Intervention de Olivier Henno

Commission des affaires sociales — Réunion du 6 mars 2019 à 8h30
Proposition de loi visant à favoriser la reconnaissance des proches aidants — Procédure de législation en commission article 47 ter à 47 quinquies du règlement - examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Olivier HennoOlivier Henno, rapporteur :

Je veux d'abord saluer Mme Jocelyne Guidez, auteur de cette proposition de loi. Nous connaissons la constance de son engagement pour la reconnaissance des proches aidants et la passion qui l'anime sur ce thème comme sur d'autres.

La navette parlementaire a été riche en péripéties. Le 25 octobre 2018, le Sénat adoptait à l'unanimité un texte ambitieux et innovant qui, sur un sujet qui n'avait jusqu'alors été abordé que par petites touches. Si nous ne découvrions pas les proches aidants, nous leur consacrions enfin un débat parlementaire.

Les proches aidants, nous en connaissons tous et nous le sommes parfois nous-mêmes. Considérer qu'ils sont un prolongement logique de la solidarité familiale, c'est oublier ce qu'ils apportent à la société et cet apport justifie de faire jouer la solidarité nationale à leur égard.

Aussi notre collègue avait-elle, à l'article premier, comblé une lacune de la loi relative à la liberté de choisir son avenir professionnel, en inscrivant la conciliation de la vie personnelle et de la vie professionnelle de l'aidant dans le champ des négociations collectives d'entreprise. À l'article 2, elle avait proposé que le congé de proche aidant, instauré par la loi portant adaptation de la société au vieillissement, soit indemnisé. Cette disposition, au coeur du texte initial, ne visait pas seulement à donner à l'aidant des moyens financiers mais aussi à le reconnaître comme relais de la solidarité nationale. Les articles 3 et 4 prévoyaient une harmonisation du régime de retraite des aidants sur celui des personnes ayant temporairement ou définitivement interrompu toute activité professionnelle pour soutenir un proche en fin de vie. L'article 5 étendait aux fonctionnaires la possibilité du relayage ouverte par la loi pour un État au service d'une société de confiance. Enfin, l'article 6 étoffait le dispositif d'information de l'aidant et établissait, par divers moyens, plus solidement le duo aidant/aidé aux yeux de ses interlocuteurs administratifs ou de santé.

Notre débat en séance n'avait pas tant porté sur le fond que sur le calendrier. Selon le Gouvernement, mieux valait traiter le sujet ultérieurement, dans d'autres textes, après la conclusion des grandes concertations nationales sur la prise en charge de la dépendance et sur l'avenir de notre système de retraite.

Le 6 décembre 2018, des députés, au cours de la discussion générale, ont exprimé leur incompréhension devant ce refus de légiférer sur un sujet sociétal de première importance pour des raisons essentiellement calendaires. La motion de renvoi en commission que le groupe majoritaire a déposée n'a pas été adoptée, à l'égalité des suffrages exprimés. J'y vois le signe que le Parlement, quand l'urgence et l'importance du sujet le justifient, sait s'affranchir de toute contingence et prend la pleine mesure de sa mission. La discussion du texte a bien eu lieu mais, comme l'on devait s'y attendre, la plupart des articles ont été supprimés. Revient donc devant nous une proposition de loi largement amputée, réduite aux articles premier et 5, adoptés conformes.

Dans ces circonstances, fallait-il renvoyer aux députés un texte à la hauteur de nos ambitions ? Il est à peu près certain qu'alors, il n'aurait jamais été inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Nous avons préféré engager avec le Gouvernement un travail partenarial, dont je salue la qualité. Nous avons convenu que les articles 2, 3 et 4, les plus emblématiques du texte, étaient partagés dans leur principe mais n'étaient pas compatibles avec le rendu des travaux des grandes concertations nationales en cours. L'engagement de madame la ministre, réitéré à l'Assemblée nationale, de donner ultérieurement corps à nos propositions, sous une forme plus appropriée, nous a finalement convaincus d'accepter leur suppression.

Cependant, notre assemblée, qui s'est montrée pionnière sur ce sujet, ne pouvait se satisfaire d'un résultat aussi limité. C'est pourquoi, après avoir dialogué avec le Gouvernement, je vous proposerai deux amendements afin d'obtenir une amélioration rapide et effective de la vie des aidants. Le premier consiste à rationaliser le financement des actions spécifiques aux aidants, actuellement compliqué par une dualité des intervenants - la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie et la conférence départementale des financeurs. Avec le second amendement, l'aidant verra son nom inscrit au dossier médical partagé de la personne aidée ; il sera ainsi mieux identifié par les professionnels de santé.

Par ce texte ainsi modifié, que l'Assemblée nationale, à n'en pas douter, approuvera, nous réaffirmerons l'importance et la qualité de l'initiative parlementaire en ces temps de contestation.

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