Intervention de Didier Blanchet

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 13 mars 2019 : 1ère réunion
Situation et perspectives de l'économie française — Audition commune de Mme Agnès Bénassy-quéré professeur d'économie à l'université paris 1 panthéon-sorbonne et Mm. Didier Blanchet directeur des études et synthèses économiques de l'institut national de la statistique et des études économiques insee et éric heyer directeur du département analyse et prévision de l'observatoire français des conjonctures économiques ofce

Didier Blanchet, directeur des études et synthèses économiques de l'Insee :

D'une crise à l'autre, on distingue quelques tendances. Les effets sur le PIB provoqués par les crises de 1975 et 2009 sont comparables, mais ont été plus fortement ressentis en 2009. En 2009, le rebond du taux de marge des entreprises a été plus rapide. Le pouvoir d'achat des ménages a d'abord bien résisté mais a globalement stagné depuis dix ans.

Ainsi, le pouvoir d'achat du revenu disponible brut (RDB) global a bien résisté puis s'est mis en phase avec reprise de la croissance du PIB ; en revanche, rapporté au niveau individuel - le pouvoir d'achat du RDB par unité de consommation - il n'est revenu qu'en 2017 à son niveau de 2007.

J'aborderai maintenant les perspectives à court terme, qui feront l'objet de la prochaine note de conjoncture de l'Insee à paraître le 19 mars. Depuis la dernière note, en décembre 2018, la conjoncture n'a pas significativement évolué. Après le retour à une meilleure performance en 2017, 2018 a été moins dynamique. Le regain temporaire d'inflation et un profil infra-annuel chahuté pour les prélèvements et les transferts ont pesé sur le ressenti du pouvoir d'achat et de la consommation, ainsi que sur le climat général des affaires. Les stimulations annoncées en 2019 devraient profiter à la consommation et à la croissance.

Le climat des affaires reste au-dessus de sa moyenne, malgré un récent décrochage. Pour les ménages, la confiance a décroché depuis fin 2017, avec une accélération en décembre 2018, avant de repartir.

Le regain d'inflation de 2018 est surtout dû à la hausse du prix de l'énergie : alors que l'inflation sous-jacente tend vers 1 %, l'inflation observée a connu un passage en tendance à 2,3 %.

L'Insee avait anticipé dans sa note de décembre 2017 un décrochage du pouvoir d'achat au premier trimestre 2018, qui s'est vérifié sous les effets combinés des mesures fiscales et des hausses des prix de l'énergie. Notre prévision d'un retour à la hausse du pouvoir d'achat au cours de l'année s'est également révélée correcte, mais elle ne s'est pas répercutée dans la consommation. Dans la note de décembre 2018, nous avons prévu une nouvelle hausse, en tenant compte des mesures d'urgence annoncées à la mi-décembre et d'une diminution assez progressive du taux d'épargne.

La croissance a été de 2,3 % en 2017, de 1,5 % en 2018. Nous avons anticipé une croissance de 0,3 % au premier trimestre et 0,4 % au deuxième, avec un acquis de croissance de 1 % pour 2019, si la croissance devait s'interrompre aux deux derniers trimestres. Dans une hypothèse de prolongation de la croissance de 0,4 % sur les trimestres 3 et 4, la croissance atteindrait 1,3 %, légèrement au-dessus de la moyenne européenne. Il est difficile de se prononcer sur la durabilité de ce phénomène. À court et à long terme, les incertitudes et les problèmes structurels persistent, notamment en raison de l'étroitesse des marges de manoeuvre budgétaires et du déficit de compétitivité.

Enfin, le contexte international est particulièrement brouillé. Le climat des affaires mondial est en repli. La zone euro a décroché et fait face à une forte augmentation des tensions sur l'offre. La part des entreprises qui déclarent des difficultés à produire davantage, soit faute de main d'oeuvre, soit faute d'équipement, est très élevée. Le premier facteur est passé devant le second, en France comme en Allemagne.

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