Intervention de Jérôme Reboul

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 27 mars 2019 à 10h00
Dématérialisation des moyens de paiement — Audition commune de Mm. Tony Blanco secrétaire général et membre du directoire de la banque postale olivier gayraud juriste à l'association consommation logement et cadre de vie clcv et erick lacourrège directeur général des services à l'économie et du réseau de la banque de france Mme Sophie Lejeune secrétaire générale de la confédération des buralistes et M. Jérôme Reboul sous-directeur des banques et des financements d'intérêt général à la direction générale du trésor

Jérôme Reboul, sous-directeur des banques et des financements d'intérêt général à la direction générale du Trésor :

Nous n'avons aucunement pour objectif de supprimer l'accès aux espèces. L'orientation politique est claire : il faut assurer la viabilité de la filière fiduciaire, pour que les Français continuent de disposer d'argent liquide. C'est le souhait des Français, et nous sommes au service des Français.

Il est vrai que, pour certains d'entre eux, il est plus difficile d'accéder à un distributeur automatique de billets que pour d'autres. Nous nous mobilisons, avec la Banque de France, pour trouver une solution pérenne. La situation actuelle est tout de même globalement satisfaisante.

La question est de savoir si nous voulons une mission de service public de l'accès aux espèces, ce qui supposerait une forte sujétion des établissements bancaires, qui donnerait nécessairement lieu à compensation. Nous pensons qu'on peut faire fonctionner, sans doute avec une intervention des pouvoirs publics, une solution purement privée.

Les Britanniques ont organisé un transfert depuis les établissements qui ont peu de distributeurs automatiques de billets vers ceux qui en ont beaucoup, au travers d'une réévaluation de la commission interbancaire de retrait. La solution néerlandaise a été de placer tous les distributeurs automatiques de billets sous marque blanche, avec une mutualisation des coûts du fonctionnement de l'ensemble du réseau des distributeurs automatiques de billets à l'échelle nationale. Nous allons chercher quelle solution est la mieux adaptée à notre marché et à notre géographie.

Il y a eu une remarque sur les résultats de la Banque de France ; je souligne toutefois qu'il s'agit d'une des recettes non fiscales de l'État !

La filière fiduciaire coûte en tout quelque 2 milliards d'euros au secteur bancaire. Le coût moyen d'un distributeur automatique de billets - mais l'hétérogénéité est très grande - est de 90 000 euros par an. Ses grands déterminants sont la distance par rapport au coffre-fort le plus proche et les primes d'assurance, liées à la nécessité d'un transport sécurisé. Il s'agit donc d'un enjeu massif pour le secteur.

Il faut distinguer l'utilisation des espèces pour les paiements et la demande d'espèces. Cette dernière continue à croître, essentiellement pour des espèces conservées à titre de précaution, pendant que la part des espèces dans le nombre de transactions diminue. Les besoins de production, notamment de billets, sont donc en croissance, et nous n'avons pas de raison de redimensionner à la baisse l'appareil de production. Les sorties de pièces, en revanche, diminuent. Nous devrons donc avoir une discussion avec la Monnaie de Paris, et voir si la commande de pièces ne doit pas être ajustée à la baisse, car nous avons un important stock de sécurité.

Y a-t-il risque de basculement plus rapide que prévu ? Je ne suis pas futurologue, mais les habitudes de la clientèle sont un facteur important, et génèrent une forte inertie. Je ne crois pas à la possibilité d'un basculement si rapide que nous n'aurions pas la capacité de l'anticiper.

Les monnaies locales ne sont pas des créances sur la Banque centrale. Elles n'ont donc pas valeur libératoire, et leur acceptation est purement le produit de la volonté des deux parties : les commerçants ne sont pas obligés d'accepter les monnaies locales. Aussi n'ont-elles pas vocation à être autre chose que des monnaies complémentaires. Leur intérêt est notamment affectif et identitaire. En tous cas, elles ne devraient pas atteindre un pourcentage significatif des transactions. Le cash back est la restitution de monnaie centrale à l'occasion d'un acte d'achat. Cela ne peut pas concerner la monnaie locale.

La sécurité des données renvoie à des questions technologiques et légales. Notre système est extraordinairement protecteur : nous avons une notion très large du secret bancaire, et les textes européens protègent bien les consommateurs. Le règlement général sur la protection des données (RGPD) assure de surcroît une couverture large et transversale. En somme, l'arsenal juridique est en place, et nous n'avons pas l'impression qu'il y a des trous dans la raquette.

Je ne suis pas un expert de la cyber-sécurité. Les banques françaises ont traditionnellement une approche très prudente de la dissémination de leurs données. Elles sont inquiètes de l'irruption des nouveaux acteurs et de l'usage qu'ils pourraient faire des données bancaires auxquels ils auraient accès. Dans les débats autour de la directive dite « DSP2 », le Gouvernement a été très attentif à cet aspect, et nous avons mis en place un dispositif national qui a anticipé la mise en place d'une interface de programmation - ou API pour application programming interface, en anglais - , avec l'objectif d'aller plus vite vers la bonne solution.

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