Intervention de Loïc Hervé

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 27 mars 2019 à 9h30
Proposition de loi tendant à sécuriser l'actionnariat des sociétés publiques locales et des sociétés d'économie mixte — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Loïc HervéLoïc Hervé, rapporteur :

Nous connaissons tous parfaitement la place prépondérante des entreprises publiques locales, dites EPL, et de l'économie mixte dans nos territoires. Ces sociétés de droit privé dont le capital est totalement ou partiellement public permettent de faire converger les moyens et les énergies pour conduire nombre de projets, concernant aussi bien l'aménagement, l'immobilier que les services publics locaux.

La Caisse des dépôts et consignations nous l'a confirmé lors de son audition, les sociétés publiques locales (SPL), les sociétés publiques locales d'aménagement (SPLA) et les sociétés d'économie mixte locales (SEML) sont des éléments clés du dynamisme de nos territoires.

Leur succès rend aujourd'hui les EPL incontournables. Il en existe 1 300 en activité, dont plus de 900 SEML, et plus de 350 SPL et SPLA. Ensemble, elles représentent plus de 65 000 emplois, près de 14 milliards d'euros de chiffre d'affaires et fournissent un logement à 1,4 million de personnes en France.

Ces sociétés courent aujourd'hui un grave danger. Par une décision du 14 novembre dernier, le Conseil d'État a imposé que chaque collectivité actionnaire détienne désormais l'ensemble des compétences sur lesquelles porte l'objet social de la société.

D'un trait de plume, le juge a plongé dans l'incertitude la très grande majorité des EPL existantes et bloqué la plupart des projets de création. Cette jurisprudence ne s'appliquait qu'aux SPL, mais on peut penser que les SPLA et les SEML seront également concernées puisqu'elles sont soumises à des dispositions similaires. Or la majorité de ces sociétés sont capitalisées par des collectivités ou des groupements de collectivités ne détenant pas l'ensemble des compétences sur lesquelles porte leur objet.

En l'état, cette jurisprudence sonne donc le glas des EPL « multicouches » et de la coopération inter-collectivités.

Plus grave, une SPL ne peut exercer son activité que pour le compte des collectivités ou des groupements qui en sont actionnaires. Réduire le nombre de collectivités autorisées à participer au capital limite donc le nombre de « clients » de la SPL et porte une atteinte, parfois insurmontable, à sa viabilité économique.

Les territoires attendent une réponse rapide et efficace du législateur pour contrer cette jurisprudence. Je suis sûr que vous avez quasiment tous reçu des demandes en ce sens.

C'est précisément l'objet de la proposition de loi déposée par Hervé Marseille et soutenue par pratiquement tous les groupes de notre assemblée. Ce texte tend à préciser que la possibilité d'être actionnaire d'une SPL ou d'une SEML est ouverte à toute collectivité ou groupement ayant compétence pour, au moins, une activité comprise dans l'objet de cette société. Je remercie son auteur d'avoir avancé cette mesure, que je soutiens totalement.

Les amendements déposés par mes soins, avec l'accord d'Hervé Marseille, sont essentiellement techniques. Ils visent à clarifier les dispositions de la proposition de loi et à en étendre le champ.

Ainsi, pour plus de clarté, j'ai souhaité que seules des dispositions strictement nécessaires à la mise en échec de la jurisprudence du Conseil d'État soient introduites, afin de ne pas bouleverser inutilement le droit applicable.

J'ai également souhaité que la formulation retenue lève toute ambiguïté sur le rôle des entreprises publiques locales, qui sont des prestataires, et non des EPCI. Sociétés commerciales strictement tenues par leur objet social, les EPL n'exercent aucune compétence en lieu et place des collectivités actionnaires ; elles fournissent des prestations, pour leur compte et sous leur contrôle, afin que celles-ci exercent leurs compétences.

S'agissant de l'extension du champ de la proposition de loi, j'ai déposé un amendement pour que celle-ci s'applique aussi aux SPLA et aux SPLA d'intérêt national, afin de protéger ces dernières contre les effets de cette jurisprudence, mais aussi de garder l'homogénéité du droit applicable aux différentes EPL.

Un autre de mes amendements tend à valider l'actionnariat des EPL existantes qui ne respectent pas le nouveau critère fixé par le Conseil d'État.

Enfin, je vous informe qu'un amendement sera déposé, au stade de l'examen en séance, pour prévoir les modalités d'application outre-mer de cette proposition. Le sujet est complexe et il nous faut encore y réfléchir.

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