Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, c’est la seconde fois en quelques semaines que le Sénat examine une proposition de loi en lien avec la sécurité civile.
La dernière était la proposition de loi, prise sur l’initiative de notre collègue Catherine Troendlé, relative à la représentation des personnels administratifs et techniques au sein des conseils d’administration des services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS. J’en étais déjà le rapporteur.
Cela démontre, s’il le fallait, l’attachement profond de notre assemblée à ces sujets centraux. Je pense que, sur toutes les travées de cet hémicycle, nous avons à cœur d’améliorer les conditions de travail des sapeurs-pompiers chaque fois que c’est possible.
À cet égard, la proposition de loi déposée par notre collègue Patrick Kanner s’inscrit exactement dans cette perspective. Je veux donc le remercier d’avoir porté notre regard sur le problème particulièrement préoccupant de la sécurité des sapeurs-pompiers.
En tant que chambre des territoires, nous ne pouvons pas ignorer l’augmentation intolérable des agressions dont ils sont victimes, qu’ils soient fonctionnaires territoriaux au sein de nos SDIS ou sous statut militaire à Paris ou Marseille.
Depuis 2008, le nombre d’agressions déclarées a plus que triplé, ce qui est parfaitement inadmissible. Ces agressions mettent non seulement en danger nos sapeurs-pompiers, mais elles mettent également en péril l’attractivité de toute une profession.
Face à ce constat, la proposition de loi initiale de Patrick Kanner visait à faciliter le dépôt de plainte des sapeurs-pompiers agressés. Pour cela, elle tendait à rendre ce dépôt anonyme afin de prémunir le sapeur-pompier victime d’éventuelles représailles de la part son agresseur.
Certes, l’idée de renforcer la protection des sapeurs-pompiers était bonne, mais le dispositif choisi pour le faire portait une atteinte trop importante aux droits de la défense, tels qu’ils sont conjointement garantis par notre Constitution et la Convention européenne des droits de l’homme.
Les auditions que j’ai conduites et auxquelles Patrick Kanner a participé nous l’ont confirmé. Des raisons identiques avaient d’ailleurs conduit le Sénat à ne pas adopter un dispositif relativement similaire lors de l’examen du projet de loi « Justice », il y a à peine quelques semaines.
Dans ce contexte, la commission des lois a fait preuve de sagesse et de pragmatisme. Ne pouvant adopter un texte qu’elle savait par trop attentatoire aux libertés fondamentales, elle n’a pas retenu la proposition de loi dans son écriture initiale. Mais ne pouvant rester indifférente au problème capital que cette proposition de loi soulevait, elle a également souhaité y apporter une réponse.
Cette réponse comporte deux aspects.
Le premier est législatif. Avec l’accord de Patrick Kanner, la commission des lois a substitué un nouveau dispositif à celui qui était initialement prévu par sa proposition de loi. Il tend à faciliter l’anonymat non plus des victimes, mais des témoins d’agressions de sapeurs-pompiers.
Cet anonymat est actuellement prévu par le code de procédure pénale pour les témoins de crimes ou de délits punis de plus de trois ans de prison. Le texte que nous examinons permettrait le recours à cette procédure pour toute infraction, dès lors qu’elle est commise sur un sapeur-pompier. Elle viserait ainsi l’ensemble des agressions dont ils sont victimes, même les plus mineures, comme l’outrage.
Le second aspect de la réponse fournie par la commission des lois est prospectif. Afin de compléter les effets de la présente proposition de loi, elle a acté la mise en œuvre d’une mission d’information en son sein. Je tiens à remercier le président Philippe Bas d’avoir accédé à cette demande. Elle permettra d’analyser tous les aspects du problème complexe soulevé par la sécurité des sapeurs-pompiers, de faire le point sur l’efficacité des dispositifs existants et de proposer des solutions efficaces pour endiguer ces agressions insupportables.