Intervention de Benoît Barret

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 27 mars 2019 à 9h30
Moyens mis en place pour faire face aux actes de violence et de vandalisme commis à paris — Audition de la fédération cfe-cgc organisation professionnelle de la police nationale

Benoît Barret, secrétaire national adjoint Alliance Police nationale :

Merci de votre invitation. Nous sommes très satisfaits de pouvoir exprimer le sentiment des policiers devant vous. Voilà dix-neuf weekends d'affilée que notre démocratie est mise à rude épreuve ; nous le disons en effet : derrière les policiers, c'est la démocratie qui est visée tous les weekends, que les policiers et gendarmes représentent. Nous constatons une nouvelle forme de contestation violente, ultraviolente même. C'est le fait de personnes que nous connaissons - je songe aux black blocs, aux identitaires, aux militants extrémistes -, mais aussi, et c'est plutôt nouveau, de personnes qui arrivent dans les manifestations comme des citoyens normaux et qui s'y radicalisent. Ces personnes lambda se laissent entraîner par l'effet de masse, l'anonymisation que permet la foule, et par l'inaction de la justice. Nous pensons en effet que la chaîne pénale est importante dans un État de droit. La démocratie passe par le policier, le procureur, le juge du siège et l'application de la peine. Il n'y a rien de pire dans un État de droit que des peines qui ne sont pas appliquées. Cela développe chez certains un sentiment d'impunité, qui ne peut plus durer ! Nous avons face à nous, le weekend, des personnes pour lesquelles on peut parler - c'est triste à dire, jamais je n'aurais songé le faire un jour - d'habitude aux troubles à l'ordre public.

Nous n'acceptons plus que la police soit critiquée comme elle l'est depuis des semaines. Nous attendons depuis des mois une prise de position ferme du politique pour dire que les policiers travaillent dans le strict cadre de la loi. De nombreux débats ont crispé les policiers, dont certains doivent s'expliquer devant l'IGPN d'avoir fait leur travail. Le débat sur le LBD a fait très mal aux policiers. Certains ont voulu faire croire à l'opinion publique que les responsables des violences étaient les policiers, et nous ne pouvons plus l'accepter. Nous parlons de gens qui manifestent sans droit, sans déclarer leur manifestation, qui donc bravent une interdiction en restant face aux policiers, même si personne ne peut se réjouir des blessures. Nous remercions les politiques qui ont pris position. Le weekend dernier, enfin, nous avons entendu un vrai message de soutien aux policiers.

M. Johan Cavallero, responsable des CRS, pourra vous en parler plus en détail. M. Yvan Assioma, notre délégué parisien, vous parlera plus particulièrement de ce qui se passe dans la capitale. Je reprendrai ensuite la parole pour évoquer d'autres aspects, dont le matériel : nous réclamons depuis des mois un matériel qui n'arrive pas, ce qui est scandaleux, je vous le dis clairement. Certains de nos collègues de province n'ont toujours pas de casque de protection, de jambières, de protège-cou, n'ont pas assez de munitions, ce qui est intolérable, car cela les empêche de faire leur travail correctement. Nous n'avons pas été préparés à avoir de tels événements tous les weekends ! Aussi demandons-nous à l'administration un vrai plan Marshall du matériel. Certains collègues ont des masques à gaz périmés depuis 2008, donc sans efficacité, des casques à visières rayées, et manquent de boucliers comme de munitions - il y a un vrai problème de munitions dans la police nationale, tout le monde le sait. Je pourrais vous en parler pendant des heures ! Il est important que les parlementaires entendent cela. Si rien ne change, rien ne s'arrangera.

La « loi anticasseurs » doit être promulguée et appliquée. Elle ne va toutefois pas assez loin. Le Gouvernement fait certes de la participation à une manifestation interdite une contravention non plus de première, mais de quatrième classe, passible d'une amende de 135 euros, mais seule l'organisation d'une telle manifestation interdite reste un délit. Pour éviter les attroupements, il faut faire de la participation à une manifestation interdite un délit, car cela autorise la coercition. À défaut, impossible de verbaliser qui que ce soit !

L'exemple allemand est partout vanté, qui est censé remettre en cause le maintien de l'ordre à la française. Mais sachez que la désescalade à l'allemande ne fonctionne plus face aux black blocs. Au dernier congrès du G20 à Hambourg, les black blocs ont conduit nos homologues allemands à revoir leurs méthodes. Malheureusement, ces gens-là ne comprennent rien d'autre que le contact. C'est triste à dire, mais c'est la vérité. La nouvelle arme utilisée contre nous en province, outre les cocktails Molotov, ce sont des pétards de type mammouth enduits de colle néoprène et recouverts de boulons et de morceaux de verre. Cela se passe aujourd'hui, en Vendée comme à Nancy. Et ce ne sont pas forcément des black blocs, ce sont aussi des gilets jaunes radicalisés ! Dans ce contexte, le discours de ces dernières semaines, crispant les policiers et remettant en cause la doctrine de maintien de l'ordre est une erreur.

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