Intervention de Anne-Sarah Kertudo

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 14 mars 2019 : 1ère réunion
Audition de mmes fabienne servan-schreiber présidente et anne-sarah kertudo directrice de l'association droit pluriel

Anne-Sarah Kertudo, directrice de l'association Droit pluriel :

En effet, le handicap reste largement perçu comme une infériorité. Les personnes en situation de handicap sont invisibles. De plus, l'école n'a pas été prévue pour les millions d'enfants handicapés. Comment cela est-il possible ? À nouveau, il ne s'agit pas d'une problématique nouvelle et nous ne sommes pas la seule population à avoir été mise au ban de la société et à devoir conquérir nos droits.

La permanence juridique pour les sourds que je tenais se déroulait dans le cadre de la Mairie de Paris. J'ai reçu un agent de la DRH qui souhaitait m'imposer un référent. Je lui ai demandé s'il avait lui-même un référent et il m'a répondu que cela n'était pas le cas. Moi non plus, je n'avais pas envie d'avoir un référent. Depuis toujours, les personnes en situation de handicap entendent qu'elles ont besoin de quelqu'un à leur place pour dire, pour comprendre, pour décider. Nous subissons d'autant plus des situations de violence que nous entendons depuis toujours que nous n'avons pas le droit de faire ce que nous voulons. Nous n'avons pas d'autonomie, notre corps ne nous appartient pas. D'autres personnes décident en notre nom.

Par conséquent, il faut que toutes les personnes qui portent des handicaps ne soient pas stigmatisées et qu'elles ne ressentent pas de honte. Je rappelle que 80 % des handicaps sont invisibles. Dans ce cas, nous avons tendance à le cacher. Mais pourquoi le cacher ? Moi-même, j'ai perdu l'audition et j'ai tout fait pour le dissimuler. Par conséquent, je ne répondais pas aux questions, ou je répondais à côté. Je pensais que si je montrais mon handicap, cela se retournerait contre moi. Or nous ne devons pas avoir honte de nos handicaps.

Droit pluriel agit par le biais de ses formations. Toutefois, nous n'avons pas encore suffisamment de recul, car nous sommes en train de construire les outils qui seront appliqués l'année prochaine. Pour l'heure, nous avons seulement signé une convention avec le ministère de la Justice pour former les Conseils départementaux d'accès aux droits (CDAD). Après une journée de formation, le retour des personnes formées est très positif. Elles expliquent qu'elles ignoraient tout sur la situation des personnes handicapées. Il y a tout à apprendre et à découvrir. Certains professionnels avouent ne pas avoir compris les enjeux en recevant des personnes handicapées. Il semble donc évident que ce travail de formation est indispensable et qu'il aura un réel impact afin de rendre la justice accessible pour tout le monde.

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