Intervention de Éric Bocquet

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 20 février 2019 à 9h15
Dette des entités publiques — Audition pour suite à donner à l'enquête de la cour des comptes

Photo de Éric BocquetÉric Bocquet :

Ce sujet nous passionne, tant il est essentiel dans le débat public depuis quelques décennies maintenant. Avec la dette, on est sûr d'être toujours dans l'actualité !

Un article des Échos du lundi 18 février 2019 titrait : « Et si la dette publique était un faux problème ? ». Je cite l'auteur de l'article, M. Vittori : « Les taux d'intérêt à long terme sont encore aujourd'hui étrangement bas ». Je m'interroge sur cette formulation. Dans le corps de l'article, on trouve également une citation de M. Olivier Blanchard, ancien chef économiste du FMI, qui affirme : « Si la dette publique est nuisible, elle n'est pas catastrophique. Elle peut être utilisée, mais à bon escient ».

On voit que ce sujet de la dette est un sujet politique et non pas strictement comptable. Pascal Savoldelli a raison : on ne parle pas de recettes dans votre rapport, que j'ai lu avec beaucoup d'attention. Vous l'avez dit vous-même : il y a deux sujets importants, la dépense et la dépense.

Un bébé est né ce matin. Il est endetté à 32 000 euros à cause de ses parents, qui ont voulu les 35 heures, de ses grands-parents, qui ont voulu la sécurité sociale, et de ses arrière-grands-parents, qui ont voulu les congés payés ! La France vit au-dessus de ses moyens : nous ne pouvons plus financer notre modèle social ! Voilà la doxa officielle...

Deuxième remarque : vous semblez avoir du mal à cerner la réalité de cette dette - et vous le dites. Les termes sont assez intéressants. Vous parlez de « lacunes », de « recensement imparfait », d'« informations éparses », de « méthodes fluctuantes », de « périmètre mal défini », d'« informations partielles », etc.

Cela m'étonne par rapport au fait que, chaque année, quand on commence l'examen du projet de loi de finances, c'est d'abord le dogme de la dette qui est posé, incontestable, irréfutable, pierre absolue qui doit guider nos réflexions et nos choix budgétaires. Je m'étonne un peu de ce décalage entre la difficulté que vous avez à cerner les choses et cette réalité qu'on affirme chaque année depuis maintenant 45 ans : la dette, la dette, la dette, comme le poumon du médecin de Molière !

J'aimerais par ailleurs savoir avec quels établissements travaille l'Agence France Trésor. Comment sont sélectionnés les établissements bancaires avec lesquels vous traitez, ceux qui sont chargés de gérer la dette, les obligations de l'État ? Je pense à certaines banques à qui l'on confie parfois cette mission. Il y aurait matière à discussion à ce sujet.

La France va emprunter 200 milliards d'euros cette année, un peu plus que ce qui était prévu. C'est le programme de dette le plus important de l'histoire de notre pays, d'après ce que j'ai pu lire. Nos créanciers sont-ils devenus fous ou sommes-nous complètement irresponsables ? Peut-on imaginer qu'une banque prêterait à un client à découvert de l'argent pour acheter un nouveau véhicule ?

Les taux d'intérêt négatifs ont donné lieu, il y a quelques années, à des primes d'émission que le budget de l'État a pu récolter grâce à ces taux négatifs. On remboursait les coupons plus chers qu'on ne les achète aujourd'hui. Fin 2016, on avait récolté 73 milliards d'euros de primes d'émission, dont 52 milliards d'euros avaient été mis de côté pour le futur. La Cour des comptes a réalisé un audit des finances publiques en juin 2017. Vous en parliez alors. Ce chiffre était de 20,8 milliards d'euros en 2016 et de 22,7 milliards d'euros en 2015. Comment ces sommes sont-elles utilisées dans le budget de l'État ? Le Parlement, à ma connaissance, ne dispose pas de cette information. Pourriez-vous nous éclairer à ce sujet ?

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