Intervention de Jérôme Reboul

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 27 mars 2019 à 10h00
Dématérialisation des moyens de paiement — Audition commune de Mm. Tony Blanco secrétaire général et membre du directoire de la banque postale olivier gayraud juriste à l'association consommation logement et cadre de vie clcv et erick lacourrège directeur général des services à l'économie et du réseau de la banque de france Mme Sophie Lejeune secrétaire générale de la confédération des buralistes et M. Jérôme Reboul sous-directeur des banques et des financements d'intérêt général à la direction générale du trésor

Jérôme Reboul, sous-directeur des banques et des financements d'intérêt général à la direction générale du Trésor :

Selon une idée reçue dans le débat public, nous serions face à un risque imminent de rationnement de l'accès aux espèces du fait du développement très rapide des moyens de paiement alternatifs. Je crois nécessaire de combattre cette idée.

Il est vrai que nous assistons à une baisse de l'usage des espèces, largement accompagnée par les pouvoirs publics, notamment grâce au succès de la précédente stratégie nationale des moyens de paiement, adoptée sous l'égide de Michel Sapin, alors ministre de l'économie et des finances, qui visait à encourager le développement des moyens de paiement dématérialisés pour les petits montants. Le développement du paiement sans contact, par exemple, a fait reculer l'utilisation des espèces aussi bien au bénéfice des clients que des commerçants.

Si nous continuons d'encourager ce mouvement, il ne faut pas en conclure que les espèces vont disparaître du jour au lendemain. Elles représentent encore 70 % des paiements en nombre et 28 % en valeur. Il n'est pas réaliste de penser que, demain, tous les paiements seront dématérialisés, ne serait-ce que parce que la technologie n'est pas disponible. Il ne faut pas non plus négliger la force de l'habitude des consommateurs. Il faudra encore beaucoup de temps avant d'arriver à une société sans espèces.

Nous avons besoin d'assurer de manière pérenne l'équilibre économique de la filière fiduciaire. Il s'agit d'une question cruciale pour les pouvoirs publics, raison pour laquelle nous avons lancé ces travaux avec la Banque de France. Le Gouvernement entend bien continuer de garantir un accès aisé aux espèces sur l'ensemble du territoire.

Nos travaux seront achevés au printemps, mais ils montrent déjà qu'il n'existe pas de problème massif d'accès aux espèces. Le nombre de distributeurs automatiques de billets est aujourd'hui à peu près le même qu'en 2008, époque à laquelle ces questions ne se posaient pas.

Par ailleurs, le marché invente des solutions. Il existe aujourd'hui des alternatives aux distributeurs automatiques de billets telles que le compte Nickel ou le Point vert, par exemple. La question de l'accès aux espèces doit donc s'envisager d'un point de vue industriel et non plus à travers le traditionnel prisme de la distribution bancaire.

Le Gouvernement est décidé à accompagner le développement de ces solutions alternatives. Je pense notamment au développement du cash back, dont nous espérons qu'il se répandra sur le territoire. Les contacts noués avec les fédérations de commerçants montrent un réel intérêt pour ce type de services.

La question demeure de savoir comment la filière traditionnelle de distribution des espèces va pouvoir assurer sa viabilité économique dans la durée. Nous cherchons à y répondre dans le cadre de la stratégie nationale de gestion des espèces, avec le soutien de la Banque de France.

D'autres pays européens mènent ce type de réflexion. Nos voisins britanniques, par exemple, sont dans une situation plus difficile que la nôtre. Pour faire face à une diminution très rapide du réseau de distribution bancaire, avec des fermetures très intensives de distributeurs automatiques de billets, ils ont décidé de déléguer à l'industrie la révision de la tarification des distributeurs de billets, pour assurer la viabilité, notamment dans les zones les moins denses, des implantations bancaires compromises par l'évolution des usages.

Je ne dis pas que le Gouvernement suivra cette orientation. En revanche, l'exemple britannique montre que des solutions privées permettent d'assurer la viabilité économique. Dans le contexte budgétaire que vous connaissez, il me semble que de telles solutions sont à envisager en priorité.

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