Nous examinons ce matin le projet de loi autorisant l'approbation des accords entre la France et la République dominicaine, d'une part, et la France et le Nicaragua, d'autre part, relatifs à l'emploi des membres des familles des agents des missions officielles.
Notre commission a étudié l'an dernier trois projets de loi autorisant l'approbation d'accords similaires avec quatre pays d'Amérique latine - la Bolivie, le Chili, l'Équateur et le Pérou -, trois pays européens - l'Albanie, la Moldavie et la Serbie - ainsi que deux États africains - le Bénin et le Congo.
Ces accords s'inscrivent dans la stratégie intitulée « Ministère du XXIe siècle » lancée par le ministre des affaires étrangères en 2015, avec l'objectif de moderniser et de rendre plus agile le Quai d'Orsay. L'une des finalités du volet consacré au personnel consiste à tripler le nombre de conventions bilatérales permettant aux conjoints des agents en mission officielle à l'étranger d'avoir accès au marché du travail local, sans préjudice de leur statut diplomatique ou consulaire et de certaines immunités qui leurs sont accordées par les conventions de Vienne de 1961 et 1963.
Avant 2015, une douzaine d'accords avaient été conclus, soit sous la forme d'accords bilatéraux comme ceux que nous examinons aujourd'hui, soit sous la forme de notes verbales, juridiquement non contraignantes. Depuis 2015, la France a signé une vingtaine d'instruments de ce type.
En vertu du principe de libre circulation des travailleurs, des facilités existent au sein de l'Espace économique européen qui réunit 31 États, mais pas dans la plupart des pays situés hors des frontières de l'Union européenne.
D'après une étude conduite fin 2017, environ 250 conjoints d'agents français résidant dans le pays d'affectation ont obtenu une autorisation de travail ou travaillaient sans avoir besoin d'autorisation. Près du tiers des bénéficiaires d'autorisations de travail exerçaient leur activité au sein du réseau français à l'étranger : ambassades, consulats, établissements culturels ou d'enseignement, etc.
Au total, quelque 3 000 familles d'agents publics seraient concernées par le bénéfice de ce dispositif, pour l'essentiel des conjoints de fonctionnaires du Quai d'Orsay, auxquels s'ajoutent les conjoints d'agents issus d'autres administrations, en particulier les ministères de la défense et de l'économie et des finances.
Il ressort de cette même enquête que ces dispositifs profitent davantage aux agents français établis à l'étranger que l'inverse. En effet, seule une vingtaine de conjoints d'agents diplomatiques étrangers résidant en France s'est vu délivrer une autorisation de travail en 2016 et 2017.
Les accords que nous examinons aujourd'hui résultent donc de négociations initiées par la France. Ils ont été conclus avec deux pays de la zone Amérique centrale-Caraïbes et poursuivent le même objectif : permettre, sur la base de la réciprocité, aux membres des familles des agents diplomatiques ou consulaires de solliciter une autorisation d'emploi pendant toute la durée d'affectation de ces agents dans les pays cocontractants. Cela participera d'une meilleure conciliation de leur vie privée et de leur vie professionnelle.
Les accords s'appliqueront aux membres de la famille de l'agent ayant obtenu la délivrance d'un titre de séjour spécial par le ministère des affaires étrangères de l'autre partie. Les principaux bénéficiaires seront les conjoints des agents des missions officielles, c'est-à-dire leurs époux ou partenaires légaux tels que définis par la législation du pays d'accueil ; je souligne à cet égard que les parties dominicaine et nicaraguayenne ne reconnaissent pas l'union entre personnes du même sexe. L'accord avec le Nicaragua pourra également bénéficier aux enfants des agents âgés de 18 à 21 ans.
Les procédures de demande d'autorisation de travail sont détaillées dans les accords : toute demande doit être transmise par la mission officielle au protocole du ministère des affaires étrangères de l'État d'accueil, qui doit également l'aviser de l'obtention d'un emploi. En cas de changement d'employeur, l'accord avec le Nicaragua précise qu'une nouvelle demande doit être établie. Les bénéficiaires d'une autorisation de travail doivent naturellement se conformer à la législation fiscale et sociale de l'État d'accueil, en particulier lorsqu'ils exercent des professions réglementées. Il leur est interdit de poursuivre l'exercice de leur emploi après la fin de la mission officielle de l'agent de leur famille.
Enfin, les immunités civiles ou administratives cessent de s'appliquer pour les personnes concernées dans le cadre de leur nouvelle activité professionnelle, à la différence de l'immunité de juridiction pénale qui pourra toutefois faire l'objet d'une demande de renonciation écrite de la part de l'État accréditaire.
Pour conclure, ces deux accords ne posent aucune difficulté particulière sur le plan juridique. Ils répondent à une volonté de notre diplomatie d'améliorer la qualité de vie des familles de leurs agents en mission officielle, dont le nombre est relativement limité dans le cas présent. Si le marché de l'emploi est actuellement sinistré au Nicaragua et offre peu de perspectives dans le secteur privé, l'économie dominicaine est particulièrement dynamique : une trentaine d'entreprises françaises sur place emploient environ 3 000 personnes. L'accord avec le Nicaragua pourrait concerner deux de nos ressortissants - les conjoints de l'ambassadeur et de son numéro deux -, ainsi que deux à six Nicaraguayens. L'accord franco-dominicain pourrait concerner vingt Français, tous conjoints du personnel d'ambassade, et dix-huit Dominicains.
Je préconise par conséquent l'adoption de ce projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale le 24 janvier dernier.
L'examen en séance publique au Sénat est prévu le jeudi 28 mars prochain, selon la procédure simplifiée, ce à quoi la conférence des présidents et votre rapporteur ont souscrit.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté, à l'unanimité, le rapport et le projet de loi précité.