinq ans.
Dans ma région, très urbanisée, l’agriculture couvre 67 % du territoire. Pourtant, le nombre d’exploitations ne cesse de diminuer : projets d’urbanisation, zones d’activités, routes, industries et grandes surfaces engloutissent irréversiblement des milliers d’hectares de champs et de pâturages. Le prix du foncier et le coût des transmissions des exploitations agricoles sont élevés.
Ce sujet doit nous interpeller, et une politique forte doit être mise en place sur le foncier agricole. C’est un actif stratégique pour l’exploitant agricole et pour l’agriculture française. Il faut le protéger, tout en assurant une fluidité nécessaire à toute activité économique.
Actuellement, et depuis le début des années quatre-vingt-dix, divers outils ont été mis en place, avec, au final, une protection des terres agricoles en mitage. Malheureusement, les intérêts de court terme prévalent trop souvent. L’enjeu est de taille : assurer la sécurité alimentaire des générations futures.
Chaque fois que nous diminuons nos espaces agricoles, nous aggravons notre dépendance alimentaire. L’Union européenne importe déjà l’équivalent de 20 % de sa surface agricole.
Même si le fonctionnement des Safer est parfois critiquable, leur rôle reste essentiel dans la préservation du foncier agricole. Dans les Hauts-de-France, où la pratique du fermage est courante, les terres sont rares et chères. Les ventes se réduisent comme peau de chagrin, et les candidats à l’installation ne trouvent pas toujours de terres à reprendre.
Le droit de préemption est un outil parmi d’autres. Il a le mérite de préserver les terres agricoles. Il doit être utilisé en complément d’autres formes de partenariat innovantes, par exemple lorsque la Safer a signé une convention avec le conseil régional des Hauts-de-France pour faciliter l’installation de jeunes agriculteurs.
Les cultures marines sont loin d’être épargnées par cette pression foncière, exploitations conchylicoles, mais aussi mytilicoles. Dans les Hauts-de-France, quinze entreprises productrices de moules se déploient sur cinquante-cinq hectares.
Le bord de mer est de plus en plus convoité, et la pression foncière est grandissante. Le renforcement de la place des cultures marines dans les territoires est un enjeu socio-économique majeur pour un grand nombre de nos départements littoraux. Il s’agit de secteurs artisanaux dont le poids économique est essentiel à l’échelle locale.
Très ancrées dans leurs territoires, ces activités jouent aussi un rôle important en matière d’aménagement du territoire et de protection de l’environnement.
Nous le savons tous, ces activités sont fragiles, soumises à de nombreux aléas et encadrées par une réglementation exigeante, à la hauteur de leurs enjeux sanitaires et environnementaux. Il est essentiel de les protéger.
La profession n’est pas restée inerte face à ces évolutions. Elle a tenté de développer des outils non contraignants pour parvenir à contenir la pression au changement de destination, notamment pour les bâtiments dévolus aux cultures marines.
Les démarches des acteurs de la filière ont besoin d’être soutenues, notamment sur le plan législatif. Le dispositif introduit par la proposition de loi permet aux Safer d’exercer leur droit de préemption lorsque les bâtiments ont eu un usage agricole au cours des vingt années précédant leur vente, contre cinq actuellement.
Le délai apparaît suffisamment dissuasif pour réduire les contournements mis en œuvre aujourd’hui afin d’échapper au droit de préemption des Safer.
La proposition de loi a deux mérites : d’une part, elle renforce la protection du littoral ; d’autre part, elle stabilise et protège les activités agricoles et les cultures marines en zone littorale en étendant les pouvoirs de préemption des Safer.
Les sénateurs du groupe Les Indépendants – République et Territoires soutiendront donc cette proposition de loi qui entend renforcer les moyens d’action des Safer. Plus généralement, il sera primordial de se pencher sur l’efficience de celles-ci dans leurs missions de développer les outils de soutien à l’installation et le renouvellement des générations pour préserver notre agriculture, notamment en leur facilitant l’accès au foncier.