Intervention de Pascal Auscher

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 24 janvier 2019 à 8h40
Auditions sur « les zones à régime restrictif zrr dans le cadre de la protection du potentiel scientifique et technique de la nation

Pascal Auscher, directeur de l'Institut national des sciences mathématiques et de leurs interactions (INSMI), CNRS :

C'est pourquoi j'ai rappelé la mission nationale. Ma mission est vraiment que les laboratoires produisent la meilleure recherche possible. Je dois dire qu'ils le font. Ils maintiennent la France dans le peloton de tête des nations en matière de recherche en mathématiques. On dit parfois que la France est au deuxième rang après les États-Unis. La semaine dernière encore, un prix prestigieux a été décerné à un mathématicien français, le prix Wolf.

Les raisons de ce succès sont multiples. D'abord, en mathématiques, il y a une forte tradition de formation, on pense aux Écoles normales supérieures, mais les universités ont également de très bons masters et doctorats. La mobilité entrante et sortante est exceptionnelle, à tous les niveaux : étudiants, doctorants, post-doctorants, recrutements. L'an dernier, le CNRS a recruté 6 chargés de recherche de nationalité étrangère sur les 18 qui sont entrés en mathématiques. C'est une moyenne annuelle. Le but est de collaborer avec les meilleurs à l'international. La politique scientifique est exigeante, dynamique, et il est fait confiance aux chercheurs et enseignants-chercheurs pour faire émerger les sujets internes et externes de la discipline.

En mathématiques, on démontre des théorèmes, c'est-à-dire des énoncés déduits de façon logique, des axiomes ou d'autres énoncés. Et puis on les diffuse, en les publiant. Il faut les publier les premiers, dans les revues où ils seront lus par les collègues de la discipline. Le CNRS nous encourage à les prépublier, sur des archives ouvertes, avant qu'ils soient vérifiés par les pairs. En fait, la diffusion de l'information va très vite. Lire et comprendre un article de mathématiques demande du temps, des efforts, qui ne sont pas à la portée du premier venu. On est souvent très loin d'une application industrielle et technologique. Le transfert vers un produit prend des années, requiert autant d'innovations technologiques que le résultat avait demandé d'ingéniosité pour le démontrer.

Dans la procédure ZRR, il y avait eu toutes sortes de dialogues avec les directeurs d'unité (DU) organisés en collectifs pour discuter avec le SGDSN. Après un certain nombre de réunions et d'années d'échanges, les DU et le SGDSN ont finalement rompu le dialogue sur un constat d'échec au niveau des comités d'experts consultés sur les cotations des risques.

J'ai entendu qu'il y a absence de choix par mots-clés. Je dois dire que le sentiment de mes collègues DU à l'époque n'était pas celui-ci. Au contraire, à l'époque, il y avait ce sentiment que les identifications de laboratoire devant être classés en ZRR étaient réalisées selon un certain nombre de mots-clés, lesquels étaient d'ailleurs inconnus de nos collègues DU, puisque le SGDSN n'en faisait pas état.

La lourdeur évoquée par mon collègue physicien est la même pour nous. Pour les procédures de recrutement, c'est vraiment un frein. Le surcoût administratif est pratiquement intenable pour l'ensemble des unités. Pour rappel, ces unités sont hébergées par nos partenaires universitaires, et donc ce surcoût est essentiellement supporté par eux. Si j'y ajoute les frais induits et diverses autres raisons, au bout d'un moment, les collègues ont décidé de ne plus participer à ces discussions et de rompre le contact.

Actuellement, des discussions se sont rétablies à la demande du préfet Inglebert. Je m'y suis rendu et je vais proposer aux DU d'avoir une nouvelle discussion avec le HFDS. Pour l'instant, nous en sommes là.

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