Tout dépend de l'endroit où l'on place le curseur. Si l'on considère qu'être à dix kilomètres d'un point d'accès aux espèces est un énorme problème - ce que je ne méconnais pas -, croire que l'on arrivera à permettre à 100 % de la population d'être à moins de dix kilomètres d'un distributeur me semble irréaliste.
La réalité physique du territoire s'impose aux Français qui habitent au fond d'une vallée en Corse, dans les Pyrénées ou dans des intercommunalités très peu denses du Grand-Est. Par ailleurs, il s'agit d'une question purement politique et je ne veux pas m'élever au-dessus de ma condition. Au regard des chiffres, on ne peut cependant pas considérer qu'il existe un problème systémique.
En ce qui concerne le plafond du cash back, je me souviens avoir déclaré, lors d'une précédente audition devant votre commission, que nous fixerions un montant maximal avec le souci de préserver la qualité de la circulation fiduciaire - les conditions de tri ne sont évidemment pas les mêmes lorsque les billets passent par les encaisses d'établissements de crédit ou par celles des commerçants. Il y a notamment un enjeu de lutte contre le faux-monnayage, par exemple.
Le montant moyen du retrait dans un DAB est aujourd'hui d'un peu moins de 80 euros. Or le cash back est conçu pour se substituer au très grand nombre de petits retraits. Nous avons longuement discuté avec les fédérations de commerçants et ce plafond de 60 euros nous semble pertinent. Bien évidemment, si nous constatons que nous nous sommes trompés, nous le changerons.
Je vous avais indiqué, lors de cette précédente audition, que nous tournions autour de 80 euros. J'avais également dit que le plafond allemand de 150 euros me semblait quelque peu élevé, sans doute en raison d'une utilisation plus intensive d'espèces.
Je ne suis pas l'auteur du rapport « Action publique 2022 », mais l'objectif du Gouvernement, dans la continuité de la précédente stratégie nationale sur les moyens de paiement, est de favoriser le développement de moyens de paiement scripturaux dématérialisés qui apportent un plus aux consommateurs et aux commerçants. Le paiement sans contact est aujourd'hui un succès. Il est d'ailleurs en train de mordre sur des paiements qui se faisaient traditionnellement en espèces.
Cette orientation stratégique demeure. Elle n'est nullement contradictoire avec le constat que l'on ne fera pas disparaître les espèces à horizon prévisible. Nous ne sommes pas face à un problème de transition à quatre, cinq ou même dix ans.
La Suède est dans un environnement juridique très différent du nôtre puisqu'elle ne connaît pas d'obligation légale d'accepter les espèces. En France, la loi dit clairement que les paiements en espèces sont libératoires. Un commerçant ne pourrait donc refuser le paiement en espèces. Les Suédois ont suivi une stratégie beaucoup plus agressive de disparition des espèces, mais ils se sont rendu compte des énormes problèmes que cela pouvait poser et tentent, sous l'égide des pouvoirs publics, de revenir en arrière. Ils font un peu tard ce que nous essayons de faire un peu plus tôt, en lien avec la Banque de France.