Pourquoi ne pouvons-nous parvenir aux mêmes résultats que d'autres pays ? Les comparaisons internationales entre les économies respectives des pays du G5 démontrent que, moins on travaille dans l'année et au long de la vie, plus la réglementation du travail est rigide, plus les dépenses collectives pèsent sur la richesse nationale, plus les prélèvements obligatoires sont lourds et plus le chômage est élevé !
Le taux moyen de chômage dans l'Union européenne à Quinze s'élevait à 7, 4 % ; celui de l'Union à Vingt-Cinq est de 8 %. Notre taux national de chômage leur est encore supérieur, de même que le niveau de nos prélèvements obligatoires.
Néanmoins, saluons les efforts récents en faveur de l'emploi et les premiers résultats obtenus, largement dus à la transformation du système administratif de l'emploi ainsi qu'à la dynamisation du secteur de la construction et des services à la personne. Nous sommes encore loin de l'Espagne qui, alors qu'elle détenait le taux de chômage le plus élevé jusqu'au premier trimestre 2005, après une pointe à près de 16 % dans les années quatre-vingt-dix, a fait passer ce taux de 10, 1 % en juin 2004 à 7, 8 % aujourd'hui. S'agissant du chômage, l'Espagne occupe désormais la sixième position dans le classement européen.
Ces résultats ont pour origine une fiscalité incitative. Mais, contrairement à nos voisins, nous ne bénéficions d'aucune des spécialités fiscales reconnues qui contribuent à la prospérité de ces pays : ni faible taux d'impôt sur les sociétés, comme en Irlande, ni absence d'impôt sur les transmissions d'entreprise, comme en Angleterre, ni absence d'impôt de solidarité sur la fortune, comme en Belgique, ni faible niveau de cotisations sociales, comme en Allemagne.
Vous avez toutefois amorcé une réforme fiscale. Ainsi, la réforme de l'impôt sur le revenu et la création d'un bouclier fiscal à 60 % sont des mesures qui vont dans le bon sens. Nous sommes cependant loin de réaliser la promesse électorale d'une baisse de 33 % de l'impôt sur le revenu.
L'ISF reste un impôt politiquement marqué, alors qu'il faudrait le traiter uniquement de manière technique. Pourquoi n'a-t-on pas fait un geste, dans ce dernier budget de la mandature, pour exonérer d'ISF la résidence principale ? C'était pourtant une mesure juste et de bon sens.
Il faut gommer au maximum toute connotation politique attachée à l'impôt et ne rechercher que l'efficacité. Seule l'affectation du produit de l'impôt doit être politique.
En matière de recettes, je propose à mon tour que l'on mène à son terme la réflexion sur l'instauration d'une TVA sociale. Il est sans doute difficile de transposer en France un modèle valable pour le Danemark, par exemple, alors que nos structures sont très différentes. Ainsi, dans ce pays, l'âge de la retraite est fixé depuis longtemps à soixante-sept ans et, corrélativement, le taux de chômage est de 3, 5 %.
Notre partenaire allemand prend lui aussi ce chemin, avec une hausse de trois points de la TVA, qui passera de 16 % à 19 % au 1er janvier 2007, accompagnée d'un allégement des cotisations sociales des entreprises. Ce relèvement de trois points de la TVA sera affecté pour un tiers aux allégements de charges et pour deux tiers à la réduction du déficit public. C'est aussi notre objectif.
Monsieur le ministre délégué, à chacun de vos exposés devant la commission des finances, vous ensevelissez sous les compliments la piste de la TVA sociale et soulignez combien cette idée est intéressante. Alors, comptez-vous la mettre en pratique ?
Notre calendrier doit s'inspirer des réformes mises en place avec succès par nos principaux partenaires et concurrents. Vous avez dit, monsieur le ministre délégué, que vous souhaitiez « pour la France ce qui se fait de mieux à l'étranger ». Dans cet esprit, il faut saluer la création, au sein du ministère des finances, d'un pôle de référence en matière d'études comparatives internationales dans le domaine de la gestion publique. À cet égard, je rappelle que, si le poids des dépenses publiques françaises était ramené à la moyenne européenne, nous réaliserions une économie de 100 milliards d'euros.
Cet objectif apparaît irréaliste ? Regardons plutôt ce qui a été fait ailleurs.
Au Canada, en dix ans, de 1993 à 2003, les dépenses des ministères - transferts aux provinces exclus - sont passées de 16, 8 % à 11, 5 % du PIB. Le nombre des fonctionnaires fédéraux payés par le Trésor a diminué de 30 % et le déficit public, qui représentait 5, 6 % du PIB, est devenu un excédent de 0, 6 % ! Avoir moins de fonctionnaires, cela veut dire accroître leur efficacité en les payant mieux.
Au sein de l'Union européenne, l'Allemagne ne remplace que deux départs à la retraite sur trois.
Quant à la Suède, considérée à juste titre comme un État protecteur où le social demeure une priorité, son exemple est instructif. La méthode était claire : toutes les administrations publiques devaient réduire leurs dépenses de 11 % en trois ans. Que n'avons-nous fixé un tel objectif ! Dans ce pays, en effet, les fonctionnaires sont moins nombreux mais bien mieux rémunérés. En dix ans, la fonction publique d'État est passée de 400 000 postes à 230 000 et les salaires ont augmenté de 60 %. La fonction publique de carrière est devenue une fonction publique dynamique.
Tout a été dit sur l'occasion manquée de réduire de manière drastique le nombre des fonctionnaires de l'État. Le projet initial était de ne renouveler qu'un poste sur deux. Nous en sommes loin ! Ce budget prévoit 15 002 postes de fonctionnaires d'État non renouvelés sur plus de 2, 2 millions, soit un taux de 0, 7 %. Monsieur le ministre délégué, est-ce satisfaisant ? Est-ce performant ? Est-ce incitatif ?
L'État demande aux entreprises de faire des efforts considérables. Mais montre-t-il l'exemple ?
Réduire les dépenses publiques, ce n'est pas un dogme, c'est une nécessité. Michel Camdessus rappelait dans un récent article : « Nous ne pouvons échapper à un changement radical de cap dans la conduite des finances publiques. Trop longtemps jusqu'ici, action politique et dépenses publiques ont été synonymes ».
L'objectif est de faire la meilleure dépense publique, pour le meilleur service public, au meilleur coût.
Avec les audits de modernisation, ce gouvernement a opté pour le principe canadien d'optimisation des dépenses afin de rendre celles-ci plus performantes, et a choisi d'autres idées à l'étranger : les achats au Royaume-Uni et en Italie, l'immobilier en Allemagne, la paye en Italie, la visioconférence à Singapour, les amendes à Hongkong, et j'en passe.
C'est le résultat des audits, et tout cela est positif.
Quant aux contrats pluriannuels de performance, ils sont un outil utile permettant de moderniser les ministères, avec leur accord.
Mais il subsiste trop d'exemples incompréhensibles, donc injustifiables. Ainsi, comment expliquer que les effectifs du ministère de l'agriculture aient augmenté de 8 % depuis 1982 alors que, dans le même temps, le nombre d'exploitations agricoles baissait d'un tiers ?
Nous devons enfin développer l'offre pour relancer la croissance et ne plus tabler seulement sur la demande, car cette dernière option conduit, étant donné le profil manufacturier de notre pays, à un déséquilibre de notre balance commerciale.