Intervention de Agnès Saal

Mission commune d'information Répression infractions sexuelles sur mineurs — Réunion du 13 mars 2019 à 14:5
Audition de représentantes du ministère de la culture

Agnès Saal, haute fonctionnaire à l'égalité, à la diversité et à la prévention des discriminations :

Merci de cette occasion que vous nous offrez à toutes deux de vous exposer le point de vue et la démarche du ministère de la culture. Florence Touchant, dans un moment, vous présentera l'action spécifique de la DGCA, notamment dans le champ de l'enseignement, dont elle a la charge.

Je commencerai mon propos en vous exposant un point de vue plus global, qui implique la totalité des services du ministère de la culture, dans toutes ses dimensions, puisque nous avons engagé, voilà maintenant environ deux ans, une action très ambitieuse et déterminée en matière de prévention des risques de discrimination de toute nature dans le but de promouvoir non seulement la diversité, mais également l'égalité entre les femmes et les hommes. Cette démarche nous a permis d'obtenir les deux labels de l'Afnor « diversité » et « égalité ». À la faveur de la politique que nous avons mise en place pour obtenir ces deux labels, nous avons enclenché toute une série de démarches, qui nous ont permis de nous outiller de façon beaucoup plus rigoureuse et efficace que par le passé.

En effet, cette démarche de prévention des discriminations, d'égalité entre les femmes et les hommes, mais également de prévention des risques de violence et de harcèlement sexuels et sexistes, pratiques malheureusement assez fréquentes et répandues dans l'ensemble de nos secteurs, nous a poussés à nous intéresser, en interne, aux équipes du ministère de la culture, de ses opérateurs publics, des services à compétence nationale, mais également à la manière de nous prémunir mieux que précédemment contre tous les risques de discrimination au sens large dans l'ensemble des politiques culturelles.

Nous avons porté un regard particulièrement attentif sur nos écoles d'art, d'architecture, la FEMIS dans le domaine du cinéma, les deux conservatoires nationaux supérieurs de musique et de danse de Paris et de Lyon, qui relèvent directement de la tutelle du ministère de la culture. Il nous a semblé indispensable de faire en sorte que l'ensemble de ces établissements - on en compte 99, qui représentent entre 35 000 et 37 000 étudiantes et étudiants - soit bien mieux outillé pour faire prévaloir l'égalité et la non-discrimination dans le cadre des enseignements, les équipes pédagogiques et administratives, mais également à l'égard des étudiantes et des étudiants.

On sait pertinemment que les stéréotypes de genres, tout comme ceux liés à l'orientation sexuelle, à l'origine ethnique, sociale, au lieu de résidence ou d'autres critères encore, comme le handicap, l'état de santé, sont encore aujourd'hui véhiculés dans la manière même dont on conçoit des parcours pédagogiques. Si, dans nos établissements d'enseignement, on constate que les filles sont majoritaires - elles représentent à peu près 60 % des élèves - il n'en reste pas moins que le taux d'évaporation est ensuite considérable, puisqu'on ne les retrouve dans les métiers auxquels préparent ces écoles qu'à hauteur de 30 %, 35 %, voire 40 %.

Lorsque nous avons outillé nos établissements d'enseignement supérieur de fiches juridiques, d'outils de signalement des situations de harcèlement ou de violences sexuelles et sexistes, nous nous sommes rendu compte qu'il existait une chape de plomb sur le sujet et qu'en parallèle, la parole, pour autant qu'elle s'exprime, n'était guère entendue.

Depuis maintenant deux ans environ, nous avons mis à disposition de l'ensemble des équipes de direction et des écoles tout un outillage juridique, une cellule d'écoute, d'alerte et de traitement des situations de discrimination, de violence et de harcèlement sexuel et sexiste. Nous avons mené une politique déterminée, que le ministre Franck Riester, comme Françoise Nyssen à l'époque, ont mené avec détermination pour appliquer une politique de « tolérance zéro » à l'égard de toutes les dérives que nous constatons.

Il se trouve que, dans mes fonctions de haute fonctionnaire à l'égalité et à la diversité, je suis saisie de façon extrêmement fréquente, une à deux fois par semaine au moins, la plupart du temps par des directions d'établissements d'enseignement qui signalent des faits répréhensibles, et qui ont besoin d'un accompagnement pour traiter chacun des cas signalés.

J'émettrais toutefois un bémol par rapport à l'objet même de cette mission : les cas qui nous sont remontés par les cellules Allo Discrim, Allo sexisme ou directement concernent des étudiantes et des étudiants majeurs. Pour autant, il nous semble que cet outil peut servir à d'autres, comme l'Opéra national de Paris et son école de danse. C'est l'un des établissements qui a accepté de postuler aux deux labels et qui les a obtenus. Il s'est montré particulièrement sensible aux difficultés particulières que les élèves pouvaient rencontrer soit dans le corps de ballet - dont la presse s'est fait l'écho voilà quelques mois -, soit à l'école de danse. L'outillage que nous avons mis à sa disposition nous semble constituer un certain garde-fou, même s'il n'est pas totalement efficace.

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