Intervention de Bruno Retailleau

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 6 mars 2019 à 17h35
Situation des chrétiens d'orient et des minorités au moyen-orient — Audition de M. Jean-Yves Le drian ministre de l'europe et des affaires étrangères

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau, président :

Merci au ministre de l'Europe et des affaires étrangères d'avoir réservé ce temps pour nous entretenir de la situation actuelle des chrétiens et des minorités au Moyen-Orient. Ce n'est pas la première fois qu'il répond à une invitation conjointe entre notre groupe et la commission des affaires étrangères : sa venue et son soutien à cette cause témoignent de la responsabilité historique de la France, responsabilité qui a traversé tous les régimes et a été réaffirmée par tous les gouvernements de la Ve République.

Elle emporte une double exigence : à l'égard de ces pays, comme l'Irak, touchés ces dernières années par de grandes fractures, par la crise entre les chiites et les sunnites, par les luttes d'influence entre l'Iran et l'Arabie Saoudite ; et à l'égard de la France, car ce qui se passe là-bas a des répercussions sanglantes ici.

Nous sommes à un moment charnière : vous étiez en Irak, monsieur le ministre, il y a quelques mois ; notre pays a reçu ces jours derniers la visite du nouveau président irakien - d'origine kurde ; et le Président de la République se rendra en Irak prochainement. Surtout, ces dernières heures s'est jouée la fin territoriale de l'État islamique - ce qui n'éradique pas totalement Daech, ni sa capacité de projection terroriste, ni son idéologie.

Dans cet après-défaite, où en est la sécurité de l'Irak ? Question importante car elle conditionne le retour des personnes déplacées, appartenant aux minorités maltraitées, en particulier à la plus maltraitée, au point que l'on peut parler à son sujet de crime contre l'humanité ou de génocide : les yézidis. À l'initiative de Mme Deromedi, nous avons entendu le témoignage de Ramia Daoud Ilias, 17 ans, prisonnière de Daech depuis l'âge de 12 ans, esclave sexuelle comme 3 000 femmes ou filles yézidies encore détenues dans des conditions abominables. L'Allemagne s'est positionnée sur des programmes de reconstruction psychologique pour les femmes traumatisées. La France peut-elle se positionner également ?

La reconstruction doit d'abord être politique : pour éradiquer Daech, il faut éradiquer les causes qui ont favorisé son essor. Cela passe par un gouvernement inclusif. Monsieur le ministre, vous avez eu l'occasion d'en discuter avec le nouveau gouvernement d'Haïder al-Abadi, qui présente des garanties à cet égard. Il a par exemple décidé que le 24 décembre serait un jour férié, ce qui est un signe encourageant - il y en a eu d'autres. La reconstruction politique est engagée.

Pour la reconstruction matérielle, l'Europe, la France doivent être au premier rang. Notre pays a promis 4 milliards d'euros sur quatre ans. Cette aide sera-t-elle efficace ? Il faut absolument éviter qu'elle aille alimenter des réseaux de corruption. Du reste, le nouveau gouvernement a été désigné au terme d'une campagne largement axée sur cette question ; et le résultat des élections législatives a été une surprise, le peuple irakien a choisi une coalition se réclamant de la lutte anti-corruption.

Il y a enfin la justice : je vous renvoie à notre résolution européenne qui lie reconstruction durable et réconciliation. Des sociétés qui ont connu le pire, qui ont été fracturées, peuvent-elles trouver la concorde civile sans processus de justice transitionnelle ? Les Irakiens sont souverains, et la justice ne saurait leur être imposée d'ailleurs. Mais une chose est sûre : la justice doit passer avant que les preuves et les bourreaux disparaissent. L'Afrique du sud, le Cambodge offrent de grands exemples.

Quant à l'Égypte, quelle est votre analyse de la situation des coptes ? Ils ont été victimes de plusieurs attentats ces derniers temps. Nous avons soutenu l'initiative de M. Fabius et la conférence de Paris. Une réunion internationale dans ce cadre se tiendra à nouveau à Paris en septembre prochain, nous y serons présents.

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