Intervention de Didier Marie

Commission des affaires européennes — Réunion du 7 mars 2019 à 9h35
Transports — Travailleurs détachés dans le secteur des transports : rapport d'information proposition de résolution européenne et avis politique de mme fabienne keller et m. didier marie

Photo de Didier MarieDidier Marie, rapporteur :

Sur le transport routier, nous devons avoir quatre lignes rouges. Sans revenir sur la liberté de circulation, nous devons nous opposer à la libéralisation du cabotage. Cela fait l'objet d'une divergence entre le Conseil et une partie du Parlement. Le vote du texte a été repoussé au Parlement. Même s'il était voté aujourd'hui, les divergences avec le Conseil font que son adoption définitive prendra du temps. Seule la partie cabotage a été validée par le Parlement.

Deuxième ligne rouge, nous devons refuser la flexibilisation du temps de repos. Troisièmement, nous devons refuser le repos en cabine - les pays de l'Est aimeraient en effet que leurs salariés ne soient pas obligés de rentrer chez eux ou d'aller à l'hôtel. Enfin, nous devons refuser d'exclure le transport routier des règles du détachement.

Les divergences observées ne sont pas politiques mais nationales : les députés des pays où le transport routier est une part importante du PIB - Pologne, Roumanie, Bulgarie - s'opposent à ceux des pays comme la France, où ce secteur s'est effondré.

Il est possible de lutter contre la fraude dès aujourd'hui. L'Office central s'ingénie à démonter des circuits, même si les fraudeurs ont beaucoup d'imagination, à travers la sous-traitance et les fausses domiciliations, pour contourner les règles du détachement. Ce qui manque, ce sont les contrôles sur pièces et sur place, faute d'éléments techniques.

L'Irlande joue ouvertement la concurrence déloyale dans le domaine du transport aérien. Rappelons au préalable que le pilotage d'un avion possède des caractéristiques propres dont la maîtrise du manuel d'exploitation qui vise tout à la fois les caractéristiques techniques d'un appareil et les procédures spécifiques à chaque compagnie. Il ne peut donc exister de pilote indépendant. Or si le droit français interdit aux compagnies d'aviation de procéder au recrutement de pilotes indépendants, le droit irlandais ne prévoit aucune interdiction en la matière, le statut d'indépendant bénéficiant de manière générale d'incitations fiscales. Ce qui offre à Ryanair des avantages en termes de coûts très importants. Un biais pour réduire la portée du recours aux indépendants pourrait être le lancement d'une procédure devant la Cour de justice de l'Union européenne afin de lui faire constater que les incitations fiscales irlandaises peuvent être assimilées à une aide d'État. C'est un vrai sujet à aborder dans les discussions entre États membres, sujet qui pourrait être étendu à d'autres secteurs tel que le numérique.

Les fraudes dans le secteur aérien sont diverses et les compagnies low cost ne manquent pas d'imagination. Ryanair procède à un contournement institutionnalisé des règles grâce au soutien de l'Irlande. Elle a été condamnée, notamment en France. D'autres compagnies, dans les pays de l'Est, mettent en place des techniques incroyables comme le Pay to fly : pour voler sur certaines grandes compagnies, les pilotes ont besoin d'avoir cumulé 1 000 ou 1 500 heures de vol ; les compagnies low cost leur demandent de payer pour atteindre ce quota. Récemment, il y a un peu moins de pilotes disponibles et plus de tension sur le marché du travail, ce qui réduit le phénomène. Mais lisez le rapport, il comporte des exemples savoureux...

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