Intervention de Patrick Chaize

Réunion du 7 mars 2019 à 15h00
Nationalisation des sociétés concessionnaires d'autoroutes — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Patrick ChaizePatrick Chaize :

Je rappelle que notre commission n’a pas adopté cette proposition de loi. En effet, contrairement à son titre, son objet ne porte que sur la nationalisation des sociétés concessionnaires d’autoroutes : comme mon collègue Jean-Pierre Grand le rappelle dans son amendement, l’affectation des dividendes à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France est une affirmation de principe sans aucun fondement législatif.

S’agissant de l’exposé des motifs, je peux m’associer à nombre de postulats qui y sont formulés.

Je souscris à l’insécurité engendrée par les privatisations sur les ressources de l’Afitf. Je souscris à l’analyse qui est faite sur l’utilisation du produit de la vente, produit qui a été utilisé en vue du désendettement de l’État. Je souscris à l’analyse relative au gel des tarifs décidé en 2015. Je souscris enfin à l’analyse sur la rentabilité financière des sociétés concessionnaires, analyse adossée au rapport de la Cour des comptes de 2013 et à l’avis de l’Autorité de la concurrence de 2014.

Je rappelle au passage que ces deux institutions n’ont pas exactement la même appréciation. Je ne compte pas entrer dans le débat sur le rachat des contrats de concession, car telle est la question en dernier ressort de ce texte. Encore une fois, je comprends la démarche intellectuelle qui consiste à dire que l’exercice politique ne doit pas systématiquement conduire à l’impuissance publique, mais je ne veux pas entrer dans un débat sur l’évaluation économique d’une opération de rachat que les auteurs de la proposition de loi et que plusieurs d’entre nous évaluent entre 28 et 50 milliards d’euros et que le Sénat évaluait, pour sa part, entre 30 et 40 milliards d’euros.

Je pense ici au groupe de travail de 2014 sur les sociétés concessionnaires d’autoroutes présidé par nos collègues Louis-Jean de Nicolaÿ et Jean-Jacques Filleul, dont j’ai eu l’honneur de faire partie avec notre collègue Évelyne Didier, qui était membre du groupe CRCE. À l’époque déjà, nos analyses étaient convergentes.

Je ne souhaite pas non plus alimenter un débat sur l’état de la jurisprudence en matière de libéralités. Compte tenu de l’ampleur de l’opération, nous avancerions en plein brouillard.

La position de notre groupe est simple. Nous en avons fait part en commission voilà maintenant deux semaines. Elle est parfaitement cohérente avec celles que nous avons précédemment exprimées lors de la table ronde sur l’état des infrastructures routières et autoroutières du 8 février 2017, organisée par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, lors des conclusions du groupe de travail de notre commission sur les sociétés concessionnaires d’autoroutes le 17 décembre 2014, et même lors de l’examen de la proposition de loi relative à la nationalisation des sociétés concessionnaires d’autoroutes et à l’affectation des dividendes à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France déposée le 25 octobre 2011 et rejetée par le Sénat le 19 juin 2014.

Nous sommes hostiles au rachat des contrats de concession existants, mais une fois que ces concessions seront arrivées à échéance, dans les années 2030, nous voulons que l’État puisse étudier l’ensemble des possibilités qui s’offriront alors à lui.

Doit-il conserver un régime concessionnaire en introduisant des garanties, comme celles qu’a proposées le groupe de travail précité, en mettant fin à la pratique des contrats de plan, en abaissant le seuil de mise en concurrence des marchés de passation de travaux ou en élargissant les compétences de l’Arafer ? Si de telles garanties ne peuvent être apportées, pourquoi l’État ne reprendrait-il pas la main ?

En tout cas, il ne faudra rien s’interdire. La politique étant l’art du choix, cela tombe très bien !

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